APRNEWS: Sonko et Diomaye Faye devraient être les vainqueurs.
Alors que le Pastef, le parti au pouvoir depuis 7 mois, est le grandissime favori des élections législatives anticipées prévues ce dimanche 17 novembre, les Sénégalais attendent désormais les grands changements pour lesquels le duo Sonko et Diomaye Faye a été porté au pouvoir.
Le Sénégal s’apprête à donner les pleins pouvoirs à Bassirou Diomaye Faye, élu le 29 mars 2024 dernier avec un score de 54,28% des suffrages exprimés lors de la présidentielle qui l’a opposé à son adversaire de l’ancien régime, Amadou Ba, ex-Premier ministre de Macky Sall.
Les élections législatives anticipées prévues ce dimanche 17 novembre dans le pays et qui font suite à la dissolution de l’ancienne Assemblée nationale par le président devraient en effet logiquement conforter l’emprise du Pastef sur la vie politique nationale et ouvrir la voie à un changement de majorité au sein du nouveau parlement.
Le triomphe du duo Sonko-Diomaye Faye devrait même être facile à certains égards, vu l’état dans lequel se retrouve l’opposition après trois semaines de campagne électorale acharnée qui ont étalé ses divisions, ses incohérences et ses peurs. Car outre la transhumance électorale qui est devenue un phénomène consubstantiel à la perte du pouvoir d’Etat en Afrique, les têtes de file des coalitions de l’opposition n’ont en effet jamais su définir une stratégie capable de les maintenir en situation de cohabitation dans la nouvelle assemblée nationale qui va se mettre en place à l’issue du scrutin de dimanche prochain.
Les largesses de l’opposition
Le Pastef qui est resté la seule composante politique cohérente dans le microcosme sénégalais n’espérait certainement pas tant de largesses et a dû être surpris par le choix fait par l’ancien président de la République Macky Sall de ne pas rentrer au Sénégal et de rester au Maroc pour battre campagne sur les réseaux sociaux.
Bien sûr, la détermination du parti au pouvoir à sceller le sort des hiérarques qui ont servi l’ancien régime coupables, à ses yeux, de tous les malheurs du Sénégal, a dû compter dans cette décision pour le moins irrationnelle prise par l’homme qui a régné sur le Sénégal pendant douze années dont les trois dernières consacrées à la répression de ses adversaires politiques. Mais Macky Sall n’avait pas hésité à mettre fin à sa retraite dorée dans la capitale française, à la tête du Pacte de Paris pour les Peuples et la Planète (4P) pour prendre celle de la liste Walu Taku, l’une des coalitions de l’opposition qui comptait contrarier le régime du Pastef à l’hémicycle.
Finalement, il n’en a rien été et selon toute vraisemblance, les Sénégalais devraient légitimer le nouveau pouvoir en lui donnant les clés de la nouvelle Assemblée nationale. Restera alors ce que fera Pastef de tant de pouvoirs. S’ils vont nourrir ses désirs de vengeance qui sont probablement légitimes en raison de nombreuses années de répression subies par ses élites, ou, bien au contraire, si cela va l’aider à rassembler le pays derrière lui pour dérouler le programme pour lequel il a été élu.
Le chômage des jeunes
Car comme tous les pays africains, le Sénégal fait face à de nombreux problèmes économiques, à commencer par le chômage des jeunes dont les chiffres décoiffent. Selon l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD) au 1er juillet 2024, ce taux est en effet de 34,4% pour la tranche d’âge de 15 à 24 ans. Celle-ci n’a ni emploi, ni éducation, ni formation. Ce chiffre est nettement supérieur au taux national de chômage qui s’établit à un niveau tout de même assez haut de 23,2% en hausse par rapport à 2023 où il s’établissait à 21,0%.
D’ailleurs, signe des temps, le pays a enregistré le 8 septembre dernier, le naufrage d’une pirogue transportant 400 candidats à l’émigration. 39 morts sont morts noyés. Leur drame est celui vécu au quotidien par des milliers de jeunes sénégalais livrés au désespoir d’une situation économique sans issue. Au total, l’organisation internationale de la migration (OIM) dénombre 50.000 morts dans le monde lors de la traversée périlleuse vers l’Atlantique dont 9.000 africains depuis 2014. Aucune statistique de naufragés sénégalais mais nul n’est dupe, le Sénégal est la plaque tournante de l’émigration clandestine.
Ce même mois de septembre, une autre pirogue s’était fait arraisonner aux abords de la plage de Mbour, à environ 100 km de Dakar, déclenchant un flot de critiques contre le gouvernement, « incapable » de faire le miracle qu’il avait promis pour tout résoudre d’un seul coup de baguette magique, s’est gaussé l’opposition.
Pourtant, ces problèmes ne sont pas nouveaux. A dix jours de l’élection présidentielle, Bassirou Diomaye Faye qui présentait son programme intitulé « Projet d’un Sénégal souverain, juste et prospère », assurait être « conscient des exigences et des attentes auxquelles je devrais répondre (…) à la tête du Sénégal », et promettait « une destinée meilleure grâce à notre sens du patriotisme », disait-il en invitant « chaque sénégalais à se situer comme acteur de l’histoire » de son pays.
Mettre fin au gaspillage
Ainsi, pour les 5 prochaines années, le nouveau pouvoir a promis de « consolider les institutions démocratiques, repenser le système judiciaire et améliorer la gouvernance des ressources naturelles ». D’ores et déjà, Bassirou Diomaye Faye a déjà organisé les assises de la justice dans son pays conformément à ses promesses et a pris un décret mettant fin au conseil économique et social et au Haut conseil des collectivités territoriales pour mettre fin au gaspillage des ressources publiques.
Le gouvernement rêve également de mener une lutte hardie contre les détournements de deniers publics mais, pour ce faire, a besoin d’installer une haute cour de justice qui seule peut lui permettre de poursuivre les anciens pontes du pouvoir de Macky Sall. L’autre chantier qui tarde est celui de la renégociation des contrats pétroliers et miniers. Le gouvernement n’a pas encore mis en œuvre ses promesses électorales alors que le pays a enregistré ses 100.000 premiers barils journaliers de pétrole et est officiellement entré dans le cercle fermé des pays pétroliers.
Est aussi attendue la mise en pratique du projet « endogénéisation de l’économie » à travers la promotion des entreprises privées nationales et la « coopération internationale multiforme, en permettant aux acteurs économiques sénégalais de penser à un partenariat gagnant-gagnant dans les marchés publics ». Mais pour mettre en place cette politique comme d’autres, le gouvernement aura besoin d’avoir la majorité parlementaire. Mais une fois que ce sera fait, le duo Sonko-Diomaye Faye n’aura plus d’excuse tout au long des cinq prochaines années.