La Côte d’Ivoire est orientée vers l’élection présidentielle d’octobre 2020. A trois mois de cette consultation électorale, l’horizon s’obscurcit, la question de la candidature d'Alassane Ouattara est plus que jamais présente dans tous les esprits en Côte d’Ivoire.

Alassane Ouattara briguera-t-il un troisième mandat ou sortira-t-il par la grande porte ?

La possible candidature de Ouattara

« Tout est bouclé, calé et géré », avait lancé le Rassemblement des Houphouétistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP), qui comptait sur le dauphin fidèle Amadou Gon Coulibaly pour espérer maintenir le pouvoir d’Etat en Côte d’Ivoire.

Cependant, voilà qu’à trois mois du scrutin présidentiel, les données ont changé. Le candidat désigné, avec fierté par le président du parti Alassane Ouattara, est brutalement décédé le mercredi 8 juillet 2020, après le Conseil des ministres.

Le RHDP se trouve désormais ‘’orphelin’’, sans candidat pour l’échéance présidentielle, la plus grande confrontation électorale en Côte d’Ivoire. Que faire face à une telle situation sachant qu’il a fallu au moins une année pour ‘’imposer’’ l’image de Gon dans l’esprit des militants et autres sympathisants (confère les propos du directeur exécutif du RHDP, Adama Bictogo au soir de la disparition de Gon). Un coup dur pour le parti au pouvoir, pourrait-on dire avec aisance. Alassane Ouattra est déboussolé. 

Qui pour défendre les couleurs du parti ? Qui sera le candidat du pouvoir à l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire ? Le décès d’Amadou Gon Coulibay, Premier ministre et dauphin d’Alassane Ouattara bouleverse la stratégie mise en place par le Chef de l’État jusqu’à présent.

Alassane Ouattara dos au mur

C’est dans ce contexte que la candidature d’Alassane Ouattara est suscitée par certains cadres et militants de son parti. Une pétition a même été lancée afin de recueillir des signatures dans ce sens. Bref, Alassane Ouattara se retrouve le dos au mur. Car, ni Patrick Achi, ni Hamed Bakayoko, qui reviennent souvent sur les lèvres, ne rencontrent l’assentiment de la base, à en croire Adama Bictogo. Alassane Ouattara apparaît du coup, comme le seul pion capable de fédérer toutes les forces vives de son parti, le RHDP.

Cette possibilité est évoquée de plus en plus par certains observateurs de la scène politique en Côte d’Ivoire. L’artiste chanteur Tiken Jah Fakoly a même abondé dans ce sens lors de sa récente sortie : Alassane Ouattara est dos au mur. « Je pense que le Président Ouattara est dos au mur aujourd’hui, parce que quand vous êtes à trois mois de l’élection présidentielle, votre candidat, votre dauphin choisi, meurt brutalement, c’est vrai qu’il y a l’intérêt national qui est en jeu, mais il y a aussi l’intérêt de sa famille politique », avait déclaré l’artiste. Ouattara avait pourtant déclaré qu’il ne serait pas candidat à sa propre succession.

Ouattara Face à l'histoire

Le Chef de l’Etat ivoirien se retrouve sous le coup du destin, face à l’histoire. Il avait pourtant déclaré haut et fort qu’il ne serait pas candidat à sa propre succession. Nous étions au 5 mars 2020 et Alassane Ouattara faisait face aux parlementaires réunis en Congrès. « Je voudrais vous annoncer solennellement que j’ai décidé de ne pas être candidat à l’élection présidentielle du 31 octobre 2020 », avait-il dit avec foi et conviction.

Aujourd’hui, Alassane Ouattara va-t-il renier sa parole et se renier lui-même ; lui que ses partisans appellent avec fierté ‘’homme de parole’’, ‘’celui qui dit et qui fait’’ ? Ouattara est véritablement coincé. D’une part, il est confronté à certains de ses militants qui souhaitent le voir enfiler le manteau de candidat et de l’autre côté, il est face à la voix de la jeunesse, de certains cadres, voir des militants moins radicaux, qui souhaitent qu’il se retire afin de rentrer dans l’histoire par la grande porte.

Le respect de sa parole donnée solennellement le 5 mars 2020 ne vaut-il pas plus grand que les intérêts de quelques personnes au sein du RHDP?

Le choix de son parti ou de la Côte d'Ivoire

Aujourd’hui, le chef de l’Etat doit choisir entre son parti le RHDP ou l’avenir de la Côte d’Ivoire. Pour la Ligue Panafricaine pour l’Éveil des Consciences (LIPEC), structure de la société civile regroupant plusieurs jeunes intellectuels ivoiriens, le chef de l’Etat gagnerait à faire le choix de la Côte d’Ivoire.

Alassane Ouattara aura le mérite d’être le premier Président de la République sous le règne de qui, le Président sortant a passé le témoin à son successeur en Côte d’Ivoire. Il rentrera ainsi dans l’histoire de la plus belle des manières, même si son accession à la magistrature suprême en 2011 ne s’est pas faite dans les règles de l’art. La fin d’une chose vaut mieux que son commencement, a-t-on pour habitude de dire. Ouattara pourrait donc organiser une primaire en vue de sortir le candidat de la base et préserver tous les acquis obtenus de haute lutte jusqu’à ce jour.

Aujourd’hui donc, la question reste à savoir si le Chef de l’Etat décidera de briguer un troisième mandat, avec tous les risques que cette décision pourrait entrainer du point de vue constitutionnel, seulement pour préserver le pouvoir au profit de son parti, ou si Alassane Ouattara décidera de faire le choix de la Côte d’Ivoire.

Au débat de la légitimité constitutionnelle de la candidature de Ouattara, s’ajoutent les griefs autour de la commission Electorale Indépendante (CEI) et la position tranchée des différents partis de l’opposition, ainsi que celle des ivoiriens qui estiment que le Chef de l’Etat a déjà fait ses deux mandats. Une candidature pour un troisième mandat pourrait ainsi réactiver les passions et déclencher de nouvelles tensions.

En attendant la décision officielle d’Alassane Ouattara, qui n’est plus qu’une question de temps, notons que la date limite du dépôt des candidatures est fixée au 31 août prochain.

La rédaction APRNews

Sain Laurent Yapi