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Complément alimentaire : Ce qu'il faut savoir avant d'en prendre

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Vendredi, 20 avril 2018

Complément alimentaire : Ce qu'il faut savoir avant d'en prendre

LEXPRESS- Être en meilleure forme, avoir de beaux cheveux, améliorer les défenses naturelles... A quoi servent les compléments alimentaires? Comportent-ils des risques pour la santé? L'Express Styles fait le point.

En France, d'après les données de l'étude NutriNet-Santé, 15% des hommes et 28% des femmes prennent des compléments alimentaires au moins trois jours par semaine. La consommation de ces gélules, capsules et autres ampoules est donc loin d'être négligeable. Pour autant, est-ce vraiment utile pour la santé? Comment les utiliser et quelles précautions prendre?  

Qu'est-ce qu'un complément alimentaire?

Selon la définition légale, il s'agit de "denrées alimentaires dont le but est de compléter le régime alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de nutriments ou d'autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique, seuls ou combinés". Vendus sans ordonnance, sous la forme de gélules, pastilles, comprimés, ampoules ou encore sachets de poudre, les compléments alimentaires se prennent par voie orale. 

Malgré certaines ressemblances -commercialisation sous forme de doses, à la pharmacie-, ces produits ne sont pas des médicaments, et ne peuvent pas revendiquer d'effet thérapeutique. D'ailleurs, ils dépendent du code de la consommation: la Direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) reçoit les déclarations de mise sur le marché et effectue des contrôles, comme elle le fait pour les autres denrées alimentaires. 

De quoi sont-ils composés?

Les compléments alimentaires peuvent contenir des nutriments (vitamines, minéraux), des substances à but physiologique (comme les probiotiques par exemple), des plantes (vigne rouge, bourrache...) ou encore des champignons, mais aussi des additifs ou des arômes. La loi liste les composants autorisés en France et/ou en Europe.  

Les boîtes doivent mentionner certaines indications obligatoires, comme le nom des catégories de nutriments, la portion journalière recommandée, et divers avertissements, notamment pour éviter que les compléments alimentaires se substituent à une alimentation équilibrée. Certaines allégations santé sont autorisées, sur le bien-être ou le maintien de la bonne santé par exemple.  

A quoi servent les compléments alimentaires?

"Pour une très grande part de la population, le bon usage d'une alimentation variée et équilibrée suffit à apporter tous les nutriments nécessaires à la santé", affirme Marie-Paule Vasson, professeur et directrice du Laboratoire Inra de biochimie, biologie moléculaire et nutrition à l'Université d'Auvergne. Mais alors, à quoi servent les compléments alimentaires? Ils "peuvent avoir un intérêt dans des situations particulières, pour des groupes de populations susceptibles d'avoir un déficit nutritionnel, par exemple en lien avec le vieillissement, avec des régimes alimentaires restrictifs ou déséquilibrés (exclusion de certains aliments) ou en cas d'addiction". 

En bref, ces produits sont souvent conseillés en cas de carence avérée ou de risque de carence. Florence Foucaut, diététicienne à Paris et membre de l'AFDN (Association française des diététiciens et nutritionnistes), explique que pour repérer cela, "on observe les symptômes, on fait une enquête alimentaire et une prise de sang". Mais elle souligne qu'il est possible, dans certains cas, de régler le problème simplement par un rééquilibrage alimentaire. 

Que disent les études?

En réalité, "très peu d'études ont été réalisées chez l'homme dans des conditions réelles d'utilisation", souligne Marie-Paule Vasson. Et de préciser d'ailleurs qu'"il n'y a pas d'obligation de faire des études cliniques avant de mettre en vente un complément alimentaire, sauf en cas d'utilisation d'un nouvel ingrédient jamais autorisé". 

Quels sont ceux ayant des bénéfices scientifiquement prouvés? Mathilde Touvier, chercheuse à l'Inserm en épidémiologie de la nutrition, cite par exemple "la vitamine B9, ou acide folique, utile lorsque l'on souhaite tomber enceinte, car elle permet d'éviter des malformations en début de grossesse". Et, en cas de carence diagnostiquée, on sait que la complémentation aide à retrouver ou maintenir des niveaux normaux. Par exemple, du fer pour les femmes ayant des règles abondantes, de la vitamine B12 pour les végétaliens, de la vitamine D pour les enfants en pleine croissance et les personnes ayant un risque d'ostéoporose. 

Au contraire, certains effets nocifs sont avérés. Les personnes ayant ou ayant eu un cancer hormono-dépendant ne doivent pas consommer de compléments à base de phytoestrogènes, car un lien avec la prolifération des cellules cancéreuses a été observé. Autre exemple, chez les fumeurs, le bétacarotène à forte dose n'a plus d'effet antioxydant, mais augmente au contraire l'incidence de cancer du poumon.  

Mathilde Touvier souligne qu'au final, pour un très grand nombre de compléments alimentaires, nous avons beaucoup de résultats contradictoires. "Ce grand flou amène à la prudence", déclare la chercheuse. Surtout lorsque l'on sait que "les compléments alimentaires ne sont pas nécessaires pour couvrir les besoins lorsque l'on est dans la population générale. Une alimentation équilibrée suffit". Et c'est souvent plus efficace! Par exemple, "l'oméga 3 en capsules est moins bien absorbé que celui des sardines", souligne Florence Foucaut. 

Quels sont les risques?
L'Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail) a mis en place un dispositif de nutrivigilance pour identifier les éventuels effets indésirables des produits. Sur les 1500 signalements décomptés fin 2014, 76% sont liés à la consommation de compléments alimentaires.  

En plus de ces potentiels effets indésirables, il y un risque de surdosage, de compétition -trop d'un minéral peut ainsi freiner l'absorption d'un autre- ou encore d'interactions négatives avec des médicaments. Par exemple, le millepertuis interagit avec de nombreuses familles de médicaments. 

Capsules et gélules: un risque pour la santé?

Les compléments alimentaires capillaires ont plus un effet sur la qualité du cheveu que sur la pousse.Les compléments alimentaires capillaires ont plus un effet sur la qualité du cheveu que sur la pousse.Getty Images/David Malan
Le contenant est souvent fabriqué en gélatine, dont le processus de production est aujourd'hui très réglementé. Toutefois, d'après Marie-Paule Vasson, "a priori, il y a peu de risques concernant la nature des contenants, similaires à ceux de l'industrie pharmaceutique". Cependant, "certaines précautions sont à respecter selon la nature des ingrédients: par exemple, les acides gras polyinsaturés sont sensibles à la lumière, aussi leurs contenants doivent être colorés". 

Quelles précautions prendre avant d'en prendre?

L'Anses recommande "d'éviter des prises prolongées, répétées ou multiples au cours de l'année de compléments alimentaires sans s'entourer des conseils d'un professionnel de santé". Mieux vaut lire attentivement les étiquettes, respecter les précautions d'emploi, et consulter dans tous les cas un médecin, un diététicien ou un pharmacien. En cas d'effet indésirable, il faut aussi se tourner vers un professionnel, qui les signalera à l'Anses.  

Il est également conseillé d'acheter les compléments alimentaires en pharmacie, et non pas sur d'obscurs sites Internet étrangers, qui proposent potentiellement des substances interdites par la législation française.  

Enfin, comme le souligne la diététicienne Florence Foucaut, "l'apport journalier en vitamine C, c'est 110mg, soit un ou deux fruits crus. Il vaut donc mieux opter pour des fruits, qui sont moins chers et contiennent en outre des fibres". D'une manière générale, mieux vaut réserver la consommation de compléments à des situations particulières de déficit avéré, et plutôt miser sur une alimentation équilibrée dans la vie de tous les jours.