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Italie : Des migrants hébergés en centre d'accueil jetés à la rue

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Mardi, 11 décembre 2018

Italie : Des migrants hébergés en centre d'accueil jetés à la rue

APRNEWS- Suite à l'adoption d’un décret-loi durcissant l’immigration en Italie, vingt-quatre migrants bénéficiant d’un "titre de séjour humanitaire" ont été expulsés d’un centre d’accueil en Calabre, dans le sud de l’Italie. Ce statut ne permet plus d'accéder à un centre d'hébergement. Les associations s'alarment et cherchent des solutions d’urgence.

En Calabre, dans le sud de l'Italie, le décret anti-immigration de Matteo Salvini, adopté le 28 novembre, a été rapidement appliqué. Deux jours après, 24 migrants ont été expulsés de leur centre d’accueil (CARA d'Isola Capo Rizzuto) à la demande de la préfecture de Crotone, en Italie du sud. Ils ne bénéficiaient plus d’un droit au logement conformément au décret-loi. Pourquoi ? Parce que, selon la nouvelle loi, leur "titre de séjour humanitaire" n’existe plus et ne leur donne plus accès à un toit.

Le décret du Premier ministre italien supprime en effet le "titre de séjour humanitaire", valable deux ans. Il est désormais remplacé par d'autres permis comme celui de "protection spéciale", d'une durée d'un an, ou "catastrophe naturelle dans le pays d'origine", d'une durée de six mois.

La protection humanitaire était généralement accordée aux personnes qui n'étaient pas éligibles au statut de réfugié mais qui ne pouvaient pas être renvoyées chez elles pour des raisons de sécurité - cela concernait par exemple les homosexuels fuyant des pays aux lois répressives à l'encontre de leur communauté. Au total en 2017, 25 % des demandeurs d'asile en Italie ont reçu un permis de séjour humanitaire, soit plus de 20 000 personnes.

"Ils se retrouvent sans solution"

Avec la nouvelle loi, les centres d’accueil sont désormais réservés aux seuls personnes ayant le statut de réfugié et aux mineurs non accompagnés. Autrement dit, les migrants anciennement sous protection humanitaire ne pourront plus y avoir accès, même avec leur nouveau statut.

"Ces 24 personnes ont reçu un titre de séjour régulier en Italie, mais leur prise en charge dans la première phase d'accueil (CARA) a expiré. Ils se retrouvent donc sans solution", précise à InfoMigrants le père Rino Le Pera, directeur du réseau Caritas dans la province de Crotone.

Parmi les expulsés, il déplore la présence "d'une famille avec une petite fille de 6 mois , d'une jeune femme victime d'exploitation sexuelle, d'une autre ayant subi des violences physiques et d'un homme souffrant de problèmes de santé mentale".

"Ce qui se passe ici est fou", dénonce de son côté Franceso Parisi, président de la Croix-Rouge à Crotone, interrogé par le quotidien britannique The Guardian. "Vous ne pouvez pas laisser des personnes vulnérables à la rue. C'est une violation des droits de l'Homme". 

Prévenus à l'avance de l'expulsion, Caritas et la Croix-Rouge italienne ont réussi à se rendre au CARA d'Isola Capo Rizzuto pour proposer une solution d'hébergement à la famille concernée ainsi qu'aux deux femmes victimes de violences. Quatre migrants ont également été accueillis par une coopérative locale. "Pour ce qui est des autres, nous pensons qu'ils ont pu reprendre la route, ou rejoindre le camp de fortune situé au nord de Crotone, où près d'une centaine de personnes vivent dans des conditions extrêmement précaires sous des tentes", assure le père Rino Le Pera qui s'étonne de la "vitesse" à laquelle les autorités ont mis en oeuvre les nouvelles mesures. 

Les prêtres disposés à "ouvrir les portes des églises" 

"Nous essayons de nous préparer car d'autres expulsions devraient arriver, mais nous ne savons pas quand ce sera, ni combien de personnes exactement vont être concernées", poursuit-il. À Crotone, Caritas a déjà préparé un dortoir pouvant accueillir 20 personnes, une solution "qui ne sera sûrement pas suffisante" concède son directeur. 

Selon l'agence de presse italienne ANSA, environ 200 personnes devraient à leur tour être expulsées du centre d'Isola Capo Rizzuto. À Potenza, dans la région de la Basilicate, le préfet a annoncé au début du mois que les "détenteurs d'une protection humanitaire" devaient être "invités à quitter" les centres d'accueil, rapporte le Guardian. La presse italienne indique encore qu'une dizaine de migrants a reçu l'ordre de quitter leur centre d'accueil à Caserta, en Campagnie. Dans les prochains jours, des centaines de personnes devraient également quitter le CARA de Mineo, en Sicile, le deuxième plus grand centre d'accueil pour migrants en Europe. 

Face à cette situation alarmante, les prêtres italiens ont déclaré la semaine dernière être disposés à "ouvrir les portes des églises de chaque paroisse" aux personnes expulsées des centres d'accueil. 

Avec Info Migrants