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Algérie : Une indépendance inestimable

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Lundi, 5 juillet 2021

Algérie : Une indépendance inestimable

L’Algérie fête aujourd’hui son indépendance. Le 5 juillet 1962, après 132 ans de colonisation française, le million et demi de martyrs algériens, et leurs frères de lutte, ont libéré le pays.

Algérie : Une indépendance inestimable - Le Journal de l'Afrique

La révolution algérienne est la guerre d’indépendance, à la fois plus tragique et plus héroïque, de l’histoire coloniale africaine. Pour les Algériens, la date du 5 juillet dénote la marque indélébile de la colonisation française. Durant les 132 ans de contrôle français, l’Algérie a été le théâtre de tant de crimes contre l’humanité, si atroces, que la pensée congrue de tout le peuple algérien en reste marquée, aujourd’hui encore.

Si les Algériens ont beaucoup donné pour se libérer du joug de la France coloniale, ils n’ont aussi jamais pris cet acquis pour argent comptant. L’Algérie réclame encore des excuses de l’Etat français pour la barbarie dont ses colons, ses soldats et ses agents ont fait preuve. Et l’absence d’excuses du pouvoir français, pendant 59 ans, est omniprésente dans la mémoire algérienne.

Cependant, l’Algérie est aussi une terre de héros connus et reconnus. De l’émir Abdelkader et Lalla Fatma, en arrivant à Larbi ben M’hidi, Abande Ramdane et les fils de la Toussaint, tant de combattants ont donné leur vie pour libérer l’Algérie. Il est remarquable toutefois que la totalité absolue des Algériens qui se sont levés contre la colonisation étaient unis sous la même conviction souveraine malgré leurs différences idéologiques. Cette même certitude inébranlable existe encore aujourd’hui. L’unité des Algériens est cette maturité politique qui va au-delà du dogme, et en devient presque philosophique.

La volonté d’un peuple

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De 1830 à 1962, chaque initiative indépendantiste algérienne est née sur le champ de bataille contre les colons. Rappelons aussi que la colonisation française de l’Algérie a été plus violente qu’ailleurs. Entre les camps de concentration, les exécutions massives, l’utilisation d’armes prohibées, la ségrégation raciale etc. la souffrance des algériens a suscité une réaction à la fois politique et intellectuelle.

Toutefois, la lutte anticoloniale algérienne a connu un tournant dans les années 1950. Les mesures répressives de la France à l’encontre de Constantine et de la Kabylie, sur fond des attaques du FLN, ont soulevé tout le pays. Cependant, la division qui se créa entre les chefs de la « guerre d’Algérie » n’a pas changé la résolution des combattants.

Entre 1952 et 1957, l’immixtion de Charles de Gaulle et Mendès France dans le dossier algérien provoque une dissension au sein du FLN. Les deux hommes d’Etat français respectivement partisans de deux régimes coloniaux ambigus, plus politiques ou plus militaires, ne pouvaient toutefois rien changer à la volonté d’indépendance des Algériens. L’armée française s’est engagée dans une guerre totale contre le FLN et les fellagas, et ce qui fut des peines d’emprisonnement a muté en assassinats politiques, torture et d’autres crimes.

La stratégie française en Algérie, l’origine du chaos

La guerre d’indépendance en Algérie a aussi généré beaucoup de rancœur. Que les dirigeants n’ont pas pu juguler. Pour les Français, les accords d’Evian en 1962 étaient supposés assurer un retrait pacifique des colons. Mais les dernières actions de Charles de Gaulle, qui avait renoncé à son projet « d’Algérie française » ont pris trop de temps à être concrétisées. Et au lieu de laisser l’Algérie aux Algériens, lorsque l’occasion se présenta en 1960, la France a tenté de « diviser pour conquérir », pensant pouvoir arrêter l’élan de l’indépendance.

Cette démarche a divisé les Algériens, et la rancœur due au massacre constantinois et au détournement de l’avion du FLN s’est cristallisée durant la bataille d’Alger. Et pendant des mois, le FLN et les escadrons de la mort français (la Main rouge) se sont livrés une guerre urbaine qui a causé beaucoup de morts.

D’un côté, aucun doute ne subsistait sur l’essor de la colonisation française depuis 1956. Surtout depuis l’indépendance du Maroc et de la Tunisie. D’un autre côté, opposer les Algériens aux Algériens était la stratégie de sortie de la France. Par conséquent, une grande majorité d’analystes considèrent que les évènements de 1962, surtout le massacre des Harkis et la confrontation des chefs de la révolution, incombe plus à l’activité subversive des renseignements français (la bleuite) qu’à un simple règlement de compte.

Une indépendance coûteuse

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Le terrorisme de l’Organisation armée secrète (OAS) dans les années 1961 et 1962 a visé tous les Algériens en faveur de l’indépendance. L’OAS a assassiné des centaines d’intellectuels algériens, et commis des vagues d’attentats de large échelle contre les musulmans. Un grand nombre de pieds-noirs a soutenu l’OAS. Et l’amalgame entre ces derniers, les Harkis et les colons a anéanti tout espoir d’une issue pacifique de la guerre d’indépendance.

Ce contexte a été envenimé par les contraintes des accords d’Evian, qui voulaient imposer la continuité de la présence française. Et depuis la déclaration de l’indépendance, la guerre n’a jamais été plus violente. Des milliers d’Algériens sont morts sous les bombardements français, et des milliers de Harkis ont été exécutés par les éléments du FLN. Au total, la colonisation française a causé un million et demi de morts, entre les civils, les maquisards du FLN et les fellagas. Le nombre de Français morts est entre 100 000 et 370 000. Le débat sur le nombre de morts de telle ou telle faction est encore un sujet de débat.

Toutefois, c’est à cause de ce bilan sanglant que les élites algériennes ont rattrapé la spirale des violences dès la fin de la colonisation. Et c’est aussi la raison pour laquelle les rapports entre l’Algérie et la France sont restés insolubles. La guerre mémorielle a provoqué le contexte hostile entre les deux pays depuis. Cependant, si du côté algérien, la guerre de l’indépendance est un facteur fédérateur. Du côté français, la « politique de l’oubli », selon Guy Pervillé, n’a jamais cessé. Les ramifications géopolitiques des crimes français en Algérie continuent encore aujourd’hui. Et dans l’absence d’une réelle volonté de réconciliation, elles régiront très probablement le rapport entre la France et l’Algérie pendant des générations.

Aprnews avec Lejournaldelafrique