Alexeï Navalny est décédé vendredi 16 février 2024, dans la colonie pénitentiaire russe de haute sécurité IK-3. Depuis, le corps de l’opposant numéro 1 du Kremlin est conservé par les enquêteurs russes qui devraient le garder pendant deux semaines. Pourquoi ce délai ? Un légiste et un expert en toxicologie répondent à l'édition du soir.

Heure officielle du décès : 14 h 17. Vendredi 16 février 2024, Alexeï Navalny est mort à IK-3, la colonie pénitentiaire russe de haute sécurité, située au-delà du cercle polaire arctique et dans laquelle il purgeait une peine de 19 ans. Quatre jours après son décès, la dépouille de l’adversaire numéro 1 du Kremlin n’a toujours pas été remise à sa famille. Les enquêteurs russes assurent qu’une expertise chimique est en cours. Elle devrait durer 14 jours.

« C’est le délai normal pour réaliser une autopsie complète et rendre un rapport d’expertise toxicologique et microscopique », assure à l’édition du soir, Philippe Charlier, médecin légiste et professeur à l’université Paris-Saclay. D’abord, les experts analysent l’état du corps pour déterminer si la victime est morte « aidée ou seule », nous explique de son côté Jean-Claude Alvarez, professeur de pharmacologie à l’université Paris-Saclay et expert en toxicologie. Ensuite, les viscères - cerveau, foi, cœur… - sont expertisés pour déterminer s’il s’agit ou non d’une mort naturelle.

Mort après une « promenade »

Officiellement, Alexeï Navalny est décédé des suites d’un arrêt cardiaque survenu après une promenade. Les services pénitentiaires russes relayés par nos confrères de Libération , assurent que « sa santé s’était détériorée depuis des mois ». « Ils mentent, jouent la montre et ne le cachent même pas », rétorque la porte-parole du défunt, Kira larmych sur X . « Ils conservent le corps d’Alexeï pour que s’estompent les effets d’une nouvelle forme du Novitchok », renchérit sa femme, Yulia Navalnaïa, dans des propos relayés par RTL. En août 2020, il avait déjà été victime de ce poison .

« C’est une arme chimique dont seuls les Russes connaissent la composition », fait remarquer Jean-Claude Alvarez. Quelques milligrammes de ce produit suffisent à tuer un homme. Le Novitchok serait même « plus dangereux et plus sophistiqué que le sarin (utilisé par le régime de Bachar al-Assad) ou le VX (responsable de la mort du demi-frère de Kim Jong-un) », assurait dans les colonnes de Ouest- France en 2021  Olivier Lepick, chercheur associé à la Fondation pour la recherche stratégique, spécialiste des armes chimiques.

« On ne retrouvera rien dans ses poumons »

Si Alexeï Navalny a été empoisonné au Novitchok, il sera difficile pour ses proches de le prouver. « Dans le corps, le gaz s’élimine, prévient Jean-Claude Alvarez. Donc si le poison a été administré sous forme de gaz, d’ici deux semaines, on ne retrouvera plus rien dans ses poumons. Si c’est un liquide, ça sera aussi compliqué de trouver des traces. Seuls les Russes connaissent la composition du Novitchok. Ils utilisent des produits difficiles à identifier ».