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Pulchérie Gbalet : "...si le Gouvernement veut sévir, qu'il aille jusqu'au bout..."

Pulchérie Gbalet - Bilan - Côte d'Ivoire
Vendredi, 31 décembre 2021

Pulchérie Gbalet : "...si le Gouvernement veut sévir, qu'il aille jusqu'au bout..."

En cette période de fin d'année, la présidente d'Alternative citoyenne ivoirienne (ACI) a dressé lors d'une conférence, le Bilan des activités de l'année 2021.

Chers amis de la presse,

Mesdames et Messieurs,

Nous sommes à la fin de l'année 2021. Il est donc opportun de dresser un bilan de l'année afin de dégager les perspectives et mieux orienter la lutte sociale.

Depuis juin 2021, nous avons abordé les sept (7) questions principales suivantes :

- La situation des droits de l'homme

- La cherté de la vie

- La situation de l'école ivoirienne

- L'insalubrité

- La réconciliation

- Le RGPH 2021 et

- La validité de la CNI.

Où en sommes-nous sur toutes ces questions?

1. La situation des droits de l'homme

La situation des droits de l'homme est toujours préoccupante parce que les violations sont nombreuses, depuis les prisonniers politiques jusqu'aux expropriations en passant par les déguerpissements abusifs et les entraves à la liberté d'expression.

En effet, bien qu'au cours de l'année 2021 plusieurs prisonniers politiques aient été libérés, il en reste encore en prison, malgré la promesse faite de les libérer lors du dernier dialogue politique, avant les législatives. Koua Smith et plusieurs autres dont neuf (9) de la COCSU sont encore en détention. Nous pensons qu'on devrait les libérer comme tous ceux qui ont été libérés et à qui il était reproché les mêmes faits. C'est l'occasion d'interpeller le procureur de la République sur sa dernière sortie qui n'est pas en faveur de la réconciliation que nous peinons à rendre réalité. Non seulement la désobéissance civile est la conséquence de la décision du Chef de l'Etat de briguer un troisième mandat anticonstitutionnel donc il faut commencer par incriminer le Chef de l'Etat lui-même, mais au nom de la réconciliation, il vaut mieux arrêter toutes les poursuites et définir une démarche consensuelle pour aller à la réconciliation. Sinon, il faudra, si le procureur veut être vraiment juste, exiger que les responsables des 3000 morts de la crise post-électorale soient identifiés et jugés, puisque la cour pénale a innocenté le Président Laurent Gbagbo et le Ministre Charles Blé Goudé. Il est important de montrer de la bonne volonté pour aller à la réconciliation. Par ailleurs, on n'a pas vu le procureur réagir sur plusieurs cas dont celui du jeune Hamed Konaté décédé pendant sa garde à vue. En Côte d'Ivoire, les forces de l'ordre constituent très souvent un danger pour les populations et les exemples sont Malheureusement légion.

Toujours par rapports aux droits de l'homme, nous notons:

- Les déguerpissements abusifs en cours : Que ce soit sur des projets formels comme celui du métro d'Abidjan, ou des déguerpissements spontanés, les procédures en la matière ne sont pas respectées et cela précarisent les conditions de vie des populations concernées. Il est donc nécessaire non seulement d'arrêter avec ces abus, mais il est important de désengorger Abidjan en ayant une véritable politique de décentralisation par la poursuite du projet de transfert de la capitale à Yamoussoukro et la création de pôles industriels dans les différentes régions du pays.

- Les nombreuses expropriations perpétrées par les tenants du pouvoir et/ ou leurs proches contre des personnes, des familles ou des communautés sans défense;

- Les abus des polices municipales sur les citoyens; Les entraves à la liberté syndicale et le non-respect des normes de santé sécurité au travail dans plusieurs entreprises et dans les zones industrielles;

- Les entraves à la liberté d'expression dont la dernière preuve fut l'arrestation de 96 docteurs avant même qu'ils ne puissent manifester.

Le fait que la Côte d'Ivoire n'aie pas été invitée au sommet sur la démocratie organisé par le Président des Etats Unis d'Amériques du 08 au 10 décembre 2021, est la preuve que le monde entier sait que nous ne sommes pas dans un état de droit. Nous exhortons donc toutes les composantes de la société ivoirienne à s'impliquer dans le combat pour la démocratie et la justice, afin de garantir la paix.

2. La cherté de la vie

Relativement à la cherté de la vie, Nous tenons à rappeler que ACI est engagée dans une dynamique constructive en cherchant à comprendre tous les tenants et aboutissants du problème avant de faire des propositions concrètes plus efficaces, bien que nous ayons fait des premières propositions au début de ce combat contre la vie chère. C'est un problème interministériel assez complexe, mais l'état devrait être conséquent avec lui-même en commençant par briser les monopôles. Comment dans un état dit libéral peut-on observer des situations de monopoles sur le riz ou les pompes funèbres qui constituent pourtant de grandes dépenses pour les populations? Le monopole de la CIE et la SODECI est également une source d'oppression générale. La libre concurrence allègerait les charges des consommateurs que nous sommes. Merci beaucoup à Wave grâce à qui les frais de transfert d'argent par mobile money ont considérablement baissé. Pour nous les consommateurs, c'est l'entreprise de l'année !

Nous avions, au titre du gaspillage des ressources de l'Etat, dénoncé l'existence d'institutions budgétivores comme le Sénat, lorsque le 18 juin 2021, le Chef de l'état a procédé à la signature d'un nouveau décret portant nomination de 12 nouveaux ministres Gouverneurs. Portant leur nombre à 14 ministres Gouverneurs et le total de Ministres à 51.

En plus des collectivités décentralisées que sont les Conseils Régionaux, nous avons affaire à des Conseils Régionaux bis qui non seulement alourdissent le fonctionnement de l'administration mais également augmentent inutilement les charges de l'état. Cette nouvelle situation n'est indéniablement pas en adéquation avec les besoins du peuple de Côte-d'Ivoire. Le peuple a besoin d'eau potable, d'emplois, d'un système de santé performant, d'infrastructures éducatives et de sécurité.

3. La situation de l'école ivoirienne

Les problèmes de l'école ivoirienne sont innombrables car tout le système est gangrené. La solution de l'incivisme des élèves ne se trouve pas dans des punitions militaires car si vous voulez corriger par la force tous les élèves coupables des congés anticipés, vous serez débordés. Arrêtez de déplacer les problèmes et trouvons des solutions définitives. Outre les mesures prises par le Ministre de l'éducation nationale pour relever le niveau des élèves et ramener la compétitivité à l'école, il est nécessaire et urgent non seulement de prendre des mesures pour rétablir l'autorité des enseignants et éducateurs, mais il faut

que des mesures soient prises pour contraindre les fondateurs des établissements privés à payer régulièrement les enseignants. Cela permettra de leur garantir un minimum de stabilité et de dignité, mais aussi l'efficacité dans leur noble mission.

4. L'insalubrité

En ce qui concerne l'insalubrité, malgré la redevance pour les ordures ménagères que nous payons sur les factures, force est de constater que la ville d'Abidjan est toujours sale, de même que plusieurs villes de l'intérieur du pays. Les Maires se plaignent de ne pas disposer de leurs budgets à temps. Il est indiqué de prendre des dispositions pendant que nous entrons en saison sèche pour curer les caniveaux et construire les ouvrages nécessaires au bon drainage des eaux pluviales, afin de prévenir les inondations.

5. La réconciliation

La réconciliation est une exigence pour la Côte-d'Ivoire et malheureusement depuis déjà deux (2) décennies passées, non seulement les conditions ne sont pas encore réunies, mais l'actualité ne nous rassurent pas sur la volonté du pouvoir en place à aller à la réconciliation.

Comment comprendre que pendant que nous réclamons la libération des prisonniers politiques, le procureur de la République annonce de nouvelles arrestations dans l'opposition ?

Avec le retour du Président Laurent Gbagbo, nous avons espéré en vain que les prisonniers civils et militaires de la crise de 2010 soient eux aussi libérés. Nous attendons impatiemment l'adresse du Chef de l'Etat pour le nouvel an.

Nous espérons que 2022 sera l'année du retour du Ministre Charles Blé Goudé à qui on refuse un simple passeport. Il est difficile de comprendre qu'une pièce qui est délivrée en trois (3) jours ici peut mettre autant de temps pour être mise à disposition.

Comment comprendre que le Président Soro Guillaume qui est aussi un acteur majeur pour la réconciliation soit condamné par contumace à perpétuité, contrairement à l'arrêt de la cour africaine des droits de l'homme et des peuples, et maintenu en exil alors que notre constitution l'interdit ?

Nous devons reconnaître que des efforts ont été faits par le Président de la République, la preuve un ministère de la réconciliation a été créé et le Président Laurent Gbagbo ainsi que plusieurs exilés sont rentrés. Certains ont même été réintégrés à la fonction publique, mais beaucoup reste à faire. Le Chef de l'Etat devrait faire en sorte de réunir toutes les conditions de la réconciliation et nous sommes là pour attirer son attention sur ce qui reste à faire.

Nous avons lancé le 18 novembre 2021 un programme inclusif pour la réconciliation nationale. Nous commencerons la mise en œuvre de ce programme dès le mois de janvier 2022 et nous espérons que chacun nous aidera à apporter une contribution significative à la réconciliation nationale.

Le dialogue politique constitue un bon cadre de décrispation et d'échanges. autour de toutes les questions politiques et sociales importantes. Malheureusement, celui qui a été engagé le 16 décembre 2021 n'est pas inclusif.

En effet, non seulement des formations politiques comme le COJEP et des acteurs politiques comme les partisans du Président Guillaume Kigbafori Soro n'ont pas été invités, mais au niveau de la société civile, des organisations faisant leurs preuves sur le terrain n'ont pas non plus été associées, telles que l'OIDH, Aube nouvelle et ACI.

Cela ne nous empêche pas pour autant d'y contribuer par nos critiques et propositions. Ainsi, le lundi 27 décembre, nous avons écrit au Premier Ministre avec ampliation aux chancelleries, aux principaux partis politiques et à certaines organisations de la société civile pour faire nos propositions qui portent sur trois (3) points:

✓ Le premier point porte sur un préalable qui concerne la nécessité de faire un bilan des dialogues précédents pour en tirer les leçons et faire le point des acquis non réalisés. Cela permettra de mieux définir le prochain dialogue;

✓ Le second point porte sur les sujets à débattre à priori. Nous proposons la libération de tous les prisonniers politiques civils et militaires, le retour de tous les exilés y compris le Ministre Charles Blé Goudé et le Président Soro Guillaume, l'assainissement de l'environnement électoral (cadre législatif; institutionnel et opérationnel), l'organisation d'un dialogue national inclusif, la prorogation du RGPH 2021, la prorogation de la validité de l'ancienne CNI, les déguerpissements abusifs qui sont source de conflits et de pauvreté ;

✓ Le troisième point est relatif à la méthodologie à adopter pour conduire ce dialogue. Nous proposons l'actualisation de la liste des participants pour rendre le dialogue inclusif et la conduite du dialogue sans séparer les politiques de la société civile pour rendre le dialogue plus constructif et obtenir des résultats plus rapide car cela va éviter la nécessité d'une mise en commun après avoir discuté avec les différentes parties. Enfin nous proposons l'élaboration de termes de référence véritablement consensuels dans leur intégralité jusqu'à la version finale.

6- Le RGPH 2021

Malgré les chiffres annoncés par le ministère du plan, le fait est que les agents recenseurs ont connu beaucoup de difficultés par insuffisance de moyens, et par conséquent, plusieurs se plaignent de n'avoir pas été recensés. Nous insistons donc sur la nécessité de proroger ce recensement car c'est un important outil d'aide à la décision et c'est sur la base de ces résultats que le découpage électoral sera actualisé.

7. La validité de la CNI.

Sur la base des derniers chiffres obtenus, le taux d'enrôlement était de autour de 27 pour cent en novembre 2021. Nous avions demandé une prorogation lors de notre dernière conférence le 16 novembre 2021 et hier une prorogation de trois (3) mois a été accordée. C'est une très bonne chose parce que cela s'impose. vu les chiffres, mais non seulement 3 mois c'est insuffisant, mais il faut une campagne de sensibilisation et multiplier les sites d'enrôlement en les rapprochant des populations. Par ailleurs, de même que les agents sont allés dans les villages pour enrôler les populations rurales, de même il faut que la distribution des cartes se fasse dans les villages. Tout le monde ne dispose pas d'un portable au village et ce n'est pas évident de se déplacer pour le retrait en ville.

PERSPECTIVES

Outre ces sept (7) points abordés au cours de l'année 2021 qui n'ont pas connu d'évolution notable, nous tenons à relever trois (3) phénomènes majeurs qui marquent cette fin d'année. Il s'agit de la vague de licenciements des DG des sociétés d'Etat, des expropriations abusives et de la menace épidémique de grippe.

En ce qui concerne les délits de détournement des DG de certaines entreprises, le Gouvernement se doit d'être plus rigoureux. Notre société est déjà tellement gangrénée par la corruption que si le Gouvernement veut sévir, qu'il aille jusqu'au bout des procédures. A ce jour aucun DG débarqué n'a été arrêté et nous n'avons aucune information sur les procédures en cours. Si le peuple a été mis au courant de ces faits, il est en droit d'exiger des explications parce qu'il s'agit de deniers publics. Nous prions donc le Gouvernement de mener les enquêtes jusqu'au bout et de nous informer au fur et à mesure.

Pour ce qui est des expropriations abusives, plusieurs cas de personnes physiques, de familles ou de communautés expropriées ont été portées à notre connaissance. Ce sont pour la plupart de cas d'abus des tenants du pouvoir et / ou de leurs proches.

Enfin, depuis un certain temps, une vague de grippe dite saisonnière a envahi Abidjan, faisant des victimes au sein de quasiment toutes les familles. Les symptômes s'apparentent à ceux de la COVID. D'après un article du sociologue français Michel Galy, publié par Mondafrique, « l'Institut Pasteur d'Abidjan vient de confirmer que la « grippe qui explose ces jours-ci à Abidjan est due à la 4ème vague de COVID19 ». Plusieurs personnes dans mon entourage voulaient faire le test mais elles ont été freinées par les quotas appliqués dans les centres de dépistage qui sont en nombre insuffisant. Il faut se lever très tôt pour faire partie du nombre journalier. Les centres de dépistage n'arrivant pas à absorber la demande de test, nous exhortons le ministère de la santé à prendre des mesures pour non seulement renforcer les capacités des centres de santé urbain pour des tests systématiques, mais d'assurer la prise en charge des populations vulnérables.

En termes de perspectives, ACI continuera de lutter pour l'Etat de droit et la réconciliation des fils de ce pays. Nous exhortons tous les ivoiriens et particulièrement les jeunes à s'investir dans l'engagement citoyen et la pratique du civisme à tous les niveaux.

Nous sommes le 31 décembre 2021, BONNE FETE DE LA St Sylvestre. Nous souhaitons à tous et à toutes d'entrer en 2022 sans problème. Que 2022 soit une année de santé, de paix et d'accomplissement pour nous tous.

Que Dieu ramène la paix en Côte d'Ivoire !

Je vous remercie.

La rédaction Aprnews