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Candidature de Ouattara : Pr Francis Akindès, "Il n'y avait pas de schéma alternatif "

Aprnews - Pr Francis Akindès, "Il n'y avait pas de schéma alternatif " - Actualite - Abidjan - Cote d'Ivoire
Vendredi, 7 août 2020

Candidature de Ouattara : Pr Francis Akindès, "Il n'y avait pas de schéma alternatif "

Dans une interview accordée à RFI, ce vendredi 7 août 2020, Francis Akindès, Professeur bénino-ivoirien de sociologie à l’université Alassane Ouattara (Bouaké, Côte d'Ivoire), a commenté la décision de Ouattara d'être candidat à la présidentielle du 31 octobre 2020.

Pour le sociologue, le président Ouattara n'avait pas d'autre choix que de se plier, à son corps défendant, à la volonté de ses militants, du Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix (Rhdp). En dépit de la parole publiquement donnée le 5 mars 2020, à Yamoussoukro, de ne pas briguer un 3e mandat. Interview. 

 La candidature d'Alassane Ouattara n'est pas une surprise ?

Absolument pas, tout indiquait qu'Alassane Ouattara allait vers cette décision tout simplement parce que la pression au sein de son parti, le Rhdp était très forte.
Il y a qu'à voir ce que fut la réaction des militants du Rhdp qui étaient déçus par sa non réponse aux sollicitations pour sa candidature au Conseil politique qui eu lieu il y'a à peine 7 jours.

Il n'y avait donc personne d'autre que lui pour réprendre le flambeau ?

Alors son argumentaire a été très intéressant, il dit ceci:  «Que le décès de Amadou Gon Coulibaly, laisse un vide» 
Ça veut dire qu'il n'y avait pas de schéma alternatif, c'est évident que s'il tente de sortir d'autres candidats de ses rangs trois mois avant les élections, le parti volait en éclats quand on connait la structure du Rhdp, il est difficile d'imaginer une alternative à ce mandat.

Et je pense qu'en tant qu'homme d'État, il a besoin d'un appareil politique et cette décision là s'explique également par la volonté de préserver son appareil politique qui est en fait, son arrière base politique.
Et Alassane Ouattara considère son bilan comme inattaquable, comment vous, vous déssineriez ce bilan?

On peut pas nier au gouvernement d'Alassane Ouattara de n'avoir pas transformer un ensemble de choses mais en insistant à un moment donné sur le programme d'actions prioritaires et sur la question de l'emploi des jeunes, c'est une façon subtile de reconnaître que s'était quand même une limite de sa politique et qu'il entend corriger.

Dans cette élection, les oppositions de personnes ont-elles remplacées les débats d'idées ?

Nous allons vivre le dernier round de cette génération politique. Les figures de 2010 qui sont encore anciennes et là les choix portent beaucoup plus sur les figures que sur les idées mais je vous assure, c'est le dernier round de cette génération politique d'ailleurs, vous voyez dans la vie politique ivoirienne on parle beaucoup de génération et la génération dont on parle, elle a 60 ans.
Il y a l'avenir de toute une génération politique qui a été hypothéquée pendant un certain temps il va falloir libérer cette génération politique.

Et pourquoi ce renouvellement de la classe politique est si difficile en Côte d'Ivoire ?

Parce qu'on a encore les reliques de l'ère Houphouëtiste, que ce soit ceux qui ont collaboré avec Houphouët Boigny ou ceux qui s'étaient positionnés comme les opposants d'Houphouët Boigny.
Il y a eu une culture politique qui habite cette classe et qui a du mal à mourir et justement les élections à venir vont consacrer la mort de cette manière de faire la politique et on espère que la nouvelle génération ne va pas retenter de la reconduire.

Et la question de la légalité ou de l'illégalité d'un éventuel troisième mandat va évidemment se poser dans les prochains jours, ne risque-t-elle pas de raviver des tensions ?

Évidemment, la question effectivement de la légalité du troisième mandat est que le Challenger de Monsieur Ouattara a déjà commencé à dénoncer, je veux parler du président Henri Konan Bédié, mais ça relève de la mission de la Cours constitutionnelle de délibérer sur cette question.
Est ce qu'on est pas face à une révision constitutionnelle? Où on est face à une adoption?
J'ai le sentiment qu'on parle beaucoup de troisième République, alors la Cours constitutionnelle nous dira si ce troisième mandat est illégal ou pas.

La société ivoirienne est-elle suffisamment résiliente pour éviter que ces tensions ne dégénèrent ?

 Il y a dans la mémoire collective, les mauvais souvenirs de l'élection des années 2010 et tout récemment de 2018. Absolument les gens ne souhaitent pas revivre ces moments. Alors tout tient dans la capacité à organiser des élections transparentes, donc ça c'est le rôle de la CEI,de garantir la transparence des élections, de rassurer par exemple les militants, notamment les partisans par exemple de l'ex-président Laurent Gbagbo qui ne comprennent pas pourquoi le nom de leur champion a disparu de la liste électorale.

Le 5 mars, Alassane Ouattara a annoncé qu'il ne se représentait pas pour l'élection présidentielle du 31 octobre prochain, comment va-t-il pouvoir faire accepter le fait qu'il renie sa parole ?

Tout son argumentaire c'est de montrer qu'il était sur le départ, quand cet événement inattendu est venu remettre en cause le schéma initial.
Maintenant ses adversaires vont l'attaquer sur cette question, ce qui explique d'ailleurs le fait que monsieur Henri Konan Bédié commence déjà par contester ce troisième mandat, en tout cas ça va faire couler beaucoup d'encre et de salive dans les jours à venir.

Interview retranscrite par Mathieu Blade