APRNEWS : Jacaranda, le nouveau roman du rwandais Gaël Faye « l’histoire du silence dans les familles, à l’ombre duquel on grandit ».

APRNEWS : Jacaranda, le nouveau roman du rwandais Gaël Faye « l’histoire du silence dans les familles, à l’ombre duquel on grandit ».

« Jacaranda », est le nom d’un arbre aux fleurs violettes délicates. C’est aussi le titre du nouveau livre de l’écrivain rwandais également rappeur Gaël Faye, paru le 14 Août 2024 et qui est déjà l’un des événements de cette rentrée littéraire.

Dans son premier roman, qui lui a valu le prix Goncourt des lycéens en 2016, Gaël Faye embarquait les lecteurs au Burundi en 1993. Il y racontait la guerre civile dans son pays natal puis le génocide des Tutsis au Rwanda à travers les yeux d’un jeune garçon, forcé à l’exil.

Dans « Jacaranda », les lectrices et lecteurs suivent le troublant pèlerinage de Milan, le narrateur, qui découvre le Rwanda en effectuant plusieurs voyages à Kigali, terre natale de sa mère. Milan qui comme Gabriel dans « Petit Pays », et comme l’auteur lui-même, est né d’une mère rwandaise et d’un père français.

Dans ce pays dévasté et en pleine reconstruction, Milan va rencontrer quatre générations et remonter avec elles le fil de l’Histoire pour percer les silences du Rwanda.

Au fil des décennies, Il prend racine dans ce pays qui est aussi le sien, à l’image des jacarandas, ces arbres au feuillage mauve qui donnent leur nom au roman.

Un ouvrage difficile et violent autant que nécessaire mais écrit avec la douceur et la tendresse que l’on connaît à son auteur.

Gaël Faye disait ne pas vouloir être prisonnier de cette partie de son histoire. Il s’y replonge pourtant avec ce deuxième roman.

« J’ai découvert le Rwanda tout de suite après le génocide et j’ai vu ce pays évoluer, changer depuis trente ans. Trente ans, c’est le temps d’une génération et je me disais qu’il y avait une urgence à prendre une photographie de l’instant », raconte Gaël Faye dans l’émission Vertigo du 28 août.

Comprendre le Rwanda

Gaël Faye vit au Rwanda depuis plusieurs années. Il n’y a pourtant pas vécu enfant, sa famille ayant vécu l’exil pendant trente ans au Burundi.

L’auteur a ressenti le besoin de s’y établir pour élever ses propres enfants. « J’ai mis du temps à comprendre le Rwanda. Pendant des années, je m’y rendais pour visiter ma famille qui était retournée s’établir là-bas tout de suite après le génocide. J’y allais en vacances. Ce pays me faisait peur, ce pays m’effrayait, me troublait », indique-t-il.

Le Rwanda a bien changé. Les champs de ruines ont désormais laissé place à un pays moderne plébiscité par les touristes, à tel point que Gaël Faye parle d’une start-up nation et rappelle que 70% de sa population est née après le génocide.

Une fiction qui interroge le passé des uns et des autres de manière réaliste.

Lui qui est né avant le génocide, se sent la responsabilité d’être le trait d’union entre ces générations. « J’avais onze ans quand le génocide a eu lieu. Je n’ai donc pas participé à l’effort de reconstruction, mais j’ai vu la génération de mes parents reconstruire le pays. (…) », souligne l’auteur.

« Aujourd’hui au Rwanda, quand je rencontre des hommes d’un certain âge, je me demande toujours où ils étaient ce fameux printemps 1994 », ajoute Gaël Faye.

Un travail de mémoire

Ce roman fait aussi un rappel de l’histoire, car si dans notre mémoire les massacres des Tutsi commencent en 1994, dans la réalité, les premiers datent de 1959.

Auparavant, les colonies allemandes, puis belges, créent déjà des groupes ethniques et figent des classes sociales en catégories raciales.

« Il fallait déconstruire cela, au lendemain du génocide. Rappeler d’où nous venions, quelle était notre histoire. Car la colonisation avait raconté un autre narratif », précise Gaël Faye.

Comme pour son personnage Milan, Gaël Faye a grandi dans une famille où le silence était de mise. Pour comprendre l’histoire, il s’est tourné vers la littérature.

Avec le succès de son premier roman, il réalise que bon nombre de ses lecteurs et lectrices découvrent l’Histoire à travers ses mots.

« J’ai conscience de pouvoir être une porte d’entrée pour prendre connaissance de cette histoire, mais j’espère qu’après, on puisse prolonger la curiosité, parce qu’un seul livre, et d’ailleurs une seule vie, ne suffit pas pour comprendre ce qui s’est joué ».

Aprnews avec RTS.ch

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