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Violences conjugales : toujours plus de plaintes et de signalements

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Vendredi, 11 juin 2021

Violences conjugales : toujours plus de plaintes et de signalements

Depuis janvier, 51 féminicides ont été enregistrés, un chiffre en nette hausse par rapport à 2020, une année singulière en raison de la crise sanitaire.

Féminicides : une victime tous les deux jours et demi en France

Il y a deux ans, Julie Douib, tuée par son ex-compagnon en Corse, devenait un symbole des féminicides. Alors que le procès de Bruno Garcia-Cruciani, qui a reconnu avoir abattu la trentenaire, s'ouvre ce jeudi, la lutte contre les violences conjugales est mise à l'épreuve depuis plus d'un an par la crise sanitaire. En mai 2020, Marlène Schiappa s'alarmait d'une augmentation de 37 % des signalements de violences conjugales pendant le premier confinement. Pourtant, en février dernier, Éric Dupont-Moretti annonçait une baisse de 38 % des féminicides en 2020 par rapport à 2019.

Le ministère de l'Intérieur a en effet décompté 90 féminicides sur l'année écoulée, contre 146 en 2019. Un chiffre qui est toutefois contesté par plusieurs associations et collectifs : le compte Twitter Féminicides par compagnons ou ex en a décompté 10 de plus. Pour 2021, le même compte Twitter recense déjà 51 femmes tuées par leur conjoint ou ex-conjoint. La dernière victime, Karine Le Donge, a été tuée le 8 juin au Mont-Saint-Aignan (Seine-Maritime).

Une vigilance accrue ?

Les auteurs de violences conjugales utilisent le confinement pour continuer  à exercer leur contrôle sur les femmes", déplore la Fédération nationale  Solidarité Femmes

« Les périodes de confinement ont exacerbé les violences », affirme Françoise Brié, directrice générale de la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF), qui a pu constater une explosion des appels au numéro d'urgence Violences femmes info, le 3919. « Des femmes se retrouvaient acculées au domicile sans pouvoir sortir, n'avaient plus de vie sociale ou d'activité professionnelle extérieure », raconte-t-elle.

Concernant les féminicides, Françoise Brié évoque cependant une « vigilance accrue ». En effet, face à cette situation exceptionnelle, des lignes directes ont été mises en place entre les associations et les forces de police et de gendarmerie, afin de prévenir les situations potentiellement dangereuses. « On a aussi eu beaucoup plus d'appels de voisins et de proches inquiets », ajoute-t-elle. Enfin, « il y a eu beaucoup moins de séparations pendant les périodes confinées, et on sait que ce sont les phases les plus dangereuses. »131 000 actes de violences intrafamiliales en 2020

Le ministère de l'Intérieur n'a pas encore communiqué les chiffres des violences conjugales pour 2020 et 2021. En revanche, la police et la gendarmerie ont enregistré 131 200 actes de violences intrafamiliales en 2020, soit 11 400 de plus qu'en 2019. Ce chiffre comptabilise les coups et blessures subis dans la sphère familiale par les individus de 15 ans et plus. Pendant le premier confinement, alors que toutes les autres formes de délinquances enregistraient des chiffres plus bas qu'un an plus tôt, les chiffres des violences intrafamiliales, eux, augmentaient. Lors du deuxième confinement, les violences sexuelles, dans et hors de la sphère familiale, sont à leur tour passées au-dessus des chiffres de l'année précédente.

Plus généralement, la police et la gendarmerie enregistrent de plus en plus de violences conjugales ou intrafamiliales depuis 2016. Les chiffres ne permettent pas de conclure à une augmentation de ces violences, mais plutôt à une levée des tabous. Le numéro d'urgence Violences femmes info, créé en 1992 par la FNSF, a reçu un nombre croissant d'appels à la suite du mouvement #MeToo, lancé en 2017, qui dénonçait en particulier les violences sexuelles et sexistes. Les violences intrafamiliales enregistrées par la police et la gendarmerie.

Les violences conjugales enregistrées par la police et la gendarmerie.

Coups et blessures sur des personnes de 15 ans et plus. Les violences sexuelles ne sont pas comptabilisées.

« Il reste encore une marge de progression pour que toutes les plaintes soient prises en compte », affirme la directrice générale de Solidarité femmes, tout en reconnaissant une amélioration depuis le Grenelle des violences conjugales de 2019. « Les femmes arrivent parfois le week-end, la nuit, et leurs plaintes sont prises par des agents qui ne sont pas formés pour gérer des situations aussi complexes et sensibles. Elles déposent des plaintes pour des choses qui peuvent sembler mineures, mais qui, mises bout à bout, témoignent d'une violence qui va crescendo. Dans l'affaire Julie Douib, c'est très visible : on voit qu'elle a déposé plusieurs plaintes. »

Aprnews avec Lepoint.fr