APRNEWS - M. Venance Konan, nul ne s’attaque à votre personne ! Nous affichons uniquement notre étonnement devant votre silence cadavérique et vos indignations sélectives quand, par exemple, le pouvoir ne nomme que des gens du nord aux postes de dg, quand la dette ivoirienne connait, aux dires de plusieurs personnes, une grimpée exponentielle ou quand nos prisons accueillent des hommes politiques. Au total, vous n’êtes pas gêné aux entournures quand ceux que vous défendez font ce que vous reprochez aux autres. On ne se souvient pas d’une seule critique que vous ailliez formulée contre l’action du gouvernement. Peut-être seriez-vous déjà prêt à démontrer que la dynamique gouvernementale est immaculée sur toute la ligne. Un gouvernement de dieux donc.

Aujourd’hui encore, vous évoquez les concepts d’éthique et de légitimité, dans la qualification que vous faites de la candidature de Tidjane Thiam. Est-il encore besoin d’expliquer à nouveau ce qui l’a déjà été ? Il faut peut-être vous laisser avec votre vision étriquée de ces concepts philosophiques. Ces notions dont la compréhension et l’appréhension ne sont  point ouvertes aux personnes à la pensée obtuse, sont plus accessibles aux esprits prompts à la réflexion critique. Celle-ci ne calomnie pas et, loin de la politique, elle se met uniquement au service de la manifestation de la vérité. 

M. Konan vous n’appréhendez les termes de légitimité de légalité et d’éthique que dans leur acception juridico-formelle. Non ! Faites un effort de dépassement et admettez, même si vous avez la mission d’en nier la réalité, que Thiam est légitime de toutes ces déclarations inarêtables  de soutiens de membres du PDCI à  sa candidature. Tidjane est le Moïse de toutes les personnes qui se sentent victimes du pouvoir. Le sauveur en puissance de celles qui ont perdu leur maison sans raison, leur emploi ou ont été jetées en prison pour avoir soutenu Laurent Gbagbo ; celles dont les comptes bancaires ont été vidés par des mains jusque-là non- identifiées. Thiam tient la légitimité de sa candidature de la foi de ces infortunés qui voient en lui le rempart, le libérateur. L’accord ou l’accueil que le banquier ivoirien réserve à ces appels au secours confère, justement à sa candidature, sa dimension éthique. La légalité de sa candidature procède de sa conformité avec la loi. Être président d’un parti est légal !

Venance Konan se demande encore si « la tentative de Tidjane Thiam de prendre la Côte d’ivoire, ne serait pas une mission commandée de l’Elysée ». Le journaliste, très clairement, prend ici le relais d’un petit article très avarié qui, sans le succès escompté par les comploteurs, a circulé ces derniers temps et selon lequel Thiam aurait sauvé Bédié grâce à sa relation avec Macron. Il apparaît en filigrane, dans cette histoire, la relation entre Tidjane Thiam et le chef de l'État français, Emmanuel Macron. Evidemment, de là à soutenir que l’ex-ministre ivoirien est un pion de Paris, il n’y a qu’un pas que Venance n’a pas encore eu l’aplomb de franchir

M. Venance Konan, Thiam et macron se connaissent depuis de longues années. Croyez-vous que Thiam devrait, au nom d’un sentiment anti-français qui a gagné certains pays africains, s’éloigner d’un homme avec qui il a partagé les mêmes bureaux et a, de ce fait, probablement partagé des moments d’angoisses, de joie, de fierté, etc. ? 

Ce n’est pas de cette façon qu’il faut imaginer les rapports entre pays. Sous Thiam, la France peut être un partenaire privilégié de la Côte d’ivoire. Il n’a pas, pour montrer son attachement à son pays, à éviter un pays en particulier. Le grand économiste qu’est l’homme ne sait que trop bien que le chauvinisme est une bêtise et que tous les Etats vivent en interdépendance. La Côte d’ivoire ne vivra donc pas recroquevillée sur elle-même, comme dans une enceinte adiabatique, sans échange avec le milieu extérieur. Thiam n’est visiblement pas homme à être soumis. Le banquier ivoirien n’a pas de soumission à offrir à qui que ce soit, mais exigera de ses partenaires, cela se voit, le respect mutuel dans une collaboration franche dénuée de paternalisme. 

Venance Konan parait aussi dérangé par le fait que Tidjane Thiam soit « resté dehors sur une assez longue période ». En quoi ce fait est-il réellement dérangeant ? Devrait-on éternellement l’instrumentaliser parce qu’il faudrait nécessairement fragiliser un potentiel adversaire politique ! On peut faire ça !

Thiam est de père et de mère ivoiriens, donc ivoirien dans l’âme. Son âme et sa personnalité intrinsèque profonde ont donc été forgées dans le fer ivoirien. Tidjane n’a, en outre, pas échappé, pour  son éducation, aux réalités du système matrilinéaire du fait de son côté maternel baoulé. Dès lors, la question à poser serait plutôt celle de savoir si 22 ans d’absence de sa terre natale, suffisent à modifier l’âme profonde d’un être humain. 

L’âme est le Principe de la vie, de la pensée ou des deux substances à la fois. Elle n’est pas une réalité fragile ou évanescente qui se modifierait substantiellement au bout de 22 ans de vie hors de son pays. Thiam est toujours celui qui était fondamentalement quand il quittait Abidjan.  Disons aussi au passage, aux nouveaux théoriciens ivoiriens de la nationalité, que celle-ci est le lien juridique qui unit un individu à un Etat et que le nom ou le patronyme n’en est pas une donnée essentielle déterminante. Le débat de la nationalité de Tidiane Thiam est donc strictement faux et ne peut pas être. 

L’ex-éditorialiste parle également désormais, sans désemparer, de Thiam, comme d’un franco-ivoirien. Il ne manque pas de souligner que la France aurait même proposé la place de ministre de l’économie et des finances à l’économiste ivoirien. Alors, puisque Tidjane Thiam n’est pas l’actuel, et ne l’a jamais été, ministre français de l’économie, on peut, par hypothèse, affirmer qu’il a refusé ce poste oh combien gratifiant et prestigieux, optant plutôt pour son pays. Tidjane se sent donc plus ivoirien que français. Houphouet Boigny à été ministre français. Était-il pour autant  plus français qu'ivoirien?.​

Ne pouvant décidément se défaire de sa hantise, Venance Konan a franchi allègrement les kilomètres qui nous séparent du Bénin et a trouvé, dans ce pays, un homologue à Tidjane Thiam, l’homme d'affaires franco-béninois, Lionel Zinsou, ancien candidat à la présidentielle. Il faut peut-être dire à l’actuel supporter du pouvoir que les analogies fonctionnent parce qu’elles sont des images, mais leur valeur n’est pas une valeur de vérité, et ne procède pas d’une valeur rationnelle. Comparaison n’est donc pas raison, M. Konan ! Au Bénin, Zinsou a peut-être échoué. Mais vous ne pouvez raisonnablement pas en déduire que Thiam échouera en Côte d’ivoire. Encore que l’ivoirien, lui, jouit d’une respectabilité et d’une reconnaissance transfrontalières mondiales. L’homme Thiam a plutôt une réputation de grand économiste, de gestionnaire extraordinairement efficace qui le précède.

Jean Clotaire Tétiali