APRNEWS: Le silence de Paul Biya attise les rumeurs

APRNEWS: Le silence de Paul Biya attise les rumeurs

Le Président camerounais n’est pas apparu sur la scène publique depuis le début septembre. Les rumeurs vont bon train, même si Paul Biya est un habitué de ces périodes de silence.

Les services de la Présidence ont beau se montrer rassurants, et certifier que le président « en excellente santé » va bientôt réapparaître, les rumeurs et les interprétations politiques s’amplifient, à défaut d’informations fermes.

Paul Biya, 91 ans, n’a pas été vu en public depuis le 4 septembre, à son retour du sommet Chine Afrique, le FOFAC. Certes, il est habitué, depuis 1982, de ces « absences », elles font même partie intégrante de sa stratégie politique ; cette fois, le manque nourrit les rumeurs, – y compris celles d’un coup politique –, nourries par le silence des grands médias du pays. Il est d’ailleurs interdit d’organiser des débats politiques à la radio et à la télévision.

Il « travaille et vaque à ses occupations à Genève », selon la présidence ; il « se porte bien et rejoindra le Cameroun dans les prochains jours », selon le porte-parole du gouvernement.

« Le chef de l’État est la première institution de la République, et les débats sur son état relèvent du domaine de la sécurité nationale », stipule une note signée par Paul Atanga Nji, le ministre de l’Administration territoriale. « Tout débat dans les médias sur l’état du président de la République est par conséquent formellement interdit », et « les contrevenants devront faire face à la rigueur de la loi », poursuit cette note interne datée du 9 octobre.

Le texte ordonne à chaque gouverneur de créer « des cellules de veille chargées de suivre et d’enregistrer toutes les émissions et débats dans les médias privés et d’identifier les auteurs de commentaires tendancieux, y compris ceux qui agissent à travers les réseaux sociaux ».

Certains observateurs se demandent si cette interdiction n’a pour principal objectif de couper court à toute guerre de succession. Laquelle finira bien par arriver, tôt ou tard. Les prochaines élections présidentielles sont prévues pour 2025 ; nul ne sait si Paul Biya pourra s’y présenter, en dépit de l’amicale pression de ses partisans.

Dans ce contexte, le flou entretenu par les autorités camerounaises sur l’état de santé du président pourrait n’être qu’une stratégie destinée à prolonger son assise sur le pouvoir et à interdire une mobilisation éventuelle de l’opposition. Un scénario rendu crédible par le fait que ladite opposition est elle-même divisée et peu organisée, ce qui laisse toute latitude aux partisans de Paul Biya de consolider son pouvoir avant les élections.

 

Dans l’attente d’un retour

Alors, une provocation de plus avant son retour ? Dans sa thèse de doctorat, le professeur de sociologie à l’Université de Yaoundé 1, Nga Ndongo, énumérait onze rumeurs publiques sur le président camerounais de 1983 à 2004, rapporte la BBC. À chaque fois, ces rumeurs créent des remous au sein de la population camerounaise. En 2024, les rumeurs sont amplifiées par les réseaux sociaux, qui n’hésitent pas à évoquer la mort du Président, obligeant l’administration à réagir, contrairement aux fois précédentes. Ce fut le déjà le cas en 2004, lorsque plusieurs organes de presse avaient annoncé le décès présidentiel, sans grande précaution déontologique, il est vrai. Certains ont même poussé le vice à citer une soi-disant confirmation de son épouse, Chantal Biya.

Vingt ans après, la situation se reproduit. Le cabinet civil de la présidence a diffusé des télégrammes, comme celui où Paul Biya félicite Taye Atske Sélassié, « suite à son élection à la Magistrature Suprême de la République Démocratique Fédérale d’Ethiopie ». Deux autres télégrammes félicitent les dirigeants Espagnol et Équato-guinéen pour la célébration de leurs fêtes nationales. Télégrammes sans signature officielle…

Surtout, le retour annoncé de Paul Biya à une manifestation politique, le 13 octobre, aura fait beaucoup de déçus chez ses sympathisants : le Président n’est pas apparu comme prévu. Ce serait imminent, déclarent certains organes de presse qui croient savoir que Paul Biya est actuellement en Suisse.

Pour couper court aux « manœuvres de désinformation » l’annonçant « gravement malade, voire passé de vie à trépas », la présidence a publié le 15 octobre un communiqué rassurant sur son « excellent état de santé ». Il « travaille et vaque à ses occupations à Genève », selon la présidence ; il « se porte bien et rejoindra le Cameroun dans les prochains jours », selon le porte-parole du gouvernement.

En cas de vacance du pouvoir, il est prévu que le président du Sénat prenne le relais. Problème : le titulaire du poste, Marcel Niat Njifenji, âgé de 90 ans, fait lui-même l’objet de rumeurs concernant son état de santé…

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