APRNEWS: Koyo Kouoh, éclaireuse de l’art africain contemporain, s’est éteinte

APRNEWS: Koyo Kouoh, éclaireuse de l’art africain contemporain, s’est éteinte

Koyo Kouoh, une figure majeure de l'art contemporain, est décédée à l'âge de 58 ans, laissant le monde de l'art dans la stupeur. Elle était sur le point de diriger la Biennale de Venise en 2026, promettant une édition marquante. Son engagement pour une scène artistique plurielle et internationale a été salué par des hommages émus de la Biennale et du maire de Venise. Sa carrière exemplaire, de Dakar au Cap, a été dédiée à promouvoir les artistes africains à l'échelle mondiale. Sa disparition laisse un vide immense, mais son héritage continue d'inspirer et de redéfinir l'art contemporain.

L’art est une extension de nous-mêmes, parce que nos vies ne suffisent pas. » La phrase de Koyo Kouoh, souvent prononcée avec calme et gravité, résonne cruellement ce samedi soir. Certains demandent encore, incrédules : « Koyo est morte ? » D’autres lisent les hommages sans y croire. L’annonce de son décès brutal, survenu dans la nuit du 9 au 10 mai, à l’âge de 58 ans, plonge le monde de l’art contemporain dans le trouble et la stupeur.

Commissaire d’exposition visionnaire, figure pionnière de la scène artistique africaine et internationale, Koyo Kouoh avait été nommée en décembre 2024 à la direction de la 61ᵉ édition de la Biennale de Venise, dont l’ouverture était prévue pour mai 2026. Sa disparition laisse cette édition orpheline d’une femme dont la vision promettait de marquer un tournant.

Un choc pour Venise et le monde de l’art

Dans un communiqué empreint d’émotion, la Biennale a salué une « disparition soudaine et prématurée » et rappelé que la présentation du titre et du thème de cette 61ᵉ édition, que Koyo Kouoh préparait avec passion, était prévue le 20 mai. « Elle a travaillé avec passion, rigueur et vision […]. Sa disparition laisse un vide immense dans le monde de l’art contemporain et dans la communauté internationale d’artistes, de curateurs et de chercheurs qui ont pu apprécier son engagement intellectuel et humain. » L’ensemble de l’institution « s’associe avec affection à la famille, aux amis et à tous ceux qui ont partagé avec elle ce chemin de pensée critique et de recherche. »

Le maire de Venise, Luigi Brugnaro, s’est dit « profondément choqué et attristé » par la nouvelle. « Sa figure n’était pas seulement celle d’une grande artiste et d’un esprit brillant sur la scène internationale, mais aussi celle d’une femme capable d’écouter, de construire des ponts entre des cultures lointaines. Nous avions accueilli avec enthousiasme sa nomination, certains qu’elle apporterait une vision nouvelle et créative. »

Une trajectoire exemplaire au cœur des scènes artistiques africaines et internationales

Née à Douala, au Cameroun, Koyo Kouoh avait très tôt quitté son pays natal pour la Suisse, où elle avait entamé des études en administration et en finance. Mais c’est dans le monde de l’art qu’elle trouvera sa véritable vocation. En 2008, elle fonde à Dakar RAW Material Company, un espace de résidences et de réflexion critique qui deviendra l’un des foyers les plus féconds de la création contemporaine en Afrique de l’Ouest.

En 2019, elle prend les rênes du Zeitz MOCAA, au Cap, le plus grand musée d’art contemporain du continent africain. Sous sa direction, l’institution retrouve une ambition internationale et une exigence curatoriale reconnue, à travers des expositions puissantes comme When We See Us: A Century of Black Figuration in Painting ou encore la rétrospective consacrée à Tracey Rose.

Son engagement inlassable pour l’émergence d’un récit artistique pluriel, décentré, l’a conduite à participer à plusieurs biennales internationales, dont deux éditions de la Documenta à Kassel. Elle n’était pas seulement commissaire : elle était pédagogue, stratège, éclaireuse. Une femme de conviction, à la parole libre, qui n’a cessé de défendre la place des artistes africains dans le concert mondial.

Fidèle à sa ligne, elle affirmait à sa nomination à Venise : « Ce ne sera pas une Biennale africaine. Ce sera une Biennale internationale, comme toujours. » À ceux qui voyaient en elle une militante identitaire, elle répondait : « Mon parcours est certes ancré dans l’espace africain, mais je suis une commissaire d’exposition internationale. »

Sa disparition prématurée laisse un vide immense dans le monde de l’art contemporain. Mais son œuvre, elle, continue d’irriguer les imaginaires. Koyo Kouoh n’a pas seulement ouvert des portes : elle a redessiné la carte de l’art mondial.
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