APRNEWS: Les auto-promotions des dirigeants sont-elles de bon augure ?

APRNEWS: Les auto-promotions des dirigeants sont-elles de bon augure ?

En Guinée, Mamadi Doumbouya est désormais général d’armée. Une auto-promotion qui intervient seulement quelques mois après que le dirigeant s’est fait général de corps d’armée. Et dans ces auto-promotions, la Guinée et le Mali semblent se livrer à une course dont les motivations réelles restent à comprendre.

En Guinée, Mamadi Doumbouya n’aura pas attendu longtemps après sa promotion au grade de général de corps d’armée pour passer général d’armée, le plus élevé de l’armée guinéenne. Le décret portant la nouvelle promotion a été signé par Mamadi Doumbouya, le 1er novembre 2024, date du 66e anniversaire de l’armée guinéenne.

Doumbouya et ses lieutenants promus

Aux côtés du chef de la transition guinéenne, 16 autres militaires parmi lesquels des ténors du CNRD ont également été promus généraux. Au total, il y a eu trois nouveaux généraux de corps d’armée. Il s’agit des généraux de division David Haba, Ibrahima Sory Bangoura et Balla Samoura. Sept généraux de brigade sont passés généraux de division. Il s’agit de : Amara Camara, Ahmed Mohamed Oury Diallo, Abdoulaye Keïta, Yagouba Touré, Mamadou Yaya Diallo, Djénéba Sory Camara et de Moussa Camara. De même, les colonels Michel Ange Bangoura, Mamadou Aliou Sow, Malick Diakité, Mohamed Sylla, Fatoumata Yarie Sylla et Aminata Diallo gagnent les deux étoiles distinctives des généraux de brigade.

En dehors de son nouveau grade, Mamadi Doumbouya est également décoré de la médaille de la Croix de guerre et élevé à la dignité de Grand-croix dans l’ordre national du colatier (la plus haute distinction dans le pays), pour « ses efforts constants en faveur de la cohésion sociale et de la coopération entre les peuples ».

Pourquoi cette course aux honneurs et aux grades ?

Face à ce qu’il convient d’appeler une course aux honneurs et aux grades dans les juntes guinéennes et maliennes, il convient de s’interroger sur les motivations réelles des dirigeants qui font de l’auto-promotion une règle de gouvernance désormais. C’est Mamadi Doumbouya lui-même qui a donné le ton, en janvier 2024, en se propulsant au grade de général de corps d’armée « à titre exceptionnel », tout colonel qu’il était. Le chef du CNRD avait ainsi sauté sans autre forme de procès les étapes de général de brigade et de général de division.

Cet exemple avait-il inspiré le colonel Assimi Goïta du Mali ? On pourrait bien le dire puisqu’il y a seulement quelques jours, le dirigeant malien s’était donné le grade de général d’armée et ceux de généraux de corps d’armée et de division à quatre autres de ses collaborateurs, tout ceci « à titre exceptionnel ». Environ deux semaines plus tard, comme dans une course, Mamadi Doumbouya rattrape ce qui était devenu un retard par rapport à son homologue malien : il s’octroie sa cinquième étoile.

Pourquoi toutes ces auto-promotions ? pourrait-on se demander. Est-il vraiment nécessaire de s’attribuer les grades les plus élevés de sa hiérarchie pour servir son pays ? La réponse est, sans ambages, non. Thomas Sankara n’a-t-il pas marqué l’histoire de son pays tout en ne conservant que son grade de capitaine en quatre ans d’exercice du pouvoir suprême ? Mouammar Kadhafi devenu Président de la Libye avec le grade de capitaine n’est pas allé au-delà du grade de colonel en 42 ans de règne. Au Ghana, le « Flying lieutenant », Jerry Rawlings, n’a pas non plus eu besoin de se barder de titres et grades militaires pour redresser son pays et mériter le respect de ses compatriotes.

Ce qui se passe actuellement en Guinée et au Mali n’est-il pas annonciateur de l’instauration de régimes basés sur le culte de la personnalité et ses corollaires ? Il s’agit-là d’un piège que ces dirigeants qui se sont présentés en libérateurs de leur peuple devraient éviter à tout prix. Surtout que ces promotions vont fortement peser sur les finances de ces pays. Pour l’instant, les deux autres juntes de l’Afrique de l’Ouest, le Niger et le Burkina Faso, sont en marge de cette tendance. Ibrahim Traoré tire, peut-être, sa motivation de l’exemple de son leader, le capitaine Thomas Sankara. Attendons de voir.

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