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Côte d’Ivoire : Akossi Benjo et sa société dans les paradis fiscaux

apr-news/ Le Maire du Plateau, Akossi Benjo a été épinglé par une enquête réalisée dans le cadre du projet « West Africa Leaks ».
Mardi, 24 juillet 2018

Côte d’Ivoire : Akossi Benjo et sa société dans les paradis fiscaux

APRNEWS- Le maire du Plateau, Akossi Benjo a été épinglé par une enquête réalisée dans le cadre du projet « West Africa Leaks ». 

Une enquête minutieusement (plus de 27,5 millions de documents confidentiels ont été exploités) menée par une « toile » de journalistes d’Afrique de l’Ouest en collaboration avec la Consortium international de journalistes d’investigation (ICIJ) et la Cellule Norbert Zongo pour le journalisme d’investigation en Afrique de l’ouest (CENOZO), a révélé que depuis 1997, l’actuel maire du Plateau Noel Akossi Benjo a créé une entreprise dans un paradis fiscale, le Bahamas.

Selon les conclusions de l’enquête qui ont fait l’objet d’un article publié sur le site Cenozo (Investigative reporting in west africa), Akossi Benjo a utilisé une société écran avec l’aide du cabinet d’avocats Mossack Fonseca (Mossfon) pour asseoir son entreprise dès sa nomination à la tête de la Société ivoirienne de raffinage (SIR).

L’entreprise dénommée « Benath Company Limited » est alors domiciliée au siège du cabinet Mossack Fonseca aux Bahamas avec comme directeur, Mark Elliott, résident à Londres. 

M. Benjo, fait nommer un cogérant en la personne de Kouakou Yao Auguste Haccandy, un ivoirien domicilié à Abidjan. 

Selon le site Eburnie Today, le nommé Kouakou Yao, par ailleurs conseiller municipal à la Mairie du Plateau, a soutenu avoir reçu de Mark Elliot, un mandat de représentation en Côte d’Ivoire.

« Je ne suis pas le dirigeant de Benath International. J’ai eu un mandat pour les représenter en Côte d’Ivoire, de rechercher des marchés pour eux », explique le concerné.

Or les documents internes du cabinet indiquent que M. Akossi Benjo est actionnaire à 100%. Pour ne pas laisser de traces, Benjo confie l’entreprise à deux prête-noms. Pour mieux cacher le vrai propriétaire de l’entreprise, les dirigeants délivrent toutes les parts sociales à un intermédiaire de façade, SCP. B Claver. Curieusement, le cogérant Kouakou Yao Auguste Haccandy soutient ne pas connaître SCP B. Claver.

Lorsqu’en 2001, Mark Elliott démissionne, l’ivoirien Serge Mobio intègre la direction de l’entreprise avec 1% des parts sociales. Benjo en détient désormais 99%.

Interrogé en mai 2018 par des journalistes, le maire du Plateau a soutenu ne pas être actionnaire. « Les documents scellés sont chez le notaire aux Bahamas. Je suis administrateur », lit-on sur le site Cenozo.

L’entreprise logée aux Bahamas n’a pas chômé en Côte d’Ivoire

En 1998, elle crée l’entreprise Klenzi avec un capital de 80 millions FCFA.

A en croire Kouakou Yao Auguste Haccandy, les parts sociales de Klenzi distribution étaient détenues par Jean Yoouo Dogo, lui-même avec 9% et Benath Company Limited, actionnaire majoritaire avec 60%. Selon liui, ses parts ont baissé à 1,2% lorsque le capital de la société a été relevé à 774 millions FCFA. 

En 2010, Klenzi crée un Groupement d’intérêt économique  (GIE) avec une entreprise malienne pour l’approvisionnement en carburant de la mine d’or de Tongon au nord de la Côte d’Ivoire.

En 2014, Afriquia, filiale du groupe énergétique marocain Akwa group prend le contrôle de Klenzi Distribution et détient 80% du capital. 

Selon le journal Le Monde, 6,9 millions d’euros (plus de 4,5 milliards FCFA) ont été décaissés pour l’achat d’une quinzaine de stations-service de Klenzi.

Sur la répartition des fruits de la vente de Klenzi, les avis des actionnaires des premiers responsables de Benath  divergent. Alors que M. Haccandy soutient que le notaire a versé les parts de chacun sur son compte, Akossi Benjo affirme le contraire.


 
« La société a été vendue. Rien n’a encore été distribué aux actionnaires. Ça y ait chez Benath. Mais en tant qu’actionnaire, les actionnaires n’ont encore rien reçu. Ce sont des choses qui sont en attente. Pour le moment, rien n’a été redistribué. C’est la société qui a été vendue. Pour le moment, les individus n’ont rien reçu », affirme le maire aux enquêteurs.

Dans les années 2000, l’entreprise de M. Benjo a également investi dans la Société de tuyauterie et de chaudronnerie d’Abidjan (STCA). Confrontée à des difficultés financières durant l’année 2000, cette société a décidé d’augmenter son capital en le portant de 50 millions à 100 millions de francs Cfa afin d’attirer d’autres investisseurs.

Le 4 décembre 2014 à Abidjan, Akossi Benjo prend les commandes de Benath Company après avoir mis au garage Haccandy et Mobio. Il décide en décembre 2014, de constituer une succursale de l’entreprise en Côte d’Ivoire. 

Benath Company a-t-elle fait de l’évasion fiscale ? Le maire est formel : « C’est quoi le problème ? Je n’ai pas besoin de vous expliquer. Vous n’êtes pas propriétaire de la société. Ensuite, vous n’êtes pas l’administration fiscale. Je ne peux pas expliquer aux journalistes le fonctionnement d’une société. Est-ce qu’il y a eu évasion fiscale ? A ce propos, je vous ai dit qu’il n’y a pas d’évasion fiscale. Il n’y a pas de bénéfices qui a été distribué », lâche-t-il aux enquêteurs.

L’ancien patron de Benath Company lui, refuse de répondre aux journalistes. Quant à Jean Yoou Dogo, qui a été le directeur général de Klenzi, il affirme ne pas vouloir parler d’une société qu’il a vendue.

Les impacts de l’évasion fiscale selon Jessica Ebrard de Transparency International, sont énormes pour les économies nationales.

« Les sociétés offshores favorisent les mouvements secrets d’argent  et l’évasion fiscale. Ce qui a des conséquences sur l’économie et les conditions de vie des populations. En permettant la corruption, les entreprises offshores privent des pays en développement de fonds publics nécessaires destinés aux hôpitaux, aux écoles, à l’eau potable et aux routes qui fonctionnent, accentuant ainsi les inégalités économiques ».