APRNEWS: Abidjan bulle immobilière – Ça se confirme.

APRNEWS: Abidjan bulle immobilière – Ça se confirme.

La bulle immobilière est un phénomène complexe et souvent mal compris, avec des conséquences dévastatrices sur l'économie et la stabilité financière. En Côte d'Ivoire, plus précisément à Abidjan, la situation actuelle montre des signes inquiétants de formation d'une bulle immobilière, alimentée par divers facteurs tels que l'inflation mondiale, le blanchiment d'argent et la corruption. Cette analyse approfondie vise à examiner les symptômes, les risques et les perspectives liés à cette bulle immobilière émergente.

Analyse de la bulle immobilière à Abidjan, Côte d’Ivoire : Symptômes, Risques et Perspectives
Avant propos : Dans cette analyse des éléments de langage en français simple seront utilisés pour une meilleure compréhension du problème par le citoyen lambda. Ils sont entre parenthèses.
La crise financière mondiale de 2008–09 avait pour contexte l’éclatement d’une bulle de l’immobilier résidentiel que peu avaient vu venir. À l’heure actuelle, les bulles immobilières potentielles ne sont pas surveillées en Afrique subsaharienne et restent mal comprises. Or leurs effets sur la stabilité économique et financière sont dévastateurs. Aujourd’hui grâce à des outils de suivi en temps réel, les décideurs politiques, via les Instituts de statistiques, peuvent contribuer à maîtriser.
En Côte d’Ivoire et en particulier à Abidjan, 21,5 % de la population du pays, et représentant 60 % du PIB, ont construit à tour de bras et les prix de l’immobilier flambent. En raison de la politique de gentrification (les pauvres sont chassés du centre ville ) menée depuis 2012, le centre de la capitale se vide de sa population à plus faibles revenus, mais la hausse des prix de l’immobilier résidentiel, y compris dans les quartiers populaires (exemple Attiekoubé, ou Williamsville), est entretenue par deux phénomènes :
1/ l’inflation mondiale,
2/ le blanchiment d’argent.
Ces deux phénomènes sont pour le premier, la résultante de la crise de la COVID-19 et la guerre en Ukraine. Quant au blanchiment d’argent il a pour origine la corruption endémique dans l’administration publique en Côte d’Ivoire, les montages financiers nocifs mais massifs de type ponzi, dans l’agrobuness, les sociétés fictives d’investissement boursiers, les sociétés d’investissement dans le VTC, divers autres capsules similaires et surtout le trafics de cocaïne.
Le gouvernement ivoirien a reconnu officiellement que ces phénomènes sont des maux qui minent l’économie nationale. Le GAFI, Interpol, l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime et le Millenium Challenge Initiave relèvent tous également que la corruption, le blanchiment d’argent et le trafic de drogue génèrent des fonds qui sont injectés dans l’économie ivoirienne et en particulier dans l’immobilier résidentiel.
Or, une bulle se forme lorsque le prix d’un bien immobilier dépasse sa valeur intrinsèque si les conditions suivantes sont réunies :
1/ Les acteurs anticipent sur une poursuite de son appréciation (les propriétaires et les acteurs du secteur pensent que le marché va monter ),
2/ Le marché de l’immobilier résidentiel est caractérisé par une offre obstinément inélastique (pas de cohérence entre les prix dans une même zone ),
3 / Certains acteurs n’ont aucun intérêt à ce que le marché soit à la baisse.
Cette analyse qui s’appuie sur ces trois symptômes observables pour identifier les bulles, un peu comme on se sert de la tension comme indicateur précoce en matière de santé, est la méthodologie de détection de l’exubérance, que Peter Phillips et ses coauteurs ont été les premiers à formaliser. C’est la pierre angulaire de l’indice d’exubérance ( Indice de gonflement). Et une de ces tendances est la dynamique explosive des prix, ce que l’International Housing Observatory appelle « exubérance ».
La détection des bulles sur les marchés de l’immobilier résidentiel commence donc par une simple analyse attentive de l’évolution des prix réels des logements. Un peu comme lorsqu’un médecin prend vos principaux paramètres vitaux. En effet l’exubérance des prix nominaux de l’immobilier peut résulter d’une poussée inflationniste et non d’une bulle. Exprimer les prix de l’immobilier en termes réels permet d’éviter toute confusion en période d’hyperinflation ou d’ajustement de la politique publique. (Les prix peuvent monter par exemple si le gouvernement met de nouvelles taxes ou si le prix de l’acier grimpe).
Mais les hypothèses de l’hyperinflation et de l’ajustement de la politique publique sont à éliminer d’office. En Côte d’Ivoire, le gouvernement ne cesse de le répéter et l’INS le confirme, l’inflation est maîtrisée. Il y a certes de manière saisonnière des poussées inflationnistes importantes sur les denrées alimentaires et agroalimentaires, par exemple l’huile ou la banane plantain, mais sur les dix dernières années, l’inflation a été maîtrisée ( en dehors période COVID 19).
La hausse des prix dans l’immobilier à Abidjan a donc des traits de caractéristiques et typique d’une bulle, car tous les symptômes sont réunis. Enfin, l’accessibilité financière au logement, c’est-à-dire l’adéquation entre les prix de l’immobilier et le pouvoir d’achat des ivoiriens ( on mesure qui peut s’achèter une maison), est tout aussi importante à observer. Les banques se réfèrent souvent au ratio Dette/Revenu, qui mesure la part du revenu disponible affectée au remboursement de la dette. Un bon indicateur indirect est plutôt le ratio Prix/Revenu*. Si l’INS n’a pas ce ratio il serait bon qu’ils se penchent dessus.
La bulle immobilière est là, à Abidjan, essentiellement dans le centre ville, c’est-à-dire les grandes communes. Elle se fait ressentir dans les quartiers populaires comme dans les quartiers huppés. Les acteurs investisseurs dans ces zones, qui n’ont pas tenu compte des points suivants font faire face à des déconvenues importantes :
✓ Le schéma directeur de développement du Grand Abidjan (les villes nouvelles),
✓ Les nouveaux modes de déplacement en transport public (métro, bus, bateau-bus, BRT),
✓ Les nouvelles voies express ( Y4 et d’autres.)
✓ La lutte contre la corruption,
✓ La lutte contre le blanchiment d’argent,
✓ La lutte contre de trafic de drogue.
Lorsque tous ces points ou même certains de ces points aggravants, comme le trafic de drogue et le blanchiment d’argent de plus en plus sévèrement combattus par le Pôle Pénal Économique et Financier, seront atténués, la bulle immobilière va exploser. Se faisant, elle emportera avec elle les rêves de gains substantiels dont ont fait le pari beaucoup d’acteur investisseur dans le secteur de l’immobilier résidentiel à Abidjan et qui ont emprunté de l’argent aux banques. Et cela concerne les particuliers comme les entreprises immobilières.
Nota :
*Lorsque le ratio Prix/Revenu augmente, le financement devient plus difficile à obtenir, ce qui réduit la demande et fait baisser les prix. Ce ratio est essentiel pour faire la distinction entre les bulles résultant des anticipations et les autres dynamiques de marché.
La bulle immobilière à Abidjan représente un défi majeur pour l’économie ivoirienne, avec des risques potentiels pour les investisseurs et les particuliers. Il est impératif que les autorités prennent des mesures proactives pour réguler le marché immobilier, renforcer la transparence et promouvoir une croissance durable. En surveillant de près les indicateurs de bulle immobilière et en mettant en œuvre des politiques efficaces, il est possible d’éviter une crise financière majeure et de garantir la stabilité à long terme du secteur immobilier à Abidjan.
Jean Christian Konan- JCK
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