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Côte d'Ivoire : les législatives décryptées

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Vendredi, 26 février 2021

Côte d'Ivoire : les législatives décryptées

Le 6 mars prochain les électeurs ivoiriens sont appelés aux urnes pour élire leurs députés. Le point au moment où s’ouvre la campagne.

Alors que s'ouvre ce vendredi la campagne pour les legislatives du 6 mars, les candidats peuvent enfin deployer les affiches de campagne. Ici celle du Rassemblement des houphouetistes pour la democratie et la paix (RHDP) dans le quartier de Cocody, a Abidjan.<br />

Conformément au décret fixant la durée de la campagne électorale pour l'élection des députés à l'Assemblée nationale, la campagne électorale s'ouvre ce vendredi 26 février 2021 à 0 heure et prend fin le jeudi 4 mars 2021 à minuit », a annoncé le président de la Commission électorale indépendante (CEI), Ibrahime-Kuibiert Coulibaly. Ce scrutin intervient quatre mois après une présidentielle contestée dont la campagne avait été marquée par des violences.

L'opposition qui avait boycotté la présidentielle en appelant à la « désobéissance civile » a cette fois décidé de participer à ce scrutin législatif pour renouveler l'Assemblée nationale actuellement dominée par le parti au pouvoir. Ce nouveau rendez-vous électoral doit aboutir à l'élection de 255 députés de 205 circonscriptions électorales sur l'ensemble du territoire national.

Quels sont les partis sur la ligne de départ ?

Fait marquant pour la première fois depuis dix ans, la branche du Front populaire ivoirien (FPI) de l'ancien président Laurent Gbagbo présentera des candidats sous la bannière d'une coalition de partis appelée Ensemble pour la démocratie et la souveraineté (EDS). Ce groupement a noué une alliance électorale avec le plus grand parti d'opposition, le Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI), de l'ancien président Henri Konan Bédié qui, aux dernières législatives de décembre 2016, était allié au Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP, au pouvoir). Ensemble, ils avaient alors obtenu la majorité absolue avec 167 sièges sur 255.

Aujourd'hui, Henri Konan Bédié entend conquérir avec Laurent Gbagbo la majorité pour « éviter la consolidation d'un pouvoir absolu dans notre pays » et « réconcilier les Ivoiriens ». Plus tôt cette semaine, il a appelé à voter « massivement ». « Le président Gbagbo et moi-même appelons solennellement » tous les Ivoiriens « épris de fraternité et de démocratie à participer aux élections législatives », et ce « massivement », a-t-il déclaré dans un message lu à la presse à son domicile d'Abidjan. Les deux hommes n'ont pas reconnu la réélection en octobre 2020 du président Alassane Ouattara à un troisième mandat controversé, ils ont néanmoins décidé de participer aux législatives.

En face, la machine électorale du RHDP est déjà en branle. Le président ivoirien Alassane Ouattara s'est déclaré confiant dans une « victoire éclatante » de son parti aux élections. « Nous devons relever le défi et nous donner une large majorité à l'Assemblée nationale où nous sommes déjà majoritaires », a déclaré le président lors d'une cérémonie d'investiture à Abidjan des candidats de son parti, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP).

Il a encouragé les candidats RHDP « à continuer de parler de ce que nous avons fait et continuer d'améliorer le sort de nos concitoyens ». « Notre bilan parle pour nous », a-t-il affirmé, citant notamment la hausse des revenus, des salles de classe, l'amélioration du système de santé et l'électrification du pays dont l'objectif est d'atteindre les « 100 % » en cinq ans. Il a également encouragé les candidats de son parti « à ne pas donner suite aux provocations ». « Les paroles de division et de haine n'ont pas de place dans notre campagne », a déclaré le chef de l'État.

Pourtant pour le RHDP, un grand absent pourrait manquer à l'appel. Le Premier ministre Hamed Bakayoko, 55 ans, en France depuis une semaine pour « raisons médicales », est candidat dans son fief de Séguéla dans le nord du pays. « J'aurais voulu qu'il soit à nos côtés pour qu'ensemble, lui et moi, nous lancions cette campagne », a déclaré à l'AFP Adama Bictogo, directeur exécutif du parti au pouvoir.

Pourquoi le retour de Laurent Gbagbo est-il tant attendu ?

La campagne qui s'achèvera le 4 mars s'ouvre alors que ses partisans attendent avec impatience le retour en Côte d'Ivoire de Laurent Gbagbo, annoncé par son parti « mi-mars ». Arrêté en avril 2011 après une violente crise post-électorale ayant fait quelque 3 000 morts, il avait été transféré à la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye pour y être jugé pour crimes contre l'humanité. Acquitté en janvier 2019, il vit depuis à Bruxelles dans l'attente d'un éventuel appel de la procureure de la CPI, Fatou Bensouda. La CPI a autorisé Laurent Gbagbo à quitter la Belgique si le pays où il souhaite se rendre accepte de le recevoir. Alassane Ouattara a assuré à plusieurs reprises qu'il était favorable à ce retour qui se fait cependant toujours attendre. Comment le RHDP se mobilise-t-il ?

Dans quel contexte vont se tenir ces élections ?

La participation du FPI pro-Gbagbo et du PDCI fait suite à une amorce de dialogue entre Henri Konan Bédié et le président Alassane Ouattara, ainsi qu'à des gestes d'apaisement du pouvoir, dont la libération conditionnelle de plusieurs opposants arrêtés après la présidentielle du 31 octobre 2020.

Cette élection avait été largement remportée par le président Ouattara, dont la victoire a été contestée par l'opposition qui juge anticonstitutionnel son 3e mandat. Les violences électorales liées à cette présidentielle ont fait 87 morts et près de 500 blessés. Ces violences hantent encore les esprits et des appels à des législatives pacifiques sont lancés par tous les partis.

Pourquoi les femmes sont-elles si peu présentes ?

Alors qu'une loi adoptée en 2019 impose aux partis politiques de présenter 30 % de femmes aux législatives, à l'approche des élections, le compte n'y est pas. Il faut savoir qu'aujourd'hui déjà seuls 11 % des députés ivoiriens sont des femmes. Le pays fait moins bien que ces voisins du Togo (19 %) ou du Sénégal (43 %). « Les listes de candidatures de l'ensemble des formations et coalitions politiques ne satisfont pas au quota de 30 % tel que prévu par la loi 2019-870 du 14 octobre », a constaté avec amertume le Conseil national des droits de l'homme (CNDH). Cette structure s'est lancée dans le coaching pour accompagner les femmes candidates et plusieurs d'entre elles se sont mobilisées sur le terrain pour faire évoluer les mentalités.