APRNEWS: Une approche collaborative peut favoriser la transition énergétique
Comment attirer davantage de capitaux en faveur de l’énergie solaire ? Les atouts du continent ne sont plus à démontrer, pourtant, les financements manquent encore.
L’Afrique, qui bénéficie d’un ensoleillement abondant, recèle un immense potentiel en matière de production issue de l’énergie solaire. Bien qu’elle possède 60 % des meilleures ressources solaires au monde, sa part actuelle de capacité solaire n’est que de 1 %. Toutefois, une transformation prometteuse est en cours, avec des pays comme l’Afrique du Sud, l’Égypte et le Maroc qui sont les premiers à adopter l’énergie solaire.
Des pays dépendant du pétrole, tels que le Nigeria et l’Angola, s’efforcent également d’intégrer les énergies renouvelables, y compris l’énergie solaire, dans leur bouquet énergétique et sont sur le point de rejoindre les rangs des économies solaires les plus importantes d’Afrique.
La baisse des coûts des technologies promet un impact économique substantiel et permet de relever des défis tels que la durabilité des services publics, compte tenu de la disparité entre les coûts de production et les tarifs.
De nombreux facteurs doivent être réunis pour que l’énergie solaire et éolienne fonctionne : l’échelle, qui détermine le prix et la compétitivité ; un réseau fonctionnel et intégré ; et souvent des systèmes de stockage de l’énergie dans des batteries (BESS) pour conserver l’énergie excédentaire produite pendant les périodes de pointe de l’énergie solaire ou éolienne et la libérer pendant les périodes de forte demande ou de faible production, augmentant ainsi la disponibilité de l’énergie renouvelable.
Le nouveau Consortium BESS, un partenariat mondial multipartite établi par l’Alliance mondiale pour l’énergie au service des peuples et de la planète (GEAPP), est à l’origine d’une nouvelle ambition pour l’accélération et l’intensification de l’expansion de l’énergie solaire. Cette initiative vise à transformer les systèmes énergétiques dans les pays à revenu faible et intermédiaire (PRFI) en tirant parti des avantages des systèmes de stockage d’énergie par batterie.
African Business a réuni récemment une table ronde sur ces questions. Elle réunissait Ibrahim Matola, ministre de l’énergie du Malawi ; Joseph Ng’ang’a, directeur général par intérim du GEAPP ; et Demba Diallo, directeur général, responsable du développement de projets chez Africa50.
Ouvrant les débats, Joseph Ng’ang’a a abordé la question de savoir comment les énergies renouvelables en Afrique peuvent rivaliser avec le secteur du pétrole et du gaz, qui parvient à attirer 8 % des investissements mondiaux.
Les énergies renouvelables sont plus susceptibles que le pétrole et le gaz d’être utilisées sur le continent à des fins domestiques et industrielles.
L’approche du partenariat
Pourtant, « nos marchés sont relativement petits et cela signifie que vous avez affaire à des dizaines de mégawatts (MW) plutôt qu’à des centaines de MW, ce qui a un impact sur l’économie des centrales solaires », a-t-il fait remarquer.
Le paradoxe, a souligné Joseph Ng’ang’a, est qu’alors que les investissements restent faibles, l’Afrique a besoin de beaucoup plus d’énergie qu’elle n’en a actuellement, avec environ 600 millions de personnes qui n’ont pas accès à l’électricité.
Le succès, a ajouté Joseph Ng’ang’a, nécessiterait « des solutions à multiples facettes mises en œuvre par différentes institutions ». C’est pourquoi le GEAPP a créé un consortium comprenant 14 pays et 20 partenaires, chacun remplissant un rôle spécifique.
Le consortium se concentre sur le stockage de l’énergie par batterie, avec des experts techniques qui aident les services publics africains à comprendre les avantages de ce type de stockage pour leurs infrastructures, et des financiers – tant publics que privés – qui soutiennent le déploiement à grande échelle. « L’objectif du GEAPP est de rassembler tous les partenaires de notre alliance, chacun jouant sur ses points forts. »
Le Malawi est l’un des onze pays qui ont adhéré au consortium BESS, aux côtés des nations africaines suivantes : Égypte, Ghana, Kenya, Mauritanie, Mozambique, Nigeria et Togo. Selon Ibrahim Matola, ministre de l’énergie du Malawi, le pays considère l’expansion des systèmes de stockage par batterie comme une solution aux défis énergétiques auxquels il est confronté. « Les BESS fourniront des services auxiliaires au réseau national, ce qui facilitera l’intégration des énergies renouvelables et permettra au pays de maximiser l’utilisation des ressources solaires à faible coût dans son bouquet énergétique », a-t-il déclaré, ajoutant qu’en plus de ses engagements financiers, « le gouvernement du Malawi étudie le cadre politique et réglementaire actuel pour le déploiement et l’exploitation des BESS, y compris les licences, les normes et les règlements de sécurité, le code du réseau et la structure tarifaire ».
Le Malawi dispose de trois centrales solaires opérationnelles : la centrale de Salima, développée par JCM Power avec une capacité de 80 MW ; Serengeti avec une capacité de 20 MW ; et Golomoti, également développée par JCM Power, qui a une capacité de 21 MW et comprend un système de stockage de batterie de 5 MW. Plusieurs autres projets sont en cours de réalisation.
La question du risque
Abordant la question du risque, Demba Diallo d’Africa50 a admis que les marchés africains sont petits et fragmentés et que, par conséquent, ils sont considérés comme risqués. Cependant, il a noté que « si nous sommes capables d’interconnecter les réseaux de transmission, alors nous pourrons avoir des projets solaires à grande échelle dans certains pays qui pourront être exportés vers d’autres ».
Un autre aspect crucial, selon Demba Diallo, est la structuration des projets, en particulier la réduction des risques. Cela permet de réduire les taux d’intérêt exigés par les partenaires financiers et les prêteurs. « C’est ce que les institutions telles qu’Africa50 tentent de faire par le biais de leurs interventions et de leurs instruments. »
Demba Diallo a également expliqué qu’Africa50, en tant qu’institution détenue par ses États membres, travaille avec les gouvernements africains sur des réformes réglementaires et politiques qui encourageront les investissements dans les projets de stockage en batterie. « Nous nous assurons que les bonnes politiques sont en place et qu’il existe des incitations telles que des réductions d’impôts, car lorsque vous avez un risque positif, vous devez réduire l’investissement », a-t-il déclaré.
Certains pays commencent tout juste à explorer le modèle du producteur indépendant d’électricité (IPP), tandis que d’autres, comme le Maroc, disposent de cadres avancés et de procédures d’appel d’offres concurrentielles. Cette disparité nécessite une approche sur mesure pour répondre aux conditions et aux préoccupations locales.
Au Mozambique, Africa50 travaille actuellement sur trois projets solaires, après avoir signé un protocole d’accord lors de la COP28. « Nous travaillons sur l’Alliance africaine pour l’infrastructure verte, qui vise à développer 10 milliards de dollars de projets respectueux du climat, principalement dans le secteur de l’électricité, avec 500 millions de dollars consacrés au développement de projets dans le domaine de la transmission, ce qui est très important pour construire ces centrales électriques, et également dans le domaine de la production d’énergie renouvelable », a précisé Joseph Ng’ang’a.
Lequel a abondé dans le sens de Demba Diallo, soulignant que si certains pays africains disposent de ressources géothermiques bien établies qui fournissent une énergie de base, d’autres, comme le Malawi, offrent un potentiel solaire important.
Les engagements des institutions
Les pays et les investisseurs doivent adopter une approche globale de l’électrification, en tenant compte non seulement de la demande et de l’offre individuelles, mais aussi de l’impact régional des investissements. « Lors d’une discussion à Barcelone il y a un mois avec 16 ministres africains, le message était très clair : l’Afrique veut fixer l’ordre du jour, et les ministres pensent qu’en ne regardant pas seulement les pays individuels, mais la bonne combinaison de pays et leurs ressources, nous pourrions le faire de manière plus efficace et efficiente ».
Pour clore la session, Joseph Ng’ang’a a mis en évidence trois facteurs clés de progrès dans le développement de l’énergie en Afrique. Premièrement, il a souligné l’importance pour les ministres africains de jouer un rôle proactif dans les discussions sur l’énergie, en présentant l’énergie non pas comme une simple question d’électricité, mais comme un élément essentiel du développement global qui mérite une attention de haut niveau.
Deuxièmement, la Banque mondiale et la Banque africaine de développement ont pris un engagement ambitieux de 30 milliards de dollars pour fournir de l’électricité à 300 millions d’Africains supplémentaires. Il a fait remarquer que la valeur de cet engagement ne réside pas seulement dans l’engagement financier, mais aussi dans la volonté d’adopter une approche collaborative.
Troisièmement, Joseph Ng’ang’a a souligné les avantages économiques des technologies renouvelables, telles que le stockage de l’énergie dans des batteries et l’énergie solaire. La baisse des coûts de ces technologies promet un impact économique substantiel et permet de relever des défis tels que la durabilité des services publics, compte tenu de la disparité entre les coûts de production et les tarifs. « Ces trois tendances me donnent beaucoup d’espoir. Nous devons continuer à faire avancer les choses, car avec plus de 680 millions d’Africains non électrifiés, nous ne pouvons tout simplement pas relâcher la pression. »