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Benoît XVI accusé d’avoir fermé les yeux sur des abus sexuels

Benoit XVI - Accusation - Pedocriminalité
Vendredi, 21 janvier 2022

Benoît XVI accusé d’avoir fermé les yeux sur des abus sexuels

Un rapport publié ce jeudi 20 janvier accuse le pape émérite Benoît XVI d’avoir fermé les yeux sur les comportements de quatre prêtres pédocriminels, quand il était lui-même cardinal. Pour la Süddeutsche Zeitung, ce “désintérêt chronique vis-à-vis des victimes est extrêmement choquant”

Le pape émérite Benoît XVI est sévèrement mis en cause dans un rapport indépendant, présenté jeudi 20 janvier en Allemagne, sur des agressions sexuelles sur mineurs dans l’archevêché de Munich et de Freising, qu’il a dirigé entre 1977 et 1982. Le cardinal allemand Joseph Aloisius Ratzinger – son nom avant qu’il ne devienne pape – n’a rien entrepris pour écarter quatre ecclésiastiques soupçonnés d’actes pédocriminels, ont affirmé les avocats du cabinet Westpfahl Spilker Wastl dans ce rapport.

Après le rapport allemand sur la pédophilie, Benoît XVI exprime « son choc  et sa honte »

Après la publication de ce rapport, Benoît XVI a exprimé, jeudi, « son choc et sa honte », selon son porte-parole. Le pape émérite allemand de 94 ans, qui « n’avait pas eu connaissance du rapport » et « l’examinera dans les prochains jours »« exprime sa proximité personnelle et sa prière pour toutes les victimes », selon un communiqué de son secrétaire particulier, l’archevêque Georg Gänswein, transmis à l’agence Vatican News.

Dans une réaction transmise aux avocats de ce rapport mandaté par l’Eglise, le pape émérite rejette par ailleurs « strictement » toute responsabilité : une position que les auteurs du rapport ne jugent « pas crédible », a déclaré lors d’une conférence de presse l’avocat Martin Pusch.

Dans deux cas, il s’agissait de membres du clergé qui avaient commis plusieurs agressions attestées, y compris par des tribunaux, a souligné Martin Pusch. Les deux prêtres sont restés au sein de l’Eglise et rien n’a été entrepris, a-t-il accusé.

Les experts se sont dits convaincus que Joseph Ratzinger était au courant du passé pédocriminel du prêtre Peter Hullermann, arrivé en 1980 de Rhénanie-du-Nord-Westphalie en Bavière, où il a poursuivi des sévices pendant des décennies sans être inquiété. En 1986, un tribunal l’avait condamné à une peine de prison avec sursis. Il a alors été transféré dans une autre ville bavaroise. En 2010, ce prêtre avait été contraint à la retraite.

Joseph Ratzinger a nié avoir connu le passé de ce prêtre, dont le cas avait fait les gros titres en 2010, lors du pontificat de Benoît XVI.

Révélation sur des abus sexuels sur mineurs commis par un prêtre

« Protéger l’institution Eglise »

Les auteurs du rapport ont également épinglé le cardinal Reinhard Marx, actuel archevêque de Munich et Freising, pour avoir fait preuve de négligence vis-à-vis de soupçons d’agressions sexuelles sur des enfants de la part de deux prêtres. C’est précisément le cardinal Marx qui avait commandité le rapport. Il doit s’exprimer sur ses conclusions dans la journée.

L’avocate Marion Wetspfahl a dénoncé « le phénomène effrayant des dissimulations » systématiques de cas de violences sur mineurs entre 1945 et 2019 – période couverte par le rapport – visant « à protéger l’institution Eglise »« La prise en compte » des victimes « reste insuffisante à de nombreux points de vue, également après 2010 », quand furent révélés les premiers scandales de pédocriminalité dans l’Eglise allemande, a ajouté M. Pusch.

A la suite de la publication de ce rapport, le Vatican a redit jeudi son « sentiment de honte et de remords » pour les violences sexuelles commises par des clercs sur des mineurs. « Le Saint-Siège assure toutes les victimes de sa proximité », a déclaré aux journalistes Matteo Bruni, directeur de la salle de presse du Vatican, précisant que le Vatican allait prendre connaissance du rapport, dont il ne connaît pas encore le contenu.

L’enquête de Munich constitue un nouveau chapitre dans l’élucidation des actes de pédocriminalité qui touchent l’Eglise catholique dans le monde entier. Il y a quatre ans, un rapport a dévoilé qu’au moins 3 677 enfants avaient été victimes d’agressions sexuelles depuis 1946 par plus d’un millier de membres du clergé en Allemagne. La plupart n’ont jamais été sanctionnés. Depuis, chaque diocèse a mandaté des enquêtes locales.

Après des excuses officielles, l’Eglise a fixé un dédommagement – jugé insuffisant par les victimes – pouvant aller jusqu’à 50 000 euros par personne, contre 5 000 euros jusqu’ici.

Reste à savoir quelles conséquences auront ces révélations. L’an passé, l’archevêque de Hambourg Stefan Hesse, mis en cause pour négligence dans le traitement de cas de pédocriminalité au diocèse de Cologne, où il avait officié, avait remis sa démission au pape François, qui l’a refusée. Le cardinal Marx avait lui aussi démissionné en juin pour « partager la responsabilité de la catastrophe des abus sexuels commis ». Là aussi, le pape a décliné.