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Covid: l'alerte de l'Institut Pasteur sur une 4e vague à l'automne

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Mardi, 29 juin 2021

Covid: l'alerte de l'Institut Pasteur sur une 4e vague à l'automne

Malgré les chiffres encourageants en France, nous n'en avons pas fini avec le coronavirus. Mais le vaccin et des mesures ciblées pourraient empêcher une saturation hospitalière.

Face à la décrue observée à l'hôpital, l'institut Pasteur se montre plus  optimiste pour cet été | LCI

SCIENCE - Tout va bien, mais jusqu’à quand? Il faut remonter au mois d’août 2020 pour trouver des chiffres de l’épidémie de Covid-19 en France aussi positifs qu’aujourd’hui. Pourtant, croire que nous en avons fini avec le coronavirus serait une grave erreur. Dans une étude publiée ce mardi 29 juin, l’Institut Pasteur a justement tenté d’imaginer ce qui pourrait se passer à l’automne prochain, avec le retour du mauvais temps qui sied si bien à la propagation du virus.

Et malheureusement, les modèles ne sont pas spécialement optimistes, même en prenant comme hypothèse une population vaccinée dans les proportions visées par le gouvernement et un variant Delta (ou autre) dont la contamination serait moindre que redoutée. Dans ces conditions, les hôpitaux pourraient être touchés par une vague de malades aussi importante que celle de novembre 2020, si aucune mesure de contrôle n’est mise en œuvre. Des perspectives bien moins optimistes que les scénarios de l’Institut Pasteur, qui évoquaient en mai un été sans nuage.

Comment est-ce possible, malgré l’avancée de la vaccination? Si les injections protègent énormément, le vaccin n’est pas parfait et, surtout, tout le monde ne sera pas vacciné. “Les non-vaccinés contribuent 12 fois plus que les vaccinés à la transmission du virus”, notent les chercheurs pour expliquer qu’une nouvelle vague pourrait avoir lieu. 

Une vague différente, mais pas moins grande

Cela peut sembler étrange au premier abord de se dire que dans plusieurs mois, les hôpitaux pourraient à nouveau voir arriver des milliers de malades du Covid-19 chaque jour. Pour bien comprendre, “il suffit de se replonger dans la première vague [de mars 2020], où nous avons eu environ 3% de la population fragile infectée par le coronavirus, ce qui a suffi à créer une vague”, rappelle au HuffPost Simon Cauchemez, modélisateur pour l’Institut Pasteur et co-auteur de l’étude.

Or, toute la population française n’est pas vaccinée à l’heure actuelle : seuls 32,2% des Français ont actuellement reçu leurs deux doses. Et le nombre de nouvelles injections chute jour après jour.

Dans leur étude, les chercheurs ont fait l’hypothèse que 90% des plus de 60 ans seront vaccinés à l’automne. “Mais même dans ce cas, 10% de la population âgée et à risque reste non-vaccinée : soit trois fois plus que les personnes âgées touchées par le Covid-19 lors de la première vague”, explique Simon Cauchemez.

Or, si aucune mesure n’est prise pour freiner à nouveau l’épidémie, elle ne s’éteindra qu’une fois un certain seuil d’immunité collective atteint. Et si nous ne l’atteignons pas via le vaccin, ce sera via les contaminations : avec les conséquences sanitaires qui en découlent pour les non-vaccinés.

La situation pourrait cependant conduire à une vague épidémique différente de ce que nous avons connu jusqu’ici en France. Dans le scénario de base de l’étude de l’Institut Pasteur (90% des personnes âgées vaccinées, 70% des adultes de moins de 60 ans et 30% des adolescents), il y a plus de jeunes hospitalisées que dans les précédentes vagues de 2020 : ils pourraient représenter 40% des cas contre 25% par le passé.

Ce qui conduirait à une situation différente en termes de mortalité - même si le modèle de l’Institut ne l’étudie pas en détail. “Dans le modèle, il y a plus de jeunes hospitalisés, qui survivent mieux, donc une mortalité plus faible. Mais la pression hospitalière serait toujours là”, rappelle Simon Cauchemez. “Et comme les plus âgés ne vont pas forcément en réanimation, il n’est pas certain que la vague serait moins importante”. 

Le pouvoir des vaccins et des mesures ciblées

Si ce scénario n’est pas très réjouissant, Simon Cauchemez voit le verre à moitié plein. “Ce qui m’a intéressé dans cette étude, ce n’est pas la hauteur maximale du pic, c’est surtout d’avoir une réflexion sur comment le vaccin change la donne”, nous explique-t-il.

Car derrière ce scénario de base où aucune mesure n’est prise pour freiner l’épidémie (retours des restrictions, couvre-feu...), les chercheurs se sont demandé comment réduire cette possible vague épidémique. Et la réponse est claire: notre meilleure arme est la vaccination.

Les chercheurs ont ainsi étudié les effets qu’aurait une campagne d’autotests (avec la moitié de la population non vaccinée testée chaque semaine) : elle réduirait la vague hospitalière de 27%. En comparaison, réussir à vacciner la moitié des non-vaccinés d’ici à l’automne ferait selon eux s’effondrer la vague de 89%. Et le tout pour un coût économique cinq fois plus faible. Même vacciner 25% des non-vaccinés serait plus efficace que ces campagnes de tests à grande échelle.

L’autre enseignement de cette étude est l’impact des non-vaccinés sur l’épidémie. Le risque d’infection, de transmission et d’hospitalisation est bien plus élevé que pour les personnes vaccinées, et ce pour tous les âges.

Logiquement, s’il faut prendre des mesures pour limiter la propagation du virus, on se rend compte qu’il est presque aussi efficace de ne cibler que les non-vaccinés. “Ce modèle pose la question: s’il y a une reprise, doit-on demander à tous de respecter de nouvelles contraintes, ou doit-on aller vers des stratégies ciblées sur les non-vaccinés?, s’interroge Simon Cauchemez. “Cela pose des questions éthiques et sociales, surtout quand l’on sait que l’accès au vaccin dépend de paramètres socio-économiques”.

Le graphique ci-dessous montre effectivement qu’il est quasiment inutile de cibler les vaccinés avec des mesures visant à réduire le nombre de contacts pour faire baisser la circulation du virus. Mais une telle inégalité de traitement ne manquerait pas de faire débat.

L’autre point intéressant de ce graphique, c’est que même une réduction de 10 ou 20% de la transmission du coronavirus suffit pour endiguer une vague hospitalière. “C’est en cela que le vaccin change la donne: de petites réductions peuvent fortement impacter la taille du pic hospitalier. À titre de comparaison, les précédents confinements impliquaient des réductions de 70 à 80%”, rappelle Simon Cauchemez.

Évidemment, ces scénarios ne sont pas des prédictions. “La stratégie tester-tracer-isoler ne va certainement pas s’arrêter, ce qui devrait diminuer la transmission”, rappelle le modélisateur. La vague pourrait donc être bien moindre. Les choses pourraient aussi être pires: la contagiosité du variant Delta n’est pas encore claire. Et d’autres variants pourraient encore piper les dés.

Le futur n’est pas écrit, mais ces scénarios permettent de se préparer au champ des possibles. Et il est clair que plus nous serons vaccinés, moins l’automne sera risqué en terme de saturations hospitalières.

Aprnews avec Huffingtonpost