
APRNEWS: La politique de façade contre la corruption en Côte d’Ivoire, selon Amnesty International ? Par Mamkoul
L'analyse d'Amnesty International sur la lutte contre la corruption en Côte d'Ivoire met en lumière un paradoxe : malgré la création de plusieurs institutions et une amélioration apparente dans les indices internationaux, la corruption reste endémique et systématique dans le pays.
● 1) Constat: L’Etat la Côte d’lvoire perdrait plus de 1000 milliards de Fcfa chaque année, du fait de la corruption.
Voilà un chiffre qui fera bien progresser le PIB dans le prochain rebasage des comptes nationaux du pays.
●2) Cette corruption endémique mettait la Côte d’Ivoire dans une mauvaise posture dans l’indice de la perception de la corruption de Transparency International.
Il fallait améliorer cette image.
● 3) Pour cela, l’État de Côte d’Ivoire met en place de nombreuses institutions de lutte contre la corruption telles que :
▪︎ La Haute Autorité pour la Bonne Gouvernance (2014);
▪︎ La Cour des Comptes (2018);
▪︎ L’Inspection Générale d’Etat (2018);
▪︎ Le Pôle Pénal Économique et Financier, (2020);
▪︎ Le Ministère de la Promotion de la Bonne Gouvernance, du Renforcement des Capacités et de la Lutte contre la Corruption;
( dissout en décembre 2023, deux ans après sa création).
Donc une pléiade d’Institutions existent pour lutter contre la corruption.
●4) Résultat:《 Selon l’Indice de perception de la corruption de Transparency, le score de la Côte d’Ivoire est passé de 35 sur 100 en 2018, à 40 sur 100 en 2023. 》
Rien qu’avec ses créations de façade, le score du pays s’améliore à la grande satisfaction du gouvernement.
Mais,
● 5)《 Plusieurs enquêtes de I’ONG africaine Afrobaromètre révèlent, par ailleurs, aux dires de Amnesty , que
les Ivoiriens demeurent insatisfaits de la lutte des autorités contre la corruption qui, selon eux, est grandissante et
systématique, malgré les actions que le gouvernement dit mener.
la corruption perdure dans tous les secteurs de l’économie et dans toute la société.
Il n’y a même pas un secteur qui va bien, selon une défenseure anticorruption. Un jeune étudiant en droit a ajouté : la corruption est devenue une norme.
Celui qui refuse d’être corrompu peut être écarté de la société.
D’autres acteurs ont cité des cas allégués d’abus de
pouvoir; de pots-de-vin dans de nombreux secteurs comme I’immobilier; de malversations de fonds publics destinés à la
construction des infrastructures; et de ventes aux enchères des postes dans l’administration publique. 》
Donc les populations qui sont conscientes du pouvoir de la corruption, se mettent en compétition pour ne pas rester en marge et pouvoir en profiter.
● 6) Mais pourquoi donc, cette impression que rien ne se fait?
Selon Amnesty, tous les cas sont supposés remonter au PR, la seule autorité à décider des suites à donner aux cas avérés de corruption.
Parce que《 l’IGE, qui est l’agence qui coordonne les activités de tous les autres organes d’inspection, d’audit et de contrôle internes administratifs est, selon le décret n°2018-653 du 1/8/ 2018, placée sous la haute autorité du Président de la République, qui est le seul à se prononcer sur les éventuelles suites à donner aux rapports qui lui sont transmis.》
Et puis,
● 7) Il y a cette impossible reddition des comptes .
《 Un autre exemple soumis par un représentant d’une agence onusienne basée à Abidjan, est celui de la loi sur la déclaration des patrimoines, qui selon lui a été vidé de son sens car il n’y a aucun moyen de vérifier l’information qui est publique. Seul l’officier public qui reçoit le dossier peut connaitre la vraie valeur de ce qui est déclaré et ces déclarations ne sont pas publiques.》
Et puis,
● 8) Il y a de nombreux intouchables dans le système.
《 Les interlocuteurs et interlocutrices d’Amnesty International ont remis en cause l’impartialité du système judiciaire
ivoirien, qui selon eux semble s’attacher aux dossiers les moins importants et aux agents publics les moins gradés plutôt qu’à leurs supérieurs et à des figures politiques et des hommes d’affaires qui, selon eux, sont les plus corrompus et restent
pourtant intouchables. Des exemples ont été cités de hauts cadres soupçonnés de corruption n’ayant fait l’objet d’aucune enquête judiciaire.》
Une synthèse détaillée des points clés et des enjeux soulevés :
Constat : Un coût économique énorme
1000 milliards de FCFA perdus chaque année :
La corruption prive l’État ivoirien de ressources considérables, qui pourraient être investies dans des secteurs clés comme l’éducation, la santé et les infrastructures.
Ce chiffre illustre l’ampleur du problème et son impact sur le développement économique du pays.
Image internationale et perception de la corruption
Indice de perception de la corruption (Transparency International) :
La Côte d’Ivoire a amélioré son score, passant de 35/100 en 2018 à 40/100 en 2023.
Cette progression est souvent présentée comme une preuve des efforts du gouvernement, mais elle masque une réalité plus complexe.
Création d’institutions de lutte contre la corruption
Le gouvernement ivoirien a mis en place plusieurs structures pour lutter contre la corruption, notamment :
Haute Autorité pour la Bonne Gouvernance (2014)
Cour des Comptes (2018)
Inspection Générale d’État (IGE, 2018)
Pôle Pénal Économique et Financier (2020)
Ministère de la Promotion de la Bonne Gouvernance (dissous en décembre 2023)
Cependant, ces institutions sont souvent perçues comme des mesures de façade, sans réelle efficacité sur le terrain.
Résultats mitigés
Amélioration des scores internationaux :
Les créations institutionnelles ont permis à la Côte d’Ivoire d’améliorer son image sur la scène internationale.
Insatisfaction des citoyens :
Selon Afrobaromètre, les Ivoiriens estiment que la corruption est grandissante et systématique, touchant tous les secteurs de l’économie et de la société.
La corruption est devenue une norme sociale, où ceux qui refusent de participer risquent d’être marginalisés.
Secteurs touchés par la corruption
Immobilier : Pots-de-vin et abus de pouvoir.
Infrastructures publiques : Malversations de fonds destinés à la construction.
Administration publique : Vente aux enchères de postes.
Système judiciaire : Partialité et impunité pour les élites.
Centralisation du pouvoir et absence de reddition des comptes
Rôle du Président de la République :
Selon Amnesty International, tous les cas de corruption remontent au Président de la République, qui décide seul des suites à donner.
L’Inspection Générale d’État (IGE), chargée de coordonner les activités de lutte contre la corruption, est placée sous l’autorité directe du Président, ce qui limite son indépendance.
Déclaration des patrimoines :
La loi sur la déclaration des patrimoines est vidée de son sens, car les informations ne sont pas accessibles au public et ne peuvent pas être vérifiées.
Seul l’officier public qui reçoit le dossier connaît la vraie valeur des déclarations.
Impunité des élites
Intouchables :
Le système judiciaire ivoirien est accusé de s’attaquer aux petits fonctionnaires plutôt qu’aux hauts responsables politiques et hommes d’affaires impliqués dans des affaires de corruption.
Des exemples de hauts cadres soupçonnés de corruption n’ayant fait l’objet d’aucune enquête ont été cités.
Pourquoi cette impression que rien ne se fait ?
Manque d’indépendance des institutions
Les organes de lutte contre la corruption sont sous le contrôle direct du pouvoir exécutif, ce qui limite leur efficacité.
Absence de transparence :
Les déclarations de patrimoine et les rapports d’enquête ne sont pas rendus publics, ce qui empêche toute vérification indépendante.
Culture de l’impunité
Les élites politiques et économiques bénéficient d’une immunité de facto, ce qui décourage les efforts de lutte contre la corruption.
Analyse et implications
Gouvernance et transparence
La lutte contre la corruption nécessite des institutions indépendantes et transparentes, capables de fonctionner sans ingérence politique.
La centralisation du pouvoir autour du Président de la République affaiblit ces institutions.
Engagement citoyen
Les Ivoiriens sont conscients de l’ampleur de la corruption, mais se sentent impuissants face à un système qui favorise les élites.
Une plus grande implication de la société civile et des médias indépendants pourrait aider à briser ce cercle vicieux.
Impact sur le développement :
La corruption entrave le développement économique et social de la Côte d’Ivoire en détournant des ressources publiques essentielles.
Une lutte efficace contre la corruption pourrait libérer des fonds pour des projets de développement et améliorer la qualité de vie des citoyens.
Recommandations
Renforcer l’indépendance des institutions
Les organes de lutte contre la corruption doivent être autonomes et protégés des pressions politiques.
La création d’une autorité anticorruption indépendante pourrait être une solution.
Rendre les déclarations de patrimoine accessibles au public :
La transparence est essentielle pour restaurer la confiance des citoyens.
Les déclarations de patrimoine des responsables publics devraient être publiées et vérifiables.
Lutter contre l’impunité
Les enquêtes judiciaires doivent cibler les hauts responsables impliqués dans des affaires de corruption, sans distinction de rang ou de statut.
Des sanctions exemplaires doivent être appliquées pour dissuader les pratiques corruptrices.
Sensibiliser et éduquer
Des campagnes de sensibilisation sur les méfaits de la corruption et les droits des citoyens pourraient encourager une plus grande participation publique.
L’éducation civique devrait inclure des modules sur la transparence et la bonne gouvernance.
La lutte contre la corruption en Côte d’Ivoire reste un défi majeur, malgré les efforts apparents du gouvernement. Pour être efficace, cette lutte doit s’appuyer sur des institutions indépendantes, une transparence accrue et une volonté politique réelle. Sans ces éléments, les mesures prises risquent de rester des gestes symboliques, incapables de répondre aux attentes des citoyens et de libérer le potentiel économique du pays.