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Burkina Faso : Présidentielle, Treize candidats, trois tendances, un fauteuil à occuper

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Mardi, 27 octobre 2020

Burkina Faso : Présidentielle, Treize candidats, trois tendances, un fauteuil à occuper

Le Conseil constitutionnel a donné quitus à treize des quatorze candidats dont les candidatures avaient été validés par la Commission électorale nationale indépendante (CENI). De 23 dossiers de candidature enregistrés par la CENI, quatorze ont pu franchir l’étape de base pour se retrouver donc à l’ultime niveau, à savoir devant le juge constitutionnel.

Là, Harouna Kindo du Mouvement des intellectuels pour le développement (MIDE) a été éjecté pour avoir déposé au Trésor public, un chèque sans provision (pour la caution des 25 millions de F CFA).

Alors que des regards étaient également figés sur le cas Yacouba Isaac Zida, exilé au Canada depuis la fin de la Transition et sur qui pèsent des bobos judiciaires, les recours introduits par Korotimi Rachya Zon contre sa candidature n’ont pas prospéré. Ce sont donc, au finish, treize candidats qui iront à la conquête du fauteuil de Kosyam (palais présidentiel) par le scrutin du 22 novembre 2020, dont la campagne s’ouvre dans quelques jours (31 octobre 2020).

Que retenir de ces treize « Etalons » du 22 novembre ? En attendant de faire focus sur ce que chacun propose comme antidote à la situation du pays et pour sa prospérité, l’on peut dégager trois dynamiques à travers cette liste de treize.

La première tendance (ou catégorie) est tenue par ceux qu’il convient de nommer « vétérans » de la politique et/ou des élections (par la personne même du candidat ou par le parti politique qui la porte). De cette liste, on a le président sortant et candidat à sa propre succession, Roch Kaboré.

S’il est à son deuxième exercice véritable du genre (candidature portée par le Mouvement du peuple pour le progrès, MPP, et alliés), la réalité aussi est que ces dernières décennies, il a fait partie de la machine électorale du pouvoir Compaoré, dont il fut, entre autres, l’un des ministres des Transports et de la Communication, l’un des Premiers ministres, président de l’Assemblée nationale.

De ce fait, c’est en terrain connu sur ce plan qu’il reprendra le bâton de la conquête des suffrages à partir du 31 octobre, en plus de son bilan à défendre auprès du peuple et des populations.

A la même loge, Zéphirin Diabré, le Chef de file de l’opposition politique au Burkina Faso (CFOP-BF), président de l’UPC (Union pour le progrès et le changement).

Tout comme son principal challenger, le président sortant, il a renforcé les côtes auprès de l’ancien pouvoir, dans lequel il fut l’un des ministres des Finances ; ministre de l’Industrie, du Commerce et des Mines, avant de mettre le cap sur l’international où il est nommé en janvier 1999 directeur général adjoint du Programme des Nations-unies pour le développement (PNUD) avant de rejoindre le groupe Areva. Rentré au pays, Zéphirin Diabré revient sur la scène politique avec la création, en 2010, de son parti, l’UPC.

Deuxième à la dernière présidentielle, et ce, après avoir sillonné les 45 provinces et occupé le terrain en tant que responsable du premier parti de l’opposition politique, Zéphirin Diabré abordera, lui aussi, cette campagne avec une dose d’acquis en la matière, malgré les défections enregistrées par son parti ces derniers jours.

Toujours dans cette catégorie, on a l’ancien ministre des Affaires étrangères et ancien conseiller spécial de Blaise Compaoré, Dr Ablassé Ouédraogo. Connu également pour avoir porté le concept de « Diplomatie de développement », Ablassé Ouédraogo s’est aussi fait par son implication dans la résolution de plusieurs crises en Afrique, dont la rébellion touarègue au Niger, la guerre au Libéria, en Guinée-Bissau, au Burundi et la crise entre l’Ethiopie et l’Erythrée.

Il est donc un habitué aussi des sillages internationaux, avec surtout son poste de directeur général adjoint de l’OMC (Organisation mondiale du commerce).

Arrivé sur la scène politique en 2011 avec la création de son parti, Le Faso autrement, sous la bannière duquel il se présente pour la deuxième fois, Ablassé Ouédraogo, organisateur en chef des meetings de l’opposition contre le projet de modification de la Constitution, est, cependant, cette personnalité sur qui plane cette déclaration, en 2015, taxée d’ethniciste et de religieuse. Depuis 2016, il est l’un des principaux défenseurs de la réconciliation nationale.

Même s’il est à sa première candidature, Gilbert Noël Ouédraogo n’est pas un novice de la politique. Outre sa longue expérience sur la scène, il est le candidat d’un des plus vieux partis politiques du Burkina (voire d’Afrique), l’ADF/RDA. Gilbert Noël Ouédraogo fut par moments allié du pouvoir Compaoré, sous lequel il a occupé le ministère des Transports, de l’Economie numérique et des Postes, la vice-présidence de l’Assemblée nationale, etc. Maire de la commune urbaine de Ouahigouya jusqu’à l’insurrection populaire, l’actuel président du Réseau libéral africain a été un des artisans des victoires de Blaise Compaoré à des présidentielles.

S’appuyant donc sur ce « riche » parcours politique, malgré sa « jeunesse », Gilbert Noël Ouédraogo, qui n’a pas pu prendre part à la présidentielle de 2015 pour cause de l’application de la « loi d’exclusion », se présente comme le candidat de la transition entre la vieille génération et la nouvelle génération.

Eddie Komboïgo partage des caractéristiques avec le « champion de l’éléphant ». Candidat de l’ex-parti au pouvoir, le CDP, l’homme d’affaires s’est révélé au milieu politique à travers les législatives de décembre 2012. Aux côtés du député et femme politique Fatou Diendéré, M. Komboïgo avait été élu sur la liste du Passoré.

Après un moment de traversée du désert avec l’insurrection populaire et le putsch de septembre 2015, il réussit à franchir des obstacles, à l’externe et à l’interne de son propre parti, pour se positionner candidat du CDP à la conquête de la présidence du Faso.

Avec un parti et des « camarades » qui ont également un vécu du terrain électoral, Eddie Komboïgo, recalé en 2015 pour « avoir soutenu » le projet de modification de la Constitution, se présente comme le candidat d’un parti politique qui a tiré leçon de la gestion du pouvoir, qu’il a perdu en fin octobre 2014.

Positionnement présidentielle

C’est dans cette catégorie, que l’on peut volontiers classer l’ancien président de la Commission de la CEDEAO, Kadré Désiré Ouédraogo. Il est porté par un mouvement politique, Agir ensemble pour le Burkina Faso, qui est certes nouveau (septembre 2019), mais a l’avantage d’être dirigé par des dissidents et cadres du CDP (dont d’anciens ministres, élus…).

L’homme politique se veut également, par son discours, un conciliateur, qui ne se déchaîne pas sur les insuffisances du pouvoir. Après avoir été vainement « attendu » en 2015 comme candidat du CDP, Kadré Désiré Ouédraogo, qui n’était pas non plus connu sur le terrain politique national, va vivre son premier contact réel avec l’électoral.

La deuxième tendance à cette élection est celle qui se veut intermédiaire. Cette écurie est tenue par cet ex-numéro 2 du RSP (Régiment de sécurité présidentielle, dissout en 2015), devenu, par la force Yacouba Isaac Zida, des choses, président du Faso puis Premier ministre en 2014 et 2015.

Un des ex-proches collaborateurs de Blaise Compaoré, Yacouba Isaac Zida, qui vit en exil au Canada depuis la fin de la Transition, est perçu par une frange de Burkinabè comme l’homme de la solution que traverse le pays, notamment l’insécurité.

Soutenu par un parti politique nouvellement lancé, donc première expérience électorale, le Mouvement patriotique pour le salut (MPS), Yacouba Isaac Zida converge cependant la sympathie de cadres de partis politiques classiques burkinabè ayant fait l’expérience du terrain des suffrages.

Ici, on loge Tahirou Barry, arrivé en 3e position (sur quatorze candidats) en 2015. Après avoir affûté ses armes politiques au PAREN, dont il fut le président et le candidat à la dernière présidentielle, Tahirou Barry a occupé le ministère de la Culture, des Arts et du Tourisme, avant de démissionner en octobre 2017 pour dénoncer la « mauvaise direction » du pouvoir Roch Kaboré.

Le terrain de la conquête des voix ne lui est donc pas nouveau ; ce, d’autant que le parti qui porte sa candidature en cette élection du 22 novembre 2020, le Mouvement pour le changement et la renaissance (MCR), bien que créé en 2018, est aussi composé de militants et responsables qui ont un background politique pour avoir milité et occupé des responsabilités au sein d’autres partis.

La troisième grande tendance se constitue de candidats qui se positionnent comme ceux de la rupture. Certains semblent « avoir été poussés » par le déroulement de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 et/ou la gestion du pouvoir après cette parenthèse politique qui voudrait que « plus rien ne soit comme avant ». Bien que nouveaux-venus, ils ont relevé le défi de remplir la condition de parrainage, alors qu’ils n’ont aucun élu.

Dans ce chapeau, on a l’ancien journaliste à la télévision nationale du Burkina, Do Pascal Sessouma. « Révolté » par les attitudes lors de l’insurrection populaire (notamment l’incendie de domiciles d’adversaires politiques) et la dévolution du pouvoir sous la Transition, Do Pascal Sessouma pense que la vie politique mérite mieux que certaines considérations haineuses, personnelles, identitaires et claniques.

L’universitaire et constitutionnaliste, Pr Abdoulaye Soma du Mouvement politique « Soleil d’avenir » créé en décembre 2019, s’inscrit dans cette logique de rupture. Ancien conseiller spécial du président du Faso Yacouba Isaac Zida, puis du Premier ministre Yacouba Isaac Zida, ex-directeur de cabinet du Médiateur du Faso, Abdoulaye Soma découvre véritablement la vie politique avec la plupart des membres de son parti politique. Il se présente comme celui-là qui est à mesure de concilier les acteurs de la vieille classe politique qui, de son avis, n’ont plus rien à donner à son pays, le Burkina.

D’ailleurs, il pense que le problème du Burkina, ce sont les problèmes de personnes qui rythment l’élan de la vieille classe politique.

Transfuge de l’UNIR/PS, Me Ambroise Farama semble s’inscrire également dans un tempo qui va œuvrer à « ramener la sérénité » entre Burkinabè par une gouvernance vertueuse. S’il est élu à cette échéance, il entend être un président du Faso susceptible de se mettre au-dessus de la mêlée pour travailler à la cohésion sociale et à l’unité nationale.

Candidat de l’Organisation des peuples africains-Burkina Faso (OPA-BF) qu’il a créé en février 2018 avec des camarades politiques, l’avocat bénéficie également du soutien de militants ayant une certaine expérience sur le terrain électoral pour avoir préalablement évolué au sein d’autres partis politiques (dernièrement, en fin septembre 2020, son organisation a enregistré l’adhésion d’un député d’un parti politique).

Seule femme à la conquête de Kosyam en 2020 (contre deux en 2015), Yéli Monique Kam propose comme solution à la situation du Burkina, l’éducation. C’est autour de ce volet qu’elle semble d’ailleurs bâtir son programme. Candidate du Mouvement pour la renaissance du Burkina (MRB, créé en 2019), Yéli Monique Kam laisse paraître que le sentiment et la fibre de mère est un élément susceptible de peser pour une gestion adéquate du pouvoir au profit de toute la société.

Cependant, elle avoue ne considérer le genre ni comme un avantage, ni comme une insuffisance dans la course pour Kosyam.

Seul indépendant à cette échéance, Dr Claude Aimé Tassembédo était jusque-là inconnu du grand public. Universitaire, titulaire d’un doctorat en Sciences de gestion, Dr Tassembédo dit refuser la démission face aux « détournements, à la corruption et aux conflits sociaux ». D’où « La révolution politique en marche » comme canne à cette compétition pour Kosyam.

C’est parmi ces treize personnes que devra sortir, le 22 novembre 2020, le prochain président du Faso, sur qui pèsent d’ores et déjà, de fortes attentes de la part des Burkinabè de l’intérieur, de la diaspora et des populations burkinabè.

Lefaso.net