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APRNEWS: Khady Evelyne Denise Ndiaye « Cette directive va renforcer les droits des consommateurs dans l'UEMOA »

APRNEWS - Khady Evelyne Denise Ndiaye « Cette directive va renforcer les droits des consommateurs dans l'UEMOA »
Lundi, 10 juin 2024

APRNEWS: Khady Evelyne Denise Ndiaye « Cette directive va renforcer les droits des consommateurs dans l'UEMOA »

APRNEWS - Le Conseil des Ministres statutaire de l’UEMOA, réuni le 16 juin 2023 à Niamey a adopté la Directive N°05/2023/CM/UEMOA relative à la Protection du Consommateur dans l’UEMOA. Cette Directive vise à mettre en place un cadre juridique et réglementaire harmonisé de la protection du consommateur dans les Etats membres en vue de contribuer au renforcement du marché commun.

APRNEWS - Dans cette interview accordée à l’Agence ECOFIN, Khady Evelyne Denise NDIAYE, Directrice du Secteur Privé à la Commission de l’UEMOA donne plus de détail sur ce texte communautaire et sa mise en application par les Etats membres de l’UEMOA.

Agence Ecofin : L’adoption de cette Directive signifie-t-elle qu’à l’heure actuelle le consommateur n’est pas suffisamment protégé au sein de l’espace communautaire ?

Khady Evelyne Denise Ndiaye : L'adoption de la Directive relative à la protection du consommateur dans l'Union Économique et Monétaire Ouest Africaine ne signifie pas nécessairement que les consommateurs ne sont pas suffisamment protégés actuellement. Cette directive vise principalement à renforcer les droits des consommateurs dans les pays membres de l'UEMOA et à harmoniser les réglementations pour garantir une meilleure protection à travers la région.

En effet, elle fait suite à une réunion de concertation des structures en charge du consumérisme dans les Etats membres en juin 2018 qui a débouché sur l’organisation d’un atelier de formation en consumérisme en décembre 2018 et le lancement d’une étude de l’état des lieux de la protection du consommateur dans l’UEMOA en 2019 qui a révélé des insuffisances dans les dispositifs nationaux de protection du consommateur. 

Ainsi, la mise en place de cette directive peut être vue comme une étape pour améliorer encore davantage les protections existantes ou pour résoudre des lacunes spécifiques dans la réglementation actuelle. Elle vise à harmoniser les lois sur la protection des consommateurs au sein de l'UEMOA pour assurer une application cohérente et efficace des droits des consommateurs dans tous les États membres.

L'adoption de cette directive reflète un engagement à renforcer les droits et les protections des consommateurs dans la région, plutôt qu'un signe absolu que les consommateurs étaient complètement dépourvus de protection auparavant. 

AE : Vous avez évoqué des insuffisances qui ont été révélées, pouvez-vous nous en citer quelques-unes ?

KEDN : Parmi les insuffisances mises en exergues par l’étude, on peut citer principalement :

  •     les règlementations sont soit inexistantes, inadaptées, ou disparates ;
  •    les Institutions sont inexistantes ou non dédiées avec des compétences non définies, des relations entre elles non coordonnées, des relations difficiles avec les consommateurs et la lourdeur dans la résolution des litiges ;
  •    les consommateurs manquent d’information et d’éducation de consommation, l’existence d’une pléthore d’organisations de consommateurs, le manque de coordination dans leurs actions et le manque de protection des représentants des consommateurs ;
  •     les Normes ne sont pas appliquées par les professionnels dans les transactions ;
  •     les Ressources Humaines pas suffisamment qualifiées et insuffisantes.

AE : Qu’est-ce que cette Directive va apporter de plus, lorsque nous savons que chaque Etat membre dispose de sa propre législation ?

KEDN : Elle apporte plusieurs améliorations et avantages significatifs, malgré les différences existantes dans la législation nationale de chaque Etat membre et basé sur les principes directeurs de la CNUCED.

Elle permet d’harmoniser les réglementations relatives à la protection des consommateurs dans les huit États membres de l'UEMOA, ce qui garantit une certaine uniformité dans les droits et les protections accordés aux consommateurs, simplifie le cadre réglementaire et permet une application plus cohérente des règles de protection des consommateurs dans la région.

Elle permet également d’établir des normes minimales pour la protection des consommateurs dans des domaines tels que les contrats de vente, les pratiques commerciales déloyales, la publicité trompeuse, la sécurité des produits, etc. ce qui favorise la garantie d’un niveau de protection plus élevé pour tous les consommateurs de l'UEMOA, indépendamment du pays dans lequel ils résident.

Par ailleurs, la directive facilite la coopération entre les Etats membres de l'UEMOA en matière de protection des consommateurs en vue de favoriser les échanges d'informations, les bonnes pratiques et les mécanismes de résolution des litiges transfrontaliers, offrant ainsi une meilleure protection aux consommateurs qui achètent des biens ou des services dans différents pays de la région.

Enfin, la directive encourage le renforcement des institutions chargées de la protection des consommateurs au niveau national. Cela peut inclure le développement de capacités, l'amélioration des mécanismes de contrôle et de surveillance, ainsi que des campagnes de sensibilisation pour informer les consommateurs de leurs droits.

AE : La finalité de cette directive c’est le renforcement du marché commun, comment cela va se traduire au niveau sous régional ? 

KEDN : En renforçant la protection des consommateurs à travers une harmonisation des normes et des réglementations, la directive vise à créer un environnement commercial plus transparent et prévisible au sein de l'UEMOA. Cela devrait favoriser la confiance des consommateurs dans le marché commun et encourager les échanges commerciaux transfrontaliers.

Par ailleurs, en établissant des normes communes en matière de protection des consommateurs, la directive va faciliter les échanges de biens et de services entre les États membres de l'UEMOA. Les entreprises seront en mesure de mieux comprendre et de s'adapter aux règles applicables dans toute la région, ce qui réduira les obstacles au commerce et encouragera une plus grande intégration économique.

Aussi, une protection accrue des consommateurs grâce à des règles harmonisées renforcer la confiance des consommateurs dans le marché commun. Les consommateurs seront plus susceptibles de faire des achats transfrontaliers s'ils ont la certitude que leurs droits sont protégés de manière équitable et cohérente dans tous les pays membres.

Enfin, en élevant les normes de protection des consommateurs, la directive va encourager également les entreprises à améliorer la qualité de leurs produits et services pour répondre aux attentes des consommateurs. Cela stimulera la compétitivité des entreprises au sein de l'UEMOA et contribuera à renforcer l'image du marché commun comme un espace où les normes élevées sont respectées.

AE : Quelles seront les étapes de sa mise en œuvre au niveau des Etats membres

KEDN : Nous avons concomitamment à la Directive, fait adopter un plan d’actions au titre duquel sont prévues des actions de renforcement des capacités, de sensibilisation et de vulgarisation, des actions d’accompagnement dans la transposition de la Directive et le suivi-évaluation de son application.

D’ores et déjà ont démarrés les ateliers nationaux de sensibilisation et de vulgarisation de la Directive dans les états membres de l’UEMOA tels que le Bénin, le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire. Nos équipes poursuivent les ateliers dans tous les autres pays de notre espace communautaire. 

Par ailleurs, conformément aux dispositions de la Directive, nous avons créé par Décision du Président de la Commission un Comité régional de la protection du consommateur ce qui va favoriser la concertation entre les principales parties prenantes sur les questions importantes relatives à la protection du consommateur. Ce Comité aura donc un rôle consultatif. Les courriers aux états membres et particulièrement des départements ministériels en charge de la question ont été envoyés en vue de la désignation de leurs représentants dans ce Comité. 

Enfin, des missions de suivi de l’application des textes de l’UEMOA au niveau national seront organisées afin de s’assurer de sa transposition effective dans les législations de nos états membres et au terme du délai de transposition de deux ans, le texte sera introduit dans la revue annuelle des projets, programmes et réformes.

Ecofin