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APRNEWS - Enquête : Les actionnaires de Antaser Togo à couteaux tirés sur la plate-forme portuaire de Lomé.

Conflits chez Antaser Togo - Enquête
Mercredi, 8 mars 2023

APRNEWS - Enquête : Les actionnaires de Antaser Togo à couteaux tirés sur la plate-forme portuaire de Lomé.

APRNEWS - Antaser Togo fait face, depuis sept ans, à une grave crise opposant ses actionnaires belges et togolais. L’affaire est devant les tribunaux togolais.

APRNEWS - Tout commence en 2015 par un contrat entre Antaser, société belge spécialisée dans la gestion et le traitement des bordereaux électroniques de suivi des cargaisons en collaboration avec les Etat togolais, et un groupe d’hommes d’affaires togolais à travers la création d’une société de droit togolais filiale de la maison mère d’Anser Anvers sur la plate-forme portuaire de Lomé. Décryptage !!!

Au départ de l’affaire, le groupe d’hommes d’affaires togolais, sous la houlette de Mr Akouété Adanbounou, entre en contact avec Mr Servais Codjia, franco-béninois/camerounais et représentant du groupe Antaser en Afrique. Ainsi est créé entre Mr Akouété Adanbounou et Mr Freddy Van Tichelen, par le biais de son collaborateur, Mr Servais Codjia, une relation d’affaire qui aboutit en Juin 2015 à la signature entre Antaser Afrique et l’Etat togolais, de la convention de mandat pour « traitement et émissions des Besc» .Cet accord est consolidé par un arrêté interministériel enregistré sous le numéro 001MEF/MCPSP/MTPT/DC du 08 avril 2015.

En effet, en août 2015, les partenaires belges et togolais procèdent à la création d’une nouvelle société au Togo par l’entremise du notaire Maître Sylvia Adjoa-Aquereburu.

Dans les statuts de la société, dont nous avons reçu une copie, Mr Freddy Van Tichelen est l’actionnaire majoritaire détenteur de 52% de participation au capital de la société fixé à 10 millions de francs cfa. Son représentant à la création de l'entreprise, Mr Servais Codjia désigné directeur général de Antaser Afrique, filiale du Togo, détenait quant à lui, 15% des parts et Mme Tina Tichelen, directrice du groupe Antaser, 14%. Quant aux 19% restant du capital, ils étaient répartis entre les partenaires et associés togolais.

Dans la marche active de la société nouvellement constituée, les choses semblaient bien se passer à la grande satisfaction des différents partenaires qui parviendront à postériori à installer rapidement les infrastructures locales et procèderont dans la foulée au démarrage des activités du Besc sur la plate-forme portuaire de Lomé.  

La nouvelle société créée avait pour missions : « l’assistance au contrôle et à l’existence effective du Besc import sur chaque cargaison entrant au Togo ainsi que la mise en place de l’infrastructure nécessaire au traitement du Besc Export ».

Selon le groupe Antaser basé à Anvers et dirigé par Mme Tina Van Tichelen, représentante légale du président du groupe, son père, Mr Fréddy Van Tichelen estime qu’entre août et décembre 2015, les choses fonctionnaient normalement. Puis surviennent entre janvier et mars 2016, des contestations “inexplicables” selon le groupe Antaser, et “contraires aux intérêts du Togo” quant à l’application des pénalités prévues en cas de non-respect du principe d’exigence de la prise en charge des Besc à l’embarquement.

Ainsi, depuis près de six ans, les deux entités se disputent la mainmise sur le très lucratif marché des bordereaux électroniques de suivi des cargaisons (Besc) au Togo. Une affaire qui génère selon les estimations  5 à 10 millions d'euros par an.

Selon les dirigeants belges d’Antaser, de mars 2016 à ce jour, Mr Freddy Van Tichelen et Mme Tina Van Tichelen, pourtant majoritaires dans la société Antaser, créée au Togo, ont été purement et simplement écartés de la gestion de la société, ce malgré de multiples recours et actions, affirme le représentant du groupe Antaser au Togo. Pour étayer ses propos, ce dernier soutient :  qu’« il est impossible d’avoir des retours d’information sur la société créée localement, à savoir  Antaser Togo. Autant sur le plan fonctionnel que financier ou opérationnel ». 

Les dirigeants du groupe Antaser estiment de ce fait qu'ils sont victimes d’une OPA, d’une usurpation montée de toutes pièces par leurs partenaires togolais qui auraient des soutiens internes puissants. Un argument balayé d’un revers de la main par Mr Akouété Adanbounou, l’actuel dirigeant de la société au Togo, qui qualifie ses partenaires belges de manipulateurs qui ont tenté vainement d’éjecter leurs partenaires locaux de manière abracadabrantesque.

Les points de désaccord qui ont conduit à l’impasse

Selon le récit du représentant du groupe Antaser au Togo, Mr Eric Miens, il ressort qu’au cours de ces sept dernières années , les actionnaires majoritaires ont été simplement et systématiquement écartés de la gestion du mandat dont ils sont pourtant les mandataires légaux de l’Etat togolais. Ce dernier poursuit : « ils ont été systématiquement envoyés de tribunaux en tribunaux pour différentes raisons. Toutes émises dans le simple but de les écarter de toute gestion». Selon les belges leurs partenaires togolais ont commencé une année plus tard après le litige à émettre leurs propres bordereaux en concurrence de ceux délivrés par la maison mère. Moins chers, les bordereaux d'Antaser Togo auraient vite rencontré un succès marqué auprès des clients d'Antaser Afrique, qui estime avoir perdu près de 95 % de son activité dans le pays du fait de ce commerce parallèle.

Eu égard à ce climat délétère qui a engendré la rupture de la confiance entre partenaires belges et togolais, le président du groupe Antaser, Mr Fréddy Van Tichelen, a éffectué des déplacements au Togo en 2020 à la demande, selon nos sources, d’une haute personnalité politique du pays proche de la famille présidentielle togolaise pour une tentative de conciliation à l’amiable. 

Selon les partenaires belges, leurs associés togolais, notamment les « dirigeants » actuels de Antaser Togo (Messieurs Adanbounou, le Pca Emmanuel Tchouco et les autres associés) ont été, selon les propos des dirigeants belges du groupe Antaser, à «la limite du supportable » et cette tentative n'a donc produit aucun résultat probant. 

Mr Arnaud Torris, faisant également parti du groupe Antaser, argue que cette tentative de conciliation initiée par l’honorable député Meh Gnassingbé  a buté aussi sur le fait que leur avocat local avait au cours de cette rencontre pris fait et cause pour leurs adversaires. Ce qui constituait à l’époque un véritable coup de théâtre.Dès lors, Mr Freddy Van Tichelen  et Mme Tina Van Tichelen ainsi que leur représentant à Lomé, Mr Eric Miens, auraient subi une multitude de convocations dans les commissariats et devant les tribunaux du Togo, face notamment au Procureur de la République, avec même dernièrement des mandats d’arrêts signifiés à l'endroit de Mr Freddy Van Tichelen et de Mme Tina Van Tichelen. 

Toutes les actions demandées en justice par Mr et Mme Van Tichelen, argumente Mr Eric Miens, ont débouché sur des décisions d’incompétence des juges saisis, ce malgré les documents fournis.  Mr Eric Miens, représentant de Antaser Afrique, a quant à lui subit, selon le groupe belge, des pressions sous diverses formes : appels téléphoniques anonymes, mise en place d’une filature lors de ses déplacements, surveillance autour de son domicile et convocations multiples dans des commissariats de Lomé.  

Selon la version des managers du groupe Antaser Belgique , il ressort au vu de tout ce qui précède, que Antaser Afrique subit de lourds préjudices moraux et financiers (de même que l’Etat togolais) et qu’il est impossible de voir une résolution du problème localement. Surtout après six ans de procédure. C’est dans cette optique et eu égard à tout ce que nous avons susmentionné ci-haut que la partie Belge a  entrepris une démarche auprès de la Cour d'Arbitrale de l’Hoada basée à Abidjan.

Antaser est un partenaire fiable qui mène sereinement ses activités en Afrique sans problèmes et contentieux majeure , la preuve affirme  Mme Tina Van Tichelen, leur groupe vient de renouveler son contrat au Nigéria et entretien des très bons rapports avec leurs partenaires privés et étatiques dans plusieurs pays africains à l’instar du Sénégal contrairement aux informations infondées véhiculées ici et là.

La version des faits des actionnaires togolais

Pour mieux cerner cette situation rocambolesque, nous avons joint le principal dirigeant de la société Antaser Togo, qui d’emblée, réfute sans aucune forme de procès la version des dirigeants du groupe Antaser qui étaient en affaire avec eux au Togo. Mr Akouété Adanbounou nous fait savoir que leurs partenaires belges, en complicité avec son directeur Afrique de l’époque, Mr Servais Codjia, ont tenu une assemblée générale sans l’accord du Pca local avec comme objectif de « sortir » leurs associés togolais de l’affaire et de la convention qu’ils ont pourtant tous négociés ensemble en son temps. C’est en réaction à cette réunion qualifiée d'irrégulière, nous déclare avec véhémence Mr Adanbounou, que la partie togolaise a saisi la justice pour dénoncer cette assemblée générale convoquée par leurs partenaires belges sans la présence de leurs partenaires togolais et à fortiori celle du Pca local. 

C’est en effet ainsi , devant les juridictions togolaises, la partie belge fut déboutée devant  la juridiction de la ville capitale de Lomé. 

Outre Mr Adanbonou, un autre dirigeant de la société Antaser Togo qui a été contacté par Financial, nous a fait savoir qu’à la création de la société le capital était fixé à 10 millions de francs cfa. Seul Mr Servais Codjia, le directeur de Antaser Afrique, aurait  à l’époque déposé sa prise de participation qui s’élevait à un million de francs cfa. 

Toujours selon ce dernier, Mr et Mme Van Tichelen n’avaient pas fait de dépôt malgré le fait qu'ils affirmaient avoir tout confié à Mr Codjia, leur représentant au Togo.La partie togolaise estimait que c’était une cuisine interne de Antaser et qu'elle n’avait pas en s’en mêler. 

Interrogé sur la question, Mr Arnaud Torris, un des membres de l’équipe managériale du groupe Antaser précise :  "il existe auprès de la notaire les déclarations enregistrées de dépôts de fonds dans le cadre de la constitution du capital". Des documents qu’il n’a pas à sa disposition et qui ont, selon lui, disparu "miraculeusement". 

A ce sujet nous avons tenté de joindre la notaire à l’origine de la constitution de la société. Toutes nos tentatives sont restées vaines. 

Par ailleurs il sied de noter que le directeur technique de Antaser Togo Mr Moctar Sow qui s’est prêté aux questions de Financial au téléphone, nous a signifié que la société, à l’époque de sa création étant à l’étape hybride, a vu Mr Adanbounou couvrir le montant du capital à travers un dépôt de 9 millions de francs cfa. Eu égard au fait que selon lui les partenaires belges n’avaient pas de documents attestant qu'ils avaient effectué un dépôt. C’est ainsi que Mr Adanbounou est devenu l'actionnaire majoritaire. Il soutient par ailleurs que, malgré le différend qui les a opposé fondamentalement, il a personnellement entrepris une démarche de conciliation en vue de faire table rase sur tous les malentendus passés. Il a à cet effet organisé une rencontre à Cotonou avec la partie Antaser Belgique. Cette rencontre avait été sanctionnée par un procès-verbal qui engageait toutes les parties à revenir à une collaboration de confiance. Hélas, selon Mr Adanbounou, leurs partenaires belges, mal conseillés certainement par des togolais proches du système, ont intenté une action en justice contre eux à Lomé. Ils ont par conséquent été débouté de nouveau par la justice.  

 

 

Du côté d’Antaser, on suspecte des mains noires, car selon ses dirigeants, lors d’une procédure judiciaire au tribunal de grande instance de Lomé, la plainte déposée par les dirigeants  Antaser Belgique  avait disparu dans le bureau du greffe. Une déclaration battue en brèche par la partie togolaise qui estime que leurs partenaires belges auraient tenté en vain de les sortir de l’affaire et de la convention avec l’Etat togolais de manière peu commode. Ce que contestent les Belges qui soutiennent avoir été purement et simplement écartés du Togo de façon malicieuse.  

 

  Selon nos sources, malgré les différends qui opposaient les deux parties, la plate-forme était toujours active jusqu'à une date récente. C’est d’ailleurs par ce biais que le partenaire belge avait en son temps été payé pour ses divers prestations à hauteur de un million d'euros environ par le biais de ses associés locaux entre 2017, 2018 et 2019. Ce n’est qu’en octobre 2021, apprend-on, que le groupe Antaser Belgique avait bloqué l’accès de la plate-forme à Antaser Togo en laissant juste l’accès à la douane togolaise pour toutes ses opérations de contrôle des Besc à l’embarquement des cargaisons à destination du Togo. Interrogé sur la question Mr Arnaud Torris indique que c'était pour éviter l’accès direct ainsi que les détournements de leurs clients à travers cette plate-forme. 

 

 

C’est dans ce contexte, nous explique Mr Adanbounou, le directeur de Antaser Togo, qu’ils ont trouvé une autre alternative sur recommandation des institutions internationales qui régulent les opérations de transport maritime créer une nouvelle plate-forme avec une expertise de partenaires israéliens.

Pour Mr Adanbounou l’affaire étant entre les mains de la justice, il faut désormais s'en remettre  à sa décision. Il encourage même ses partenaires belges à saisir n’importe quel tribunal à travers le monde. Il sera prêt à répondre car il a des arguments et des droits à faire valoir devant toutes les juridictions compétentes. Il poursuit en disant que dans un accord interne les deux parties s’étaient partagé les rôles en amont et en aval. Toujours selon lui Antaser Belgique était censé s’occuper des activités à l’embarcation et Antaser Togo gérait les activités locales à l’export.

 

Après avoir fait le tour de la question, nous avons réussi à joindre un des hommes au centre de la création de la relation d’affaire entre les belges et les togolais, à savoir Mr Servais Codjia qui affirme être celui qui a introduit les belges au Togo. Il refuse de s’exprimer longuement sur la question, mais nous fait remarquer qu’il demeure le partenaire le plus lésé dans l’affaire.

Cependant ,affirme-t-il ,qu’ il détient l’acte de naissance de la société qui ne saurait être, selon lui, changé d’une manière ou d’une autre. Il en appelle donc au dialogue entre les différentes parties en vue de préserver les intérêts des uns et des autres, notamment à deux ans de la fin de la convention. Il conseille donc aux différents protagonistes de trouver une solution conciliante car pour lui rien ne semble être perdu.

Au regard de tout ce qui précède, il sied de noter que du côté de certains partenaires belges on estime que l'affaire doit désormais être portée devant la Cour Commune de Justice et  d'Arbitrage de l'Ohada à Abidjan, suite à l’incompétence déclarée de la Cour de Lomé concernant la reconnaissance d’actionnariat. Au sujet de l'affaire de l'actionnariat Mme Tina Van Tichelen dit : « A ce titre, toutes les mutations postérieures devraient être reconnues comme illégales car tout nouvel actionnaire est censé être validé à la majorité courante en assemblée générale ». Par conséquent, selon la partie belge, depuis début 2016, Antaser Togo détourne, « à priori » à son seul profit, l’essentiel de l’activité relative au Besc Togo Import sans fournir les moindres effets utiles ou autres statistiques à leurs partenaires. Des arguments rejetés vigoureusement par la partie togolaise qui brandit et oppose à la partie belge les différentes décisions de justice rendues à leur faveur contre leurs partenaires belges et cela sans effet suspensif. 

Au terme de notre analyse il serait loisible de faire observer que les conflits cognitifs apparaissent dans les interactions sociales au sein du groupe décisionnel ici composé essentiellement du dirigeant et du capital investisseur de manière à favoriser la collaboration productive. Le système de gouvernement a pour mission de réduire les conflits cognitifs et de valeurs. Toutefois, il est à noter que les conflits sociocognitifs ne sont pas nécessairement néfastes, dans la mesure où l’existence de différents schémas cognitifs sont sources d’innovation et que la construction d’idées nouvelles peut précisément émerger de ces différences de vue. Ce ne fut hélas pas, selon nos observations, la volonté manifestée par les associés belges et togolais lors de la création de la filiale Antaser Togo sous la bannière Antaser Afrique. Les mésententes survenues entre les partenaires depuis sept ans n’augurent point d’envisager une quelconque réconciliation. Ce qui laisse la poursuite du feuilleton devant les tribunaux où l’affaire est restée pendante. 

Cette situation sème la confusion au sein de l'administration togolaise. En juin 2022, le ministère de l'économie a ainsi écrit au directeur et aux  actionnaires majoritaires présumés d'Antaser Togo depuis 2020, Akoété Adanbounou, pour lui demander des comptes sur le reversement de la part due à l'Etat togolais issue des ventes réalisées par Antaser Afrique entre 2016-2021.

Somme toute après avoir fait le tour de la question il sied de spécifier que c’est un dossier très sensible avec une implication politique. Au-delà d’un accord entre les parties opposées dans cette affaire de contrôle de la société créée au Togo, notamment sur la délicate question d’actionnariat, les deux parties semblent se resigner à la décision de la justice.

La rédaction Aprnews