Vous êtes ici

Back to top

L'ambassade de France à Alger au centre d'une affaire d'espionnage

Aprnews - L'ambassade de France à Alger au centre d'une affaire d'espionnage - Actualité - Algerie
Jeudi, 12 novembre 2020

L'ambassade de France à Alger au centre d'une affaire d'espionnage

Trois Algériens ont été condamnés à de la prison ferme pour avoir envoyé des renseignements à des fonctionnaires de sécurité de l'ambassade à Alger.

 

L'affaire remonte à 2018. Les services de sécurité algériens arrêtent plusieurs personnes accusées d'espionnage au profit de la France. Le principal accusé, dont le procès s'est ouvert à Alger mardi 10 novembre, est Z. A, présenté par les médias algériens comme étant un « baron de la drogue » installé en France.

Rentré en Algérie par l'aéroport Houari-Boumédiène d'Alger en 2010, Z. A est interpellé par la police des frontières en vertu d'un mandat international lancé contre lui, avant d'être blanchi en novembre 2011 par le tribunal de Tizi-Ouzou (Kabylie), ville dont il est originaire. Z. A reprend sa vie en Algérie et ouvre un atelier de réparation de motocyclettes avant d'être rattrapé, en 2017, par une affaire pendante en France pour blanchiment d'argent et trafic de drogue. La justice algérienne le place alors sous contrôle judiciaire.

Réseau d'informateurs

Entre-temps, Z. A se lie d'amitié avec un inspecteur de police algérien qui lui présente R., « un employé de la sécurité (français) à l'ambassade de France à Alger », selon la presse algéroise. Ce dernier s'est même déplacé à l'atelier de Z. A pour s'acheter une moto. Z. A reconnaît devant les juges, ce mardi 10 novembre, avoir rencontré ensuite plusieurs fois le fonctionnaire français, qui cherchait à faire sortir sa voiture bloquée au port d'Alger. La situation se débloque grâce aux contacts entre Z. A et un employé des Douanes au port. L'accusé poursuit son récit en expliquant à la justice que durant l'été 2017, R. lui a présenté de « nouveaux employés de la sécurité intérieure de l'ambassade », un autre Français, S., et un Franco-Algérien, B. K. « B. K activait sous couverture de simple employé technique à l'ambassade », précise la presse.

L'Algérien rencontra ensuite plusieurs fois B. K, chez lui au parc Peltzer de l'ambassade de France, sur les hauteurs d'Alger à Hydra. « Aidé par son ami l'inspecteur et un autre commissaire officiant à l'aéroport d'Alger, Z. A fournit à B.K. des renseignements sur plusieurs Algériens, dont certains vivant en France », explique un compte rendu du quotidien Ennahar. « Ces renseignements étaient ensuite transmis » à un commissaire divisionnaire et attaché de sécurité intérieure de l'ambassade de France « qui se déplaçait souvent dans le véhicule de B. K. », poursuit le quotidien arabophone.

Une sonde chez la police

Selon Ennahar, les renseignements envoyés par WhatsApp et Viber par Z. A concernaient aussi les changements dans le corps de la police, comme le limogeage, en juin 2018, de l'ex-patron de la Sûreté nationale, le général-major Abdelghani Hamel (en prison pour des faits de corruption) ou encore celui, en juillet 2018, du patron de la police des frontières à l'aéroport d'Alger, le commissaire divisionnaire Lahcen Hassaïne. Selon la justice, Z. A envoyait aussi des détails sur ces changements et sur les « luttes intestines au sein de la police ».

L'autre « matière » envoyée par Z. A concernerait les informations liées à l'activité du port d'Alger grâce, notamment, à ses liens avec un officier de la police judiciaire au port chargé de la surveillance des navires et des marins. « Les services de sécurité ont saisi dans le téléphone de l'accusé des envois à B. K concernant deux ressortissants français qui n'avaient pas réussi à obtenir leur visa d'entrée en Algérie, ainsi que des suspects de terrorisme en France, un ex-membre du FIS arrêté en Italie et des véhicules volés recherchés par Interpol », selon Ennahar.

Sept ans de prison

Les renseignements transmis couvraient aussi « le trafic de véhicules [de et vers la France], les faussaires algériens spécialistes en faux passeports et en faux visas, les réseaux de vol d'équipements médicaux en France pour les ramener en Algérie, les affaires de blanchiment d'argent et l'identité de certains demandeurs de visa », détaille le quotidien Echourrouk. Le même journal précise que Z. A obtenait ces informations de la part des policiers et des douaniers « en leur promettant d'accélérer leurs procédures de visa ». Plusieurs personnes sont poursuivies dans cette affaire jugée par le tribunal criminel de Dar El-Beida dans la banlieue est d'Alger. L'accusé Z. A a nié les faits qui lui sont reprochés, évoquant des « discussions amicales » avec K. B au sein de son logement de fonction à l'ambassade. « On n'a même pas pu tout télécharger de ton téléphone tellement il y avait de données », lui a rétorqué le juge. Il a été condamné, mercredi 11 novembre à sept ans de prison ferme ainsi que son ami le policier de l'aéroport. Un cadre des Douanes a été condamné, lui, à trois ans ferme, alors qu'un stagiaire de l'aéroport a écopé de 18 ans. Deux ex-officiers de la police ont été acquittés.