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APRNEWS: Une maladie évitable et coûteuse

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Les objectifs, pourtant réalistes, d’éradication du paludisme à horizon 2030 ne seront sans doute pas atteints. Le combat reste indispensable, pour sauver des vies bien sûr, mais aussi du point de vue économique.

 

Le paludisme reste une grave menace pour la santé humaine, en particulier en Afrique subsaharienne où se concentre la charge de morbidité. Des millions de vies sont menacées par cette maladie évitable, et la plupart des 600 000 décès annuels concernent des enfants de moins de cinq ans. Tel est le terrible rappel d’une courte étude de l’Oxford Economics Africa (OEA), rédigée avec les ONG Malaria No More UK et RBM Partnership To End Malaria.

« Il est temps de donner la priorité aux dividendes que l’élimination du paludisme peut apporter et d’ouvrir la voie à un avenir plus sain et plus sûr. »

Certes, de grands progrès ont été réalisés en vingt ans : le taux de mortalité mondial lié au paludisme a été divisé par deux entre 2000 et 2015 et l’incidence des cas a chuté de 26 % ; pour autant « la lutte est loin d’être terminée ». Depuis la seconde moitié des années 2010, les progrès globaux au niveau mondial se sont interrompus. Une combinaison de facteurs, notamment les effets perturbateurs du changement climatique et des conflits sur la programmation de la lutte contre le paludisme, la résistance croissante aux médicaments et aux insecticides, et l’impact persistant sur les économies des effets de la pandémie de Covid-19, ont tous contribué à créer une « tempête parfaite » de conditions qui freinent les progrès.

En conséquence, les progrès nécessaires pour atteindre la cible de l’ODD (Objectif de développement durable) sur le paludisme, qui exige une réduction de 90 % de l’incidence des cas et des taux de mortalité d’ici à 2030, sont désormais « hors de portée ».

Ce terrible constat posé, l’analyse de l’OEA montre que l’investissement dans les programmes de contrôle et d’élimination du paludisme ne permet pas seulement de sauver des vies, « mais qu’il est aussi économiquement judicieux pour les pays endémiques et leurs partenaires internationaux ».

Ce rapport montre que la réalisation de l’ODD pourrait considérablement augmenter le PIB des pays où le paludisme est endémique, de 142,7 milliards de dollars sur la période 2023 – 2030 analysée. Cela aura également des retombées mondiales en augmentant le commerce international de 80,7 milliards $ au cours de la même période, y compris des retombées commerciales directes pour les pays du G7 de 3,9 milliards $ en exportations supplémentaires.

« Cela souligne les avantages économiques de l’éradication du paludisme, non seulement pour les pays endémiques touchés, mais aussi pour l’ensemble de l’économie mondiale. »

Par exemple, le Nigeria, en tête des pays les plus touchés par le paludisme, pourrait voir son PIB augmenter de 34 milliards $ d’ici à 2030, s’il parvient à atteindre les objectifs fixés par l’OMS.

De plus, « le déploiement réussi des vaccins antipaludiques pourrait nous rapprocher de l’échéance de 2030 », jugent les auteurs. Qui préviennent que ces vaccins doivent être déployés en étroite coordination avec d’autres mesures de lutte contre le paludisme afin de maximiser leur impact et de sauver le plus grand nombre de vies possible.

Cet objectif ne pourra être atteint que si deux organisations multilatérales de santé mondiale, le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme et la Gavi, l’Alliance du vaccin, sont entièrement reconstituées financièrement d’ici à la fin de l’année prochaine. Ces deux structures sont indispensables aux efforts de lutte contre le paludisme et d’élimination de cette maladie au cours des années qui restent à courir jusqu’en 2030.

« Les 18 prochains mois offrent une occasion en or de réorienter les efforts vers la réalisation de l’objectif mondial de lutte contre le paludisme d’ici à 2030 », insistent les ONG. Avec le renforcement de la mobilisation des ressources nationales engagé par les ministres à Yaoundé, en mars 2024, un engagement renouvelé des gouvernements du G7 et d’autres donateurs en faveur du Fonds mondial et de la reconstitution des ressources de Gavi, et la poursuite des investissements et du soutien à la recherche et au développement sur le paludisme, « il est possible non seulement de sauver la vie de millions de personnes, mais aussi de renforcer la résilience du monde face aux futures pandémies et de stimuler la croissance économique ». Et les ONG de lancer un appel : « Il est temps de donner la priorité aux dividendes que l’élimination du paludisme peut apporter et d’ouvrir la voie à un avenir plus sain et plus sûr. »

Tous les donateurs, et en particulier les gouvernements du G7, devraient s’engager à financer intégralement le Fonds mondial et Gavi lors de leur prochaine reconstitution en 2024 – 2025, en soutenant et en renforçant les investissements réalisés par les pays endémiques eux-mêmes. « Ces organisations jouent un rôle indispensable dans la lutte contre le paludisme, et leur travail doit être pleinement soutenu pour garantir que des efforts efficaces de lutte contre le paludisme et de vaccination atteignent ceux qui en ont le plus besoin », insiste l’étude.

Dans la suite de la déclaration de Yaoundé, conclut-elle, les pays où le paludisme est endémique, soutenus par les donateurs et les partenaires mondiaux, doivent veiller à ce que la mobilisation des ressources nationales et la volonté politique nécessaires pour faire reculer le paludisme soient prioritaires.