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Le Bénin passe au révélateur

Jeudi, 8 avril 2021

Episode 1 : le complexe équilibre entre économie prospère et démocratie

Depuis 2016, le gouvernement en place n’a cessé de marteler qu’il comptait révéler, dès le premier mandat du président Patrice Talon, le Bénin aux yeux du monde.  Au terme de ces 5 années, certaines voix dissidentes critiquent négativement le bilan présidentiel. Dans son camp, on estime qu’il a fait ce qu’il avait promis. L’opposition dénonce, quant à elle, un mandat vide ayant mis à mal les acquis démocratiques. Face à une telle dissonance, le regard neutre d’un observateur objectif s’impose. A la lumière des faits et des chiffres, qu’est ce qui a changé depuis 2016, en bien comme en mal ? Le premier épisode de cette série sera dédié à la démocratie et à l’économie.

Cela a été répété des millions de fois, le mot démocratie vient du latin demos qui signifie peuple et de Kratos qui peut être traduit par règle. De manière simple, la démocratie est censée être un système où la vie publique est régie par le peuple. De cette définition, la plupart des spécialistes tirent 5 critères d’évaluation d’une démocratie. Il s’agit d’abord de la souveraineté du peuple. Ici il s’agit de la tenue d’élections libres. Le second critère est la séparation des pouvoirs, plutôt respectée durant ces 5 dernières années au Bénin. Le critère suivant est l’égalité devant la loi.

Vient ensuite la garantie des libertés fondamentales qui cristallise la colère de l’opposition. Pour elle, le régime en place a installé un climat de censure empêchant citoyens et professionnels de la presse de porter un avis critique sur l’action gouvernementale. Des événements comme l’incapacité à obtenir une licence de la radio Soleil FM, appartenant au désormais opposant Sébastien Ajavon ou encore la détention du journaliste Ignace Sossou pour détournement de faits, semblent donner raison à ceux qui critiquent un recul de certaines libertés. Le dernier principe concerne l’alternance du pouvoir et les élections de 2019 sont un exemple de ce que reproche l’opposition au gouvernement en place. Cela dit, s’il y a de nombreux points à améliorer, il y a de nombreux points de cette situation qui sont dû à la cupidité d’une bonne partie de la classe politique. En 2018, les députés de l’assemblée nationale ont voté la loi introduisant un certain nombre d’obligations dans le jeu politique à quelques mois seulement des législatives de 2019, et qui se sont soldées par une absence d’opposition. Tous les députés opposés au régime en place ont donc entériné leur propre exclusion. De quoi donner foi aux rumeurs selon lesquelles les parlementaires monnayaient leurs votes à l’assemblée, parfois sans même prendre le temps de lire le contenu du texte. Quand on ajoute à ces événements, le fait que certains aspirants ont ouvertement refusé récemment de se conformer aux lois et d’obtenir les parrainages des élus, il est compliqué d’imputer le recul de la démocratie au pouvoir en place. Et le changement provoqué en introduisant notamment le principe de parrainage ou encore la charte des partis politiques, était nécessaire quand on prend en compte le fait que le pays comptait avant la réforme environ 250 partis et régulièrement plusieurs dizaines de candidatures aux élections présidentielles. La démocratie béninoise telle que pratiquée pendant des années était plus proche de l’anarchie que de son objectif premier. Concernant les médias et la dureté du code du numérique, il faut rappeler que de nombreux médias béninois ne disposent pas de licences validant leurs activités et cela permettait à n’importe qui de publier des intox à une population qui, pendant longtemps, prenait pour vérité d’évangile ce qui lui venait des réseaux sociaux et des sites d’informations.

Sur le plan économique, il y a beaucoup moins d’équivoque. Les cinq dernières années ont été très positives pour le Bénin. 

Au cours des quatre premières années du mandat du président Patrice Talon (2016-2019), la croissance économique du pays était de 5,5 % en moyenne, selon les chiffres du FMI. Au cours des cinq années précédentes, elle était en moyenne 4,5%. En février 2021, l’agence de notation Fitch a amélioré les perspectives du pays après l’émission plébiscitée par les investisseurs de son deuxième eurobond. Moody’s, une autre agence de notation, améliorera également la note souveraine du pays, passée de B2 avec des perspectives positives à B1 avec des perspectives stables, suite aux efforts effectués pour améliorer les finances publiques. En 2020, la BAD a classé le Bénin parmi les 10 économies ayant la croissance la plus rapide au monde. Cette même année, le pays est devenu l’un des seuls au monde à maintenir une croissance économique positive (2,3%), malgré la pandémie de Covid-19. De plus, grâce à une stratégie accrue d’assainissement du climat des affaires s’appuyant sur la technologie numérique, le Bénin est devenu le premier pays où la création d’entreprises est la plus rapide dans le monde. L’inflation est en dessous des 3 % exigés par l’UEMOA. L’économie béninoise se porte bien dans une période où toutes les économies de la planète sont mises à rude épreuve, ce qui est loin d’être anodin. On peut dire sans trop de risques que le volet économique est l’une des grandes réussites du mandat présidentiel de Patrice Talon. Il faut également noter que ces résultats ont été obtenus malgré la fermeture de la frontière avec le Nigeria, ce qui montre l’incroyable résilience de l’économie béninoise.

D’une certaine manière, aux niveaux de la démocratie et de l’économie, la méthode Talon s’apparente au modèle rwandais auquel on reproche un recul des libertés pendant que, dans le même temps, les résultats économiques sont proches de l’excellence. Chacun tirera sa conclusion de ces faits. Le prochain épisode de notre série abordera les changements subis par le pays aux niveaux infrastructurel et logistique.