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APRNEWS : Sénégal - Une élection présidentielle sous haute tension ?

APRNEWS - Sénégal - Une élection présidentielle sous haute tension ?
Dimanche, 24 mars 2024

APRNEWS : Sénégal - Une élection présidentielle sous haute tension ?

APRNEWS - Jour J : Initialement prévue le 25 février 2024 avant d’être reportée, l'élection présidentielle au Sénégal a finalement lieu ce dimanche 24 mars 2024. Ce sera la douzième depuis l'indépendance du pays en 1960. Environ 7,3 millions d’électeurs sont inscrits sur les 18 millions d’habitants.

APRNEWS - Ça y est, nous y sommes…C’est le grand saut vers l’inconnue pour ce grand pays du continent souvent cité comme l’un des derniers bastions de la démocratie en Afrique de l’ouest.
Mais force est de constater que cette élection va laisser des traces.

Le Bilan de Macky Sall

Certes, le Président sortant Macky Sall ne sera pas candidat à sa propre succession, mais beaucoup ont vu dans ces récents agissements des tentatives avortées de son maintient à la tête de l’état.

Arrivé au pourvoir en 2012, ce dernier a été élu dans un climat socio politique particulier. Face à Abdoulaye Wade un Président sortant vieillissant au pourvoir, lui aussi, pendant 12 ans. 

Fort de sa victoire, aussitôt reconnue par son adversaire, Macky Sall avait toutes les cartes en main pour mener à bien sa mission. Toutefois, au regard de la situation qui prévaut actuellement au Sénégal son bilan est plus que mitigé. A son actif des investissements massifs dans les infrastructures, mais aussi la hausse du chômage chez les jeunes et une crise politique inédite dans l'histoire du pays. Entre autres termes, un bâtisseur qui a failli démolir les solides fondations de la démocratie sénégalaise.

Une élection inédite ?

Cette élection revêt un caractère inédit à plusieurs titres. Tout d’abord cette élection se distingue par le nombre de candidats retenus par le Conseil constitutionnel lors de la publication de la liste définitive. Ils sont 20 à voir leur candidature validée par les sept Sages. Elle est finalement ramenée à 19 avec le désistement de Rose Wardini. Un record pour la jeune démocratie ouest-africaine.

Autre fait marquant, aucun des deux principaux poids lourds de la scène politique et médiatique sénégalaise ne prendra part à cette présidentielle. Il s’agit de l’opposant Ousmane Sonko dont la candidature a été rejetée par le Conseil Constitutionnel et de Macky Sall le Président sortant qui a renoncé à briguer un nouveau mandat.

Après avoir cristalliser les tensions, ces deux protagonistes dont le spectre domine largement ce scrutin seront aux abonnés absents, du moins en apparence. Cette situation incongrue a de facto fait entrer en scéne deux autres acteurs, Amadou Ba et Bassirou Diomaye Faye.

L'ancien Premier ministre, Amadou Bâ est le candidat désigné par la coalition au pouvoir, le Benno Bokk Yaakaar. Avant de rejoindre la primature, Amadou Bâ a occupé plusieurs portefeuilles ministériels. Après une longue carrière dans l’administration sénégalaise, il est nommé ministre de l’Économie et des Finances en 2013 puis ministre de l’Économie, des Finances, du Plan et du Budget. Il a également occupé le poste de ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur de 2019 à 2020.

Cependant, son choix en tant que candidat de la majorité présidentielle n’a pas fait l’unanimité au sein de son camp. D’anciens ministres de Macky Sall à l’instar de Aly Ngouille Ndiaye, ou encore de l’ancien Premier ministre Mahammed Boun Abdallah Dionne ont preféré se lancer dans la course.

De l’autre côté, Ousmane Sonko, le farouche opposant au régime Sall, a également mis en selle son lieutenant Bassirou Diomaye Faye, tous les deux sont sortis de prison en pleine campagne électorale.

M. Faye, ancien collègue de M. Sonko au service des impôts et des domaines, devient ainsi le candidat de substitution du parti dissous Pastef les Patriotes, suite au rejet de la candidature d'Ousmane Sonko par le Conseil constitutionnel.

Cette situation inédite, sans remettre en cause la légalité de leur candidature respective interroge sur la légitimité de ses deux candidats. On parle ici d’une légitimité morale dont ils ne peuvent se prévaloir tant leurs candidatures semblent être des candidatures de substitution et en font pour certains des « hommes de paille ». Il semble évident, que ni Bassirou Diomaye Faye ni Amadou Ba n’aurait pu imaginer être dans les starting block pour cette course vers le palais de la République. Ce qui nous amène à nous demander : quel a été le degré de préparation de ces deux prétendants à la magistrature suprême? L’un depuis sa prison et l’autre depuis la Primature. 

Certes des équipes de campagne ont élaborés des programmes, mais sont-ils véritablement l’émanation de leur désir profond pour la Terranga ou la vision de leurs mentors respectifs à savoir le Président Macky Sall et l’opposant Ousmane Sonko.

Ce qui soulève une autre question, qui s’imposera à l’un et l’autre en cas de victoire, qui gouvernera véritablement le sénégal?

 Il est communément admis que le bicéphalisme n’existe pas à la tête de l’État. C’est un fauteuil et non un banc présidentiel sur lequel le futur chef de l’État devra s’asseoir. Mais nul ne peut nier que les électeurs qui exerceront leurs devoirs civiques ce jour, mettrons dans l’urne le nom de l’un de ses candidats mais consciemment ou inconsciemment, certains voteront pour Macky Sall ou Ousmane Sonko. Donc qu’ adviendra t il de l’un comme l’autre lors de son accession au pouvoir ? auront-ils les coudés franches pour gouverner ou resteront-ils sous la tutelle de leurs mentors qui viennent indiscutablement de leur mettre le pied à l’étrier.

Une élection aux conséquences régionales :

Par définition, l’élection présidentielle est la rencontre d’un Homme et de son peuple et demeure principalement locale mais au vue des relations internationales et l’interdépendance des états, les conséquences de ce scrutin dépasse largement les frontières du Sénégal.  En effet, la situation politique et économique qui prévaut dans la sous-région est source d’inquiétude. Fragilisé par la succession de coup d’état, l’Afrique de l’Ouest s’interroge sur son avenir politique et craint à la fois un effet domino et la dislocation des institutions régionales. 

le Sénégal est un acteur majeur, à plus d’un titre de part sa  position géographique stratégique qui lui confère une ouverture sur le monde et une facile accessibilité.

Ce pays est l’une des économies les plus performantes d’Afrique subsaharienne et la deuxième plus importante de l’UEMOA. Depuis plusieurs années maintenant, l’économie enregistre une croissance soutenue supérieure à 6%. Sa longue histoire de stabilité sociale et politique et son environnement des affaires en constante amélioration en font une destination sûre pour les investissements. 

Actuellement le Sénégal est le pays le plus stable de l’Afrique de l’ouest et à ce titre, l’issue de ces élections aura un impact sur la région. D’abord sur le plan économique, les choix de la politique monétaire du pays sera déterminant au vue des vieillîtes récurrentes de quitter la Zone Franc sous sa forme actuelle comme le préconise la CEDEAO ou sous une forme plus abrupte comme l’envisage les pays de l’Alliance des Etats du Sahel (AES).

Les relations internationales seront elles aussi au cœur de la future gouvernance du Sénégal. Les récentes ruptures de l’ordre constitutionnel ont remis sur la table la négociation ou la dénonciation des accords de défenses et de sécurité et certains accords liés à l’exploitation des ressources naturelles de plusieurs pays. A quoi s’ajoute l’accroissement du rejet de la France au profit de la Russie ou d’autres partenaires.

Vous l’aurez compris, les enjeux sont cruciaux pour l’espace ouest africains fragilisé ces dernières années. Les deux principaux candidats en course pour la présidentielle, à savoir Amadou Ba et Bassirou Diomaye Faye ( ainsi que leurs mentors)  sont sur ces questions aux antipodes. L’un est le candidat de la continuité et l’autre de la rupture. Rappelons si besoin était que ce choix incombe exclusivement au peuple sénégalais qui au-delà de leur avenir ont aussi entre leurs mains celui d’une région phare du continent africain. Et en cela  c’est une élection sous-haute tension. 

Comme il est coutume de dire en de pareil circonstance, que le meilleur gagne et que la volonté du peuple sénégalais soit faites!

La rédaction APRNEWS par FD