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Sculpture: Ces trésors des Forêts natales

© Sercom APRnews Photo Ces trésors des Forêts natales
Lundi, 18 décembre 2017

Sculpture: Ces trésors des Forêts natales

LePoint - Attention, chefs-d'œuvre à foison pour l'exposition « Forêts natales », dont le titre est un emprunt poétique à Apollinaire et fait référence à la forêt équatoriale. Dès le début du XXe siècle, le poète souhaitait déjà que les chefs-d’œuvre extraeuropéens soient considérés au même titre que la statuaire occidentale.

Au-delà des chiffres, avec 325 objets d'art classique de l’Afrique équatoriale atlantique, et de la qualité des œuvres parmi les plus belles et les plus cotées, le musée du Quai-Branly-Jacques Chirac offre un panorama de l’art africain sans aspect ethnographique ou esthétique.

« L’exposition se propose de présenter les principaux styles à la manière d’une histoire de l’art qui définit les différents degrés d’expression et de variations formelles », explicite Yves Le Fur, le directeur du patrimoine et des collections du musée du Quai-Branly, en poursuivant : « Le cas de figure est exactement le même que lorsqu’on parle du style roman, il y a le bourguignon, le catalan, le lombard, soit plusieurs particularismes régionaux. »

L’aire culturelle du Gabon recouvre également le sud du Cameroun, la Guinée équatoriale et l’ouest du Congo, beaucoup de nations africaines actuelles ayant été découpées lors de la conférence de Berlin en 1884-1885. Issues de migrations anciennes de groupes bantous, ces ethnies se caractérisent par une grande diversité et ne comptent que quelques milliers de personnes.

Cette région est aussi marquée par une prolifération linguistique : pas moins d'une soixantaine de langues pour le Gabon. Les particularismes de chaque peuple comme les similitudes dans leur conception du monde et leurs rituels ont généré des influences dans les formes artistiques.

Présenter la richesse des civilisations qui se sont succédé en Afrique équatoriale atlantique

Le parcours souligne ces grands ensembles stylistiques : les Fang et les Kwele au nord, les Kota à l’est, les Mbede au centre, les Galwa et les Tsogo à l'ouest, les Punu au sud. Ces principaux groupes culturels se déclinent en sous-groupes à l'inspiration esthétique parfois très différente.

« Les sculpteurs travaillaient pour différents lignages, il y a parfois des parentés mais aucun artiste n'a été identifié », explique Yves Le Fur en précisant : « Il y avait des artistes réputés, des formes qui plaisaient plus que d’autres. On décèle une aptitude pour inventer des formes, rien n’est jamais figé. »

L'exposition se focalise uniquement sur deux types d'objets : les masques utilisés lors des rituels de sociétés secrètes initiatiques et les statues liées aux cultes des ancêtres, comme ces reliquaires Kota collectés lors de la mission de l’explorateur Savorgnan de Brazza au XIXe siècle.

Pour montrer toute la richesse des variations de styles, la présentation s’appuie sur le fonds exceptionnel du musée du Quai-Branly, l’un des plus riches dans ce domaine, complétée par des œuvres emblématiques du musée Dapper, du Metropolitan Museum de New York, du musée suisse Barbier-Mueller et du Museum Fünf Kontinente de Munich.

Le résultat est stupéfiant, à l'image de cette vitrine d'une quarantaine de mètres de long qui décline les reliquaires Kota en nombre, ou simplement comme ce masque Kwele comportant six yeux en amande répartis symétriquement, qui fascine plusieurs générations d'artistes et de collectionneurs : « C'est un masque unique au monde. On m'en a montré des copies, mais je n'en ai jamais vu d'autres comme celui-ci », précise fièrement Yves Le Fur.