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APRNEWS: En Afrique du Sud, l’industrie de la volaille fait face à l’une des pires crises de son histoire

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 L’industrie sud-africaine de la volaille est la plus importante du continent. Si dans le secteur, la protection vis-à-vis des importations s’est renforcée sur ces dernières années, la filière doit faire face à une série de vents contraires depuis quelques mois qui mettent à mal sa capacité à approvisionner le marché local en produits avicoles. Explications. 

Délestages récurrents

La filière volaille sud-africaine n’a pas échappé à la grave crise énergétique que traverse la compagnie publique d’électricité (Eskom). L’entreprise étatique dont le parc de centrales à charbon est vieillissant a effectué depuis décembre 2022, des coupures par rotation allant jusqu’à 10 heures par jour.

Dans le secteur avicole, l’approvisionnement erratique a eu un effet dramatique sur les opérations des fermes commerciales à grande échelle. Sur le terrain, cela a eu comme conséquences, la perturbation des systèmes de chauffage des poussins, le dysfonctionnement des systèmes de ventilation ou encore les retards dans les calendriers d’abattage des animaux, ce qui a conduit à des jours supplémentaires de consommation d’aliments. 

L’entreprise étatique dont le parc de centrales à charbon est vieillissant a effectué depuis décembre 2022, des coupures par rotation allant jusqu’à 10 heures par jour.

Pour faire face à cette situation, plusieurs compagnies du secteur se sont tournées vers d’autres sources d’énergie comme les générateurs diesel et des centrales solaires, ce qui a contribué à augmenter les coûts d’exploitation alors que l’industrie faisait déjà face à une hause des prix des carburants.

Selon Astral Foods, l’un des principaux acteurs de l’industrie comptant pour 25 % de la production de poulet de chair du pays, les coûts liés aux délestages, combinés aux dépenses d’investissement dans l’alimentation électrique devraient s’élever à 1,9 milliard de rands (100 millions $) au cours de l’exercice financier se terminant le 30 septembre 2023.

D’après la compagnie, la fourniture inadéquate en électricité a déjà conduit une réduction de la production d'au moins 12 millions de poulets de chair sur le premier semestre 2023.      

 Grippe aviaire sans précédent

Si l’industrie volaille se débattait avec les perturbations électriques, l’épidémie de la grippe aviaire qui s’est déclenchée vers la fin mars est venue ternir un peu plus les perspectives du secteur.

L’épidémie d'influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) de sous-type H7 et H5 est en effet la plus grave qu’ait connu le pays. Selon le Ministère de l’Agriculture, la maladie virale s’est déjà propagée à un rythme alarmant dans 6 des 9 provinces du pays dont le Cap-Occidental, le Nord-Ouest, le KwaZulu-Natal, le Gauteng, l’Etat-Libre et le Mpumalanga. Cette pathologie a déjà conduit la Namibie à suspendre ses achats de volaille depuis le pays et provoqué des dégâts importants sur plusieurs opérateurs clés de l’industrie.   

Vers la fin septembre, RCL Foods a déclaré que son unité de production de volaille Rainbow avait abattu 410 000 poulets pour un coût estimé à 115 millions de rands (6 millions $).  

De son côté Quantum Foods Holdings estime que l’influenza a tué 2 millions de poules pondeuses et de reproductrices depuis avril pour une valeur estimée de 106 millions rands (5,6 millions $). Et Astral Foods a indiqué que l’épizootie lui a déjà fait perdre plus de 220 millions de rands (11,5 millions $).          

Au total, selon les dernières estimations de l’Association sud-africaine de la volaille (SAPA) datées du 3 octobre, près de 7,5 millions de poulets ont été abattus pour contenir la propagation de l’épidémie, soit entre 20 et 30 % du cheptel avicole national.

Des conséquences sur l’approvisionnement en produits avicoles 

Les entreprises avicoles fournissant les détaillants, les grossistes et les entreprises de restauration rapide, les problèmes dans la production ont affecté directement la distribution de produits à la population.

Selon les sources médiatiques, il y a déjà une pénurie d’œufs de table dans la nation arc-en-ciel dans un contexte où près de 5 millions de poules pondeuses ont été abattues. Dans le pays dont la production d’œufs est comprise entre 600 000 et 650 000 tonnes, les experts de l’industrie estiment qu’il faudra notamment 6 mois pour remplacer les pondeuses.     

Selon les sources médiatiques, il y a déjà une pénurie d’œufs de table dans la nation arc-en-ciel dans un contexte où près de 5 millions de poules pondeuses ont été abattues. 

Plusieurs détaillants de produits alimentaires comme Woolworths et Pick N Pay appliquent actuellement des rationnements sur la quantité d'œufs que les consommateurs peuvent acheter en raison de la disponibilité limitée des stocks.

De son côté Spar, le second plus grand groupe de distribution derrière Shoprite réfléchit actuellement à une diversification de ses partenaires locaux et discute avec plusieurs pays d'Afrique australe en vue d’importer des œufs.   

Si du côté de la viande de poulet, il n’y a pas encore de rupture dans la chaîne de commercialisation, de nombreuses sources de l’industrie indique que les tensions persisteront dans les prochains mois.

Le pays qui consomme environ 1,8 million de tonnes de viande de poulet par an n’est pas encore autosuffisant. De fait, le risque est que le déficit de production du pays compris entre 300 000 et 400 000 tonnes chaque année s’aggrave davantage avec cette mauvaise passe que traverse le pays. 

Que fait le gouvernement ? 

Face à la situation, les autorités sud-africaines envisagent la mise sur pied d’un plan de vaccination pour contenir l’épidémie. Selon les autorités, des discussions pour finaliser l’importation des vaccins auprès des fabricants sur le marché international seraient actuellement à un stage avancé.

D’après Reggie Ngcobo, porte-parole du Ministère de l’Agriculture, l’opération de vaccination devrait être strictement contrôlée par l’exécutif. « Le vaccin ne sera pas disponible pour la vente au public. Plusieurs facteurs doivent être pris en compte comme l’efficacité du vaccin utilisé, les mesures de biosécurité, la surveillance et le contrôle des déplacements requis pour une application du vaccin au niveau d’une ferme », indique le responsable. 

Sur le plan de l’amélioration de l’offre en produits avicoles sur le marché, les autorités travailleraient sur l’optimisation du processus d’octroi des permis d’importation d’œufs. Du côté de la viande, plusieurs possibilités sont sur la table pour réduire les prix de la denrée sur le marché. Déjà selon les données officielles, le prix de vente au détail du kilogramme de poulet entier a atteint 61 rands (3,2 $) en juillet dernier, soit 10 % de plus qu’un an plus tôt.     

Le ministre de l’Industrie, Ebrahim Patel a notamment demandé à la Commission de l’administration du commerce international (ITAC) d’évaluer la meilleure politique commerciale entre un allègement temporaire dans les droits de douane ou une suspension provisoire des droits anti-dumping pour faciliter des importations.

Le pays avait réinstauré depuis le mois d’août, pour une durée de 4 ans, ces prélèvements sur la volaille non désossée importée depuis l’Espagne, le Brésil, la Pologne, l’Irlande et le Danemark afin de protéger l’industrie locale.  

Espoir Olodo