Wan LI, Ambassadeur de Chine en Côte d’Ivoire, a accordé un entretien exclusif à Aprnews.
Entretien dans lequel le diplomate réfute toutes les accusations portées contre son pays, dans la crise sanitaire liée au nouveau Coronavirus (Covid-19).
Il revient sur les efforts de la Chine dans cette lutte, dépeint la situation épidémique dans le pays et appelle à la solidarité internationale. Wan Li évoque surtout des actions en vue pour aider la Côte d’Ivoire à faire face à la pandémie.

Quelle est la situation du Covid-19 à ce jour dans votre pays ?

La situation de la prévention et de la lutte contre l’épidémie en Chine continue de s’améliorer et a abouti aux premiers résultats. Le bilan établi le 6 avril était de 83.039 cas d’infection confirmés, 77.361 guéris et 3.340 morts, dont les cas actuellement confirmés dans la ville de Wuhan, centre épidémique de Chine réduits à moins de 1000. Toutes les provinces et villes, y compris Wuhan, accélèrent la reprise des activités de production. On peut dire que le peuple chinois est sorti de la période la plus dure. Cependant, le nombre des cas confirmés importés a augmenté rapidement. La Chine fait face à la double pression d’une importation de l’extérieur et d’un rebond intérieur. Donc aucun relâchement n’est permis.
Quelqu’un disait ceci récemment : « La Chine a une responsabilité gigantesque dans cette pandémie. Elle cache son véritable bilan humain en Chine et réécrit l’histoire de cette crise sanitaire à son avantage ».

Que répondez-vous à cela ?

À mon avis, les juges les plus qualifiés en matière de sécurité mondiale de la santé publique sont l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et des experts dans le domaine de l’épidémiologie ou du contrôle des maladies. Depuis l’apparition de l’épidémie de pneumonie, le Directeur général de l’OMS, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, salue à maintes reprises des mesures complètes, strictes et énergiques prises par le gouvernement chinois, et apprécie la transparence et la grande contribution de la Chine à travers la lutte contre l’épidémie. Le 1er avril, lors de la conférence de presse tenue à Genève, Michael Ryan, chef du programme d’urgence sanitaire de l’OMS, a également réfuté les accusations infondées sur les données opaques chinoises. 

Ah bon ?

Bien sûr ! Dans un esprit ouvert, transparent et responsable, la partie chinoise a communiqué à temps à la communauté internationale, la situation épidémique. La Commission nationale de la santé de Chine et d’autres départements concernés publient chaque jour les dernières données sur la pandémie. Le calendrier des mesures prises par la Chine contre l’épidémie est parfaitement clair. Tout le monde peut le trouver dans les reportages publics. Le 27 décembre 2019, Zhang Jixian, Directrice du Département des soins respiratoires et critiques de l’Hôpital de médecine traditionnelle chinoise et occidentale intégrée du Hubei, a signalé les trois premiers cas suspects. Le 29 décembre, les commissions de la Santé du Hubei et de Wuhan ont chargé les centres de contrôle et de prévention des maladies et les hôpitaux concernés de mener des enquêtes épidémiologiques. Le 30 décembre, la Commission municipale de la Santé de Wuhan a publié la « Circulaire urgente sur le traitement de la pneumonie de cause inconnue ». Le 31 décembre, la Commission nationale de la Santé a envoyé un groupe d’experts à Wuhan pour enquêter sur place. Le 3 janvier 2020, la Chine a commencé à communiquer à temps les informations à l’OMS et aux autres pays. 

Vous en avez aussi envoyé aux Etats-Unis ?

“ Nous comprenons la situation difficile de certains pays occidentaux (…) pas une raison pour calomnier les efforts de la Chine “

Y compris les Etats-Unis ! Le 8 janvier, l’agent pathogène est premièrement confirmé. Le 11 janvier, le Centre chinois de contrôle et de prévention des maladies a mis en ligne cinq séquences du génome entier du nouveau coronavirus et partagé des données avec le monde et l’OMS. Le 23 janvier, la Chine a pris des mesures complètes, approfondies et rigoureuses sans précédent, telles que la fermeture des canaux de sortie de Wuhan. Nous comprenons la situation difficile de certains pays occidentaux et la pression à laquelle sont confrontés certains responsables, mais ça ne constitue pas la raison pour laquelle ils calomnient les efforts déployés par la partie chinoise contre l’épidémie ou rejettent la responsabilité sur la Chine. C’est extrêmement irresponsable et immoral.

Dans l’esprit de certaines populations en Afrique, le Covid-19 est un virus fabriqué par les laboratoires chinois à Wuhan, et qui s’est échappé. Pour d’autres, la Chine a volontairement rependu le virus dans la nature, pour affaiblir les autres puissances économiques dans le monde et les pousser à se tourner vers elle pour trouver les solutions. Ces populations pensent même que la Chine détient le remède contre le virus. Que répondez-vous ? 

Ces allégations ne proviennent pas des populations africaines. Elles sont en réalité inventées par une poignée de politiciens et de médias occidentaux, et sont d’une extrême absurdité. Le 18 février, la revue scientifique médicale de renommée mondiale The Lancet a publié une déclaration conjointe signée par 27 scientifiques du plus haut niveau dans le monde, et spécialisés dans l’hygiène publique. Ils ont exprimé leur soutien au personnel scientifique, médical et soignant chinois dans leur lutte contre l’épidémie, et ont condamné fermement les théories du complot. Je peux vous dire clairement que selon les analyses faites sur les génomes de l'agent causal, ce nouveau coronavirus provient de la faune. Concernant l’allégation qui dit que la Chine a voulu profiter de ce virus pour exercer son emprise sur d’autres pays, à parler franchement, la Chine n’a pas la capacité d’assumer une si lourde responsabilité. Elle ne cherchera jamais à atteindre son objectif par des moyens qui nuisent aux autres et ne rapportent aucun bénéfice à elle-même. 

“ Les théories du complot (…) mettent en péril notre collaboration mondiale dans la lutte contre ce virus “.

Pour vous donc, la Chine n’est trempée dans aucun complot de ce type …

Les théories du complot ne font que générer de la peur, des rumeurs et des préjugés qui mettent en péril notre collaboration mondiale dans la lutte contre ce virus. Face à cette pandémie, nous avons besoin de promouvoir la science, l’esprit rationnel et la coopération pour combattre l’ignorance, la désinformation et les conjectures. Nous appelons la communauté internationale à lutter ensemble non seulement contre le nouveau coronavirus, mais aussi contre le « virus politique » comme ces théories du complot. Ensuite, il est clair qu’il n’existe pas encore de remède contre le Covid-19. Les scientifiques et entreprises pharmaceutiques y travaillent sans relâche. La Chine mène aussi des coopérations avec quelques pays là-dessus. Si la Chine a réussi à contrôler cette épidémie en l’espace d’un peu plus de deux mois, c’est grâce à la volonté politique ferme des dirigeants chinois, à la mise en place des mesures de traitement et de contrôle complètes, scientifiques et rigoureuses, et à l’union et à l’esprit de la discipline de l’ensemble des populations chinoises. En même temps, les méthodes de traitement combinant la médecine traditionnelle chinoise et la médecine occidentale ont aidé à atténuer certains symptômes et à guérir les patients atteints du Covid-19.

Comment expliquez-vous le fait qu’aujourd’hui, le monde entier se tourne vers la Chaîne pour avoir des solutions, du matériel médical et de protection ?

Actuellement, la pandémie a éclaté dans de nombreux endroits à travers le monde. Beaucoup de pays sont confrontés à de sérieux défis. La Chine a été la première à réussir à résister à l’épreuve de l’épidémie, la première à réussir à contrôler efficacement sa propagation. Elle a donc acquis une certaine expérience et connaît certaines bonnes pratiques dans la gestion de cette crise sanitaire. Elle est prête à les partager avec le reste du monde. Ayant une grande industrie manufacturière, la Chine est une grande puissance en la matière. Au fur et à mesure que la situation à l’intérieur de la Chine continuait de s’améliorer, de nombreuses industries ont repris leurs activités, avec des capacités de production sans cesse accrues. La Chine est prête à fournir plus de soutien aux pays en besoin dans leur lutte contre la pandémie, tout en satisfaisant à la forte demande nationale.

“ (…) aucun pays n’en sortira sain et sauf et la Chine ne fera pas exception “

L’expertise de votre pays est sollicitée dans le monde entier. Finalement, pour certains spécialistes, la Chine sera le seul pays à sortir de cette crise, plus forte économiquement ? Partagez-vous cette analyse ?

Actuellement, la pandémie se propage très vite à l’échelle mondiale. Non seulement elle met en danger la santé publique mondiale, mais aussi aura de fortes répercussions sur l’économie, les finances et la politique globale. Face à cette crise commune de l’humanité, aucun pays n’en sortira sain et sauf et la Chine ne fera pas exception. Bien qu’à ce stade, nos efforts de contrôle et de traitement aient produit des effets positifs importants, si la situation des autres pays du monde ne s’améliore pas, ce serait difficile de maintenir cette tendance positive en Chine. La communauté internationale a plus que jamais besoin de l’union et de la solidarité. Cela montre une fois de plus qu’il est aussi important qu’urgent de construire une communauté d’avenir partagé pour l’humanité. C’est dans ce contexte que le Président XI Jinping a appelé à une confiance renforcée, des efforts concertés et une réponse collective par un renforcement de la coopération internationale sur tous les plans et la création d'une forte synergie, de manière à gagner ce combat de l'homme contre une maladie infectieuse majeure” dans les quatre propositions qu’il a avancées lors du Sommet extraordinaire du G20 consacré à la gestion collective de la pandémie.

“ Il y a deux semaines, l’Ambassade de Chine a épargné 1 500 masques de son stock et les a donnés à l’INHP “

La Côte d’Ivoire fait partie des pays amis de la Chine. Quel type de collaboration existe-t-il actuellement entre nos deux pays, dans la lutte contre le Covi-19 ?  
 

La Côte d’Ivoire est un bon ami et un bon partenaire de la Chine. Les deux pays travaillent en coopération pour lutter ensemble contre la pandémie, ce qui permet d’approfondir les relations bilatérales et de consolider l’amitié sino-ivoirienne.

Depuis le début de l’épidémie, et notamment au moment difficile pour la Chine, la partie ivoirienne, allant des hautes autorités à la population ordinaire, a soutenu par différents moyens la partie chinoise dans nos efforts de lutter contre l’épidémie. Les soutiens moral et financier précieux de la Côte d’Ivoire, le gouvernement et le peuple chinois les tiennent au cœur. Quand la Côte d’Ivoire fait face à la pandémie, et que la propagation semble s’accélérer, nous tenons à rester aux côtés de nos amis ivoiriens. Il y a deux semaines, l’Ambassade de Chine a épargné 1.500 masques de son stock et les a donnés à l’Institut Nationale de l’Hygiène Publique (INHP). Le don du gouvernement chinois au gouvernement ivoirien, dont des masques et combinaisons protectrices, arrivera bientôt en Côte d’Ivoire. L’ Ambassade travaille actuellement avec les autorités sanitaires ivoiriennes et la province chinoise du Sichuan, province qui a eu une performance remarquable dans sa lutte contre l’épidémie, pour organiser une visioconférence permettant à des experts chinois de partager leurs expériences avec leurs homologues ivoiriens. À la demande du gouvernement ivoirien, nous travaillons aussi pour faciliter l’achat de matériel médical par des entreprises ivoiriennes en Chine. Par ailleurs, le secteur privé chinois s’est aussi mobilisé. Jack MA, fondateur du Groupe Alibaba, a offert à travers sa fondation 100.000 masques respiratoires, 20.000 kits de diagnostic, des combinaisons protectrices et des masques de protection à chaque pays africain. Le don pour la Côte d’Ivoire est déjà arrivé à Abidjan. En outre, des ressortissants chinois et des entreprises chinoises présents en Côte d’Ivoire cherchent à obtenir des matériels médicaux pour aider les amis ivoiriens.

“ Aujourd’hui, la Chine n’a pas fini avec l’épidémie “ 

La Côte d’Ivoire est dans un grand besoin de matériels médicaux et de protection. Que peut faire la Chine dans ce sens ?

Aujourd’hui, la Chine n’a pas fini avec l’épidémie. Nous avons encore un grand besoin en matériel médical. Défendre la santé des Chinois en prévenant et en contrôlant l’épidémie, cela représente une responsabilité primordiale du gouvernement chinois. Protéger 1,4 milliard de personnes en Chine, cela constitue en soi une grande contribution à la sécurité de la santé publique du monde entier. En même temps, nous tenons à continuer de soutenir la Côte d’Ivoire, en fonction de l’évolution de la pandémie et dans la mesure de nos capacités. En outre des aides matérielles et financières, nous allons recommander au gouvernement et aux l’entreprises ivoiriennes des exportateurs qualifiés de matériel médical et faciliter l’achat des acteurs ivoiriens en Chine. Je tiens à rappeler aux acteurs ivoiriens que, s’ils veulent entrer en contact directement avec une entreprise chinoise pour acheter des masques ou d’autres matériels, il vaut mieux demander le certificat d’enregistrement de dispositifs médicaux à l’entreprise chinoise et vérifier si les produits à acheter correspondent aux normes ivoiriennes. Il ne faut acheter que les kits de diagnostic et les médicaments autorisés par l’Administration nationale de dispositifs médicaux de Chine (The National Medical Products Administration of China). Les achats commerciaux s’avèrent plus rapides, par rapport aux aides publiques qui prennent plus longtemps en raison de procédure d’autorisation.

La Chine est-elle prête à envoyer des médecins en Côte d’Ivoire, comme elle le fait dans d’autres pays du monde ? À quelles conditions cela pourra se faire ?

Jusqu’ici, la Chine a déjà envoyé des équipes d’experts médicaux en Iran, en Iraq, au Pakistan, en Italie, en Serbie, au Cambodge et au Venezuela. Ce sont des pays gravement touchés par la pandémie. À ma connaissance, beaucoup de pays ont demandé à la Chine de leur envoyer des médecins. Nous ferons des arrangements en tenant compte à la fois de la situation en Chine et celle dans le pays demandeur. Par ailleurs, nous continuerons à partager des expériences, par différents moyens, avec la Côte d’Ivoire et les autres pays du monde.

La rédaction APRNEWS
Anne-Marie Kacou