
APRNEWS: Ministère de la Construction, Ministère des Miracles!
En 1993, M. Amadou obtient une parcelle de 900 mètres carrés dans un lotissement pour sa fille O. Adja. Après le décès de M. Amadou en 2013, Mlle Adja est approchée en 2020 par M. S.B pour acheter la parcelle. Lors de la transaction, il est découvert que Mlle Adja a une "double attribution" de terrain, car une autre personne, M. S.B, a obtenu un document similaire pour la même parcelle. Des investigations révèlent des irrégularités dans l'obtention de l'Attestation Domaniale de M. S.B. Malgré un recours rejeté par le ministère, Mlle Adja a saisi le Conseil d'État pour obtenir justice.
En 1993, M. Amadou devient attributaire du lot Numéro 874 de l’îlot 62 du lotissement « BONOUMIN EST-OUEST », par Lettre d’Attribution 4385/MECU/SDU du 18 octobre 1993, signée par le ministre de la Construction, Ezan Akele.
La parcelle est d’une superficie de 900 M2.
M. Amadou a acquis le terrain pour sa fille O. Adja née le 11 mars 1992 à Tanda. Il met l’acte au nom de sa fille, le terrain devant être à sa majorité, son héritage.
Le père Amadou, décède en 2013.
En 2020, M. S.B, approche Mlle Adja et lui propose d’acheter sa parcelle qui a pris une énorme valeur marchande.
Mlle Adja et M. S.B se retrouvent devant le notaire pour conclure l’acte de vente.
Là, devant le fait que Mlle Adja, alors âgée de 28 ans, ne dispose que de sa lettre d’attribution, le notaire lui conseille de consolider ses droits en faisant sa demande d’ACD.
La vente n’est donc pas conclue mais l’acquéreur, qui avait déjà une copie de la Lettre d’attribution de Mlle Adja, se dit prêt à attendre l’attestation domaniale.
Dans les jours qui suivent, Mlle Adja introduit sa demande d’ACD auprès des services du ministère de la construction.
Le 15 avril 2020, elle paye les frais de dossier à hauteur de 90 mille francs et il lui délivré un reçu (Odre de recettes des droits domaniaux).
Le 11 Mai 2020, sous la signature de Diallo Abdoulaye, actuel Directeur du Domaine Urbain, une Attesation Domaniale numéro 14-421/MCLU/DGUF/DDU/COD est délivrée à Mlle ADJA (voir document joint).
Le 14 mai 2020, le Chef de Centre Opérationnel Domanial Abidjan-Est, par courrier 20/00930/MCLU/DGUF/DDU/COD, ayant pour objet création de titre foncier, informe Mlle Adja de la prise en compte de son dossier et du processus de bornage contradictoire en vue de la création du titre foncier.
Dans l’attente de son ACD, le 26 janvier 2021, Mlle Adja demande un état domanial de son terrain.
Là, elle est surprise d’apprendre que le terrain fait l’objet d’une « double attribution ».
Qui donc a pu faire une autre demande d’ACD sur sa parcelle alors que les services du ministère ne lui ont jamais parlé de cette demande au moment où elle faisait les formalités ?
Pour en avoir le cœur net, elle saisit le juge du Plateau et obtient une ordonnance de compulsoire des archives du ministère de la Construction.
Le résultat du compulsoire est terrifiant.
Le 18 octobre 2020, sur la parcelle de Mlle Adja, un ACD a été délivré à M. S. B.
Et qui ce monsieur S.B? Eh bien celui qui, quelques mois plutôt, avait voulu acheter devant notaire, la parcelle de Mlle Adja.
Comment a-t-il procédé pour avoir l’ACD dans un laps de temps aussi court et surtout avec quel document?
Le compulsoire permettra de découvrir qu’il a fait la demande d’ACD avec une lettre d’attribution datée du 27 décembre 2005 alors que celle de Mlle Adja, datée du 18 octobre 1993, n’a jamais été annulée.
Le compulsoire permet également de découvrir que Diallo Abdoulaye, le directeur du domaine urbain, a délivré à M. S.B, une Attestation Domaniale Numéro 14-427/MCLU/ DGUF/DDU/COD le 11 mai 2020.
Ainsi, à la même date du 11 mai 2020, Diallo Abdoulaye a délivré deux Attestations domaniales sur la même parcelle à deux personnes differentes, celle de Mlle Adja ayant le Numéro 14-421 donc antérieur à celle de S.B.
Devant cette situation, Mlle Adja saisit le ministre de la Construction d’un recours gracieux en vue d’annuler l’ACD de S.B qui a été obtenu manifestement dans des conditions troubles.
Le 31 mai 2021, la réponse de Kaba Mory, Directeur des affaires juridiques, dans une lettre adressée à Mlle Adja, tombe:
« Les diligences accomplies dans le cadre de votre dossier établissent que la Lettre d’attribution en votre possession n’est pas connue des registres domaniaux du Ministère « , écrit-il.
Le recours de Mlle Adja est donc rejeté.
La Lettre d’attribution de Mlle Adja n’est pas reconnue par le ministère mais le ministère a traité sa demande d’ACD et lui a délivré une Attesation Domaniale sous la signature de Diallo Abdoulaye.
Le 21 juillet 2021, Mlle Adja a saisit le Conseil d’Etat auprès de qui, elle a demandé secours pour que justice lui soit rendue.
L’affaire est encore pendante devant ledit Conseil.
Elle n’est pas belle la Côte d’Ivoire ?
ASSALE TIÉMOKO ANTOINE
JOURNALISTE D’INVESTIGATION
DÉPUTÉ DE LA NATION.
L’histoire de Mlle Adja met en lumière les dysfonctionnements et les pratiques douteuses qui peuvent exister dans les systèmes administratifs et fonciers, notamment en ce qui concerne la gestion des titres de propriété et des attributions de terrains.
Double attribution : La parcelle de Mlle Adja a été attribuée à deux personnes différentes, ce qui est une violation flagrante des principes de gestion foncière. Cela soulève des questions sur la transparence et l’intégrité des procédures administratives au sein du ministère de la Construction.
Rôle du directeur du domaine urbain : Diallo Abdoulaye, le directeur du domaine urbain, a délivré deux attestations domaniales pour la même parcelle à deux personnes différentes le même jour. Cela indique une négligence grave, voire une complicité dans une fraude potentielle.
Recours gracieux rejeté : Le rejet du recours gracieux de Mlle Adja par le directeur des affaires juridiques, Kaba Mory, sur la base que sa lettre d’attribution n’est pas connue des registres domaniaux, est problématique. Cela contredit le fait que le ministère a déjà traité sa demande d’ACD et lui a délivré une attestation domaniale.
Saisine du Conseil d’État : Mlle Adja a saisi le Conseil d’État pour obtenir justice. Cette étape est cruciale car elle permet de faire appel à une autorité judiciaire supérieure pour examiner les irrégularités et les injustices commises.
Implications plus larges : Cette affaire soulève des questions sur la gouvernance et la corruption potentielle au sein des institutions publiques. Elle met en évidence la nécessité de réformes pour garantir la transparence, l’intégrité et la justice dans la gestion des ressources foncières.
Rôle du journaliste et député : Assale Tiemoko Antoine, en tant que journaliste d’investigation et député, joue un rôle crucial en exposant ces dysfonctionnements et en plaidant pour des réformes. Son travail est essentiel pour sensibiliser le public et pousser à des changements systémiques.
Cette affaire illustre les défis auxquels sont confrontés les citoyens dans la protection de leurs droits fonciers et la nécessité de renforcer les mécanismes de contrôle et de transparence au sein des institutions publiques. Elle met également en lumière l’importance du rôle des médias et des représentants élus dans la lutte contre la corruption et la promotion de la justice sociale.