APRNEWS: Le rôle ambigu de l’Ouganda dans le conflit en RDC

APRNEWS: Le rôle ambigu de l’Ouganda dans le conflit en RDC

Kampala oscille entre une coopération militaire avec Kinshasa et des accusations de soutien à des groupes rebelles, notamment le M23.

Discret dans le conflit qui secoue l’est de la RDC, l’Ouganda y est militairement présent depuis des années et joue sur le territoire de son voisin un jeu à multiples bandes.

Officiellement, depuis 2021, l’armée ougandaise opère dans les provinces frontalières de l’Ituri et du Nord-Kivu pour combattre, aux côtés de l’armée congolaise, les rebelles ADF.

Mais, en même temps, Kampala apporte un soutien tacite à la rébellion du M23, selon le dernier rapport d’experts des Nations unies.

Tactique et stratégie

Pour Kristof Titeca, professeur de l’université d’Anvers et chercheur associé senior au sein du programme Afrique de l’Institut Egmont à Bruxelles, l’Ouganda a divers intérêts économiques, politiques et sécuritaires dans l’est de la RDC.

Dans la situation actuelle, l’Ouganda joue un jeu tactique dans lequel il poursuit des objectifs stratégiques propres, visant à renforcer son influence régionale.

« Le rôle de l’Ouganda reste particulièrement ambigu. L’Ouganda semble pour l’instant tracer sa propre voie, il ne s’est pas allié à Kigali ou au M23. Néanmoins, il est frappant de constater comment les forces ougandaises ont étendu leur territoire dans l’est de la RDC. L’Ouganda semble avoir une certaine indépendance dans ses actions. »

La RDC, par exemple, est un marché d’exportation vital pour les produits ougandais et une source importante d’or, le principal produit d’exportation de l’Ouganda.

Un silence qui en dit long

Le chef des forces armées ougandaises (UPDF), Muhoozi Kainerugaba, le fils du président Yoweri Museveni, a affirmé, dimanche, que ses troupes, ou bien le M23, entreraient « d’ici une semaine » dans la ville de Kisangani.

Muhoozi Kainerugaba est connu pour ses provocations qui ont pu engendrer parfois des tensions diplomatiques. Mais qu’est-ce qui explique le silence de la RDC face aux menaces de l’Ouganda ?

Pour Onesphore Sematumba, spécialiste des Grands Lacs à l’International Crisis Group, Kinshasa n’est pas en position de force pour répondre : « Il y a beaucoup de bon sens de la part du président congolais (Félix Tshisekedi), qui n’a pas voulu ouvrir deux fronts à la fois dans l’est. Sachant ce qu’une association ouverte entre Kigali et Kampala pourrait constituer comme menace. Il a préféré garder les relations avec Kampala stables pour ne pas se compliquer toute la diplomatie régionale. »

Selon plusieurs analystes, en RDC, le premier objectif de Kampala serait de s’assurer une zone tampon le long de sa frontière, pour se protéger à la fois des ADF et, à plus long terme, des risques politiques chez son voisin.

Récemment, Yoweri Museveni a déclaré que l’engagement ougandais en RDC n’avait « rien à voir avec le M23 ».

Absence de l’État

En effet, pourquoi Kampala sous-traiterait-il ses intérêts dans l’est de la RDC avec le M23, au lieu de le faire directement avec Kinshasa, avec qui il est en bons termes ?

« Depuis que la RDC, surtout sa partie Est, n’est pas gouvernée effectivement ou contrôlée par le régime de Kinshasa, avec le manque de contrôle de ses frontières, je pense que certaines puissances régionales prennent l’avantage de cette absence de pouvoir et de l’Etat », estime Ndebesa Mwambutsya est maître de conférence à l’Université Makerere de Kampala

L’Ouganda et le Rwanda sont notamment intervenus dans les deux grandes guerres du Congo (1996-1997, puis 1998-2003). En juin 2000, leurs troupes se sont affrontées pendant six jours en pleine ville de Kisangani.

DW

Catégories
Étiquettes
Partager ceci

Commentaires Mots-clés (0)